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Articles avec #pythagore-isis tag

Le voyage sur la lune selon Kepler

20 Juillet 2024 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire secrète, #Histoire des idées, #Pythagore-Isis

Les débats actuels sur la réalité de l'alunissage de 1969 nous le font peut-être oublier, mais la question du voyage sur la Lune a eu beaucoup d'importance sur le plan ésotérique, et a coûté fort cher à l'astronome J. Kepler dont on a déjà parlé ici.

Revenons sur ce sujet plus en détail.

A l'été 1609, Kepler a l'idée d'un alunissage en appendice à son travail de 1593 sur la perception des phénomènes célestes depuis la Lune (qui dérive d'une comparaison de la Lune avec la Terre, laquelle renvoie à Pythagore pour qui la Terre est une Lune, voyez Pierre Borel à ce sujet). Il en fait part à Galilée en disant qu'il a fait une géographie lunaire pour faire plaisir à Johannes Matthaeus Wackher von Wackhenfels, conseiller ecclésiastique de Rodolphe II.

Mais alors en 1611, des exemplaires de son Songe (un conte sur ce sujet) circulent jusqu'à Tübingen où des gens y voient une source de mise en cause de sa mère, Katharina qui vit à Weil-der-Stadt. Les archives auxquelles ont eu accès divers auteurs expliquent qu'une certaine Ursula Rheinhold a eu recours à ses services pour avorter avec une potion qui l'a rendue malade.  Le frère d'Ursula, barbier, qui a lu le Songe, s'est épanché auprès du juge de Léonberg. Katharina a commis l'erreur de lancer un procès en diffamation, et alors les langues se sont déliées contre elle. Le 7 août 1620, à 74 ans, elle est emprisonnée à Léonberg pour sorcellerie. Elle sera libérée un an plus tard après que Kepler eut trouvé des causes naturelles aux sortilèges qu'on lui reprochait.

Ce qui a alerté le barbier c'est, dans le Songe, que le héros, du nom de Duracotus l'islandais venu de Thule, raconte comment sa mère Fioxhilde morte récemment a convoqué des esprit pour faire un "voyage astral" jusqu'à la Lune...

Cet événement donna envie à Kepler de préciser sous forme de notes ce qu'il avait voulu expliquer dans le Songe : le code de ce roman renvoyait à la magie naturelle (au sens de Pomponace) et non à la magie noire - par exemple que le daimon dont il s'agit est un ensemble de savants dont il a consulté les ouvrages).

Dans ce Songe, Kepler raconte qu'en 1608, au moment des conflits entre Rodolphe II et l'empereur Matthias, les gens en Bohème recherchaient des précédents à leur histoire, et lui-même, Kepler était tombé sur l'histoire de Libussa (Libussae viraginis), la mère légendaire du peuple tchèque, célèbre pour sa magie. Un jour il s'endort et il lui semble lire dans son sommeil un livre acheté à la foire de Francfort. Mais alors le vent et la pluie dans son sommeil viennent détruire la fin du livre. En fait dans son rêve il y avait la magicienne Fioxhilde (un mot que dans ses notes il dira inspiré par le fait qu'il avait vu le mot "Flox" sur une vieille carte de la maison que le recteur de l'université Charles lui louait à Prague au niveau de l'Islande, île qu'il relie à plusieurs références livresques), et son fils Duracotus (celui qui s'exprime dans le livre) et ils se sont couverts la tête pour mieux entendre un daimon. A la croisée d'un chemin ils prononcent une formule magique pour que neuf chefs d'esprits les fassent voyager jusqu'à Levania, allégorie de la Lune, ce qui est l'occasion pour Kepler d'utiliser ses travaux de 1593 dans ses descriptions.

L'histoire de l'aventure de Duracotus et de sa mère sorcière aurait été, selon l'historienne de l'Art Catherine de Buzon (Cahiers de Fontenay 1975) entièrement réduite à des explications naturelles par les notes de bas de page écrites pour disculper sa mère à Leonberg.  Michel Ducos ici, en 1985, y voyait un pur divertissement. Il relève cependant que beaucoup de notes explicatives de Kepler renvoient au "Sur le visage qui apparaît dans le disque de la lune" de Plutarque. Or Plutarque, lui, ne plaisantait pas du tout quand il écrivait que l'une des taches de la Lune, appelée le "golfe d'Hécate" est le lieu "où les âmes subissent la peine et obtiennent vengeance de ce que, une fois devenues démons, elles ont fait ou souffert" (Plutarque, 944, c).

J'ajoute aussi que dans les années 1970 l'anthropologue Maurice Godelier qui enquêtait sur les Baruya, une des dernières tribus coupées des Blancs en Nouvelle Guinée fut interpellé par leur chamane qui lui dit : "la lune est est le séjour des morts - donne nous la formule magique qui a permis aux Blancs d y aller ".

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Soigner une âme par le corps

7 Juin 2024 , Rédigé par CC Publié dans #Médiums, #Spiritualités de l'amour, #Christianisme, #Pythagore-Isis, #Anthropologie du corps, #Massages

Voici une drôle d'histoire qui m'est arrivée en 2014. Il s'agit d'une expérience que j'ai faite avec une lectrice de ce blog le 9 novembre 2013 (son post est encore lisible ici, vous noterez que cela suit un mien billet sur un chien tué, moi dont le saint patron a une tête de chien), qui se faisait appeler "Idelphie". Je lui ai écrit le 8 mai 2014. A ce moment là je venais de découvrir l'existence du monde invisible au contact des médiums comme je l'ai raconté dans mon livre paru en 2017. Une sorte d'ébullition intérieure me poussait à rechercher les synchronicités , les signes. J'étais à l'époque si spirituellement perdu que j'allais prier une statue de Cybèle en pierre qui se trouvait non loin de chez moi --- La suite de ce billet n'est pas publique, vous ne pouvez l'obtenir qu'en en adressant la demande à l'auteur du blog par le formulaire de contact.

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L'ésotérisme "chrétien" du Hiéron du Val d'Or

21 Mai 2024 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire secrète, #Histoire des idées, #Christianisme, #Pythagore-Isis, #Alchimie, #Médiums

Je ne suis pas très fan de la saga de Rennes-le-Château, même si je m'y suis un peu intéressé en 2014 et par la suite. Mais il faut reconnaître que c'est une porte d'entrée commode pour comprendre certaines recherches des ésotéristes du XXe siècle, car l'énigme de l'abbé Saunière a été au croisement de plusieurs courants, plusieurs sociétés secrètes.

C'est ce que rappelait dans une conférence du 18 mai dernier à Paray-le-Monial Christian Doumergue (lequel hélas oublie de payer sa dette, si je ne me trompe, à Gino Sandri, mais bon...). Je n'en dirai que quelques mots. Dans cette conférence Doumergue rappelle le souvenir du baron Alexis de Sarachaga, catholique qui reçut sa mission mystique en voyant un enfant mort de froid à Saint Petersbourg (ce qui rappelle le Bouddha). Pris en charge par un Jésuite à Paray-le-Monial, fief de l'héritage de Marguerite Alacoque,il fonde une société (le Hiéron d'Or) qui voit dans le Christianisme le nom actuel de la religion primordiale comme le faisait déjà Saint Augustin quand il écrivait dans Rétractationes I,13,3:  " la réalité même qu’on appelle maintenant la religion chrétienne existait jadis […] ; dès les origines, elle n’a pas fait défaut au genre humain jusqu’à ce que vienne le Christ dans la chair ; et c’est alors que la vraie religion, qui existait déjà, a commencé à prendre le nom de chrétienne ". Voir aussi "Le catholicisme avant Jésus-Christ" du chanoine Jallabert.

Marthe de Noaillat décédée le 6 février 1926 poursuivit l’œuvre de ce groupe, qui réunissait, avec l'approbation du pape Léon XIII (qui voulait réintégrer le surnaturel dans la science), archéologues, géologues, et qui était censé former des professeurs agrégés.

Le Hieron du Val d'Or recherchait les restes de la civilisation antédiluvienne comme l'Atlantide ou la Lémurie censée être directement en connexion avec le savoir de Dieu. Précurseur des travaux actuels de Grimault, ils voient chez les Egyptiens et les Aztèques les dépositaires de ces héritages. Ils estiment que les pyramides ont été construites par Hénoch avant le déluge, et sont alignés avec d'autres monuments à travers le monde (ils ont même enquêté au Venezuela). Des historiens de l'art, des archéologues, des théologiens en faisaient partie et même l'ésotériste Henri Favre.

Ils voient dans Isis (min 36) qui est une sorte de messagère de Dieu qu'on trouve en Gaule pour instruire les druides. Jusqu'en 1514 il y aurait eu, selon le Hiéron, une statue d'Isis à St Germain des Près. Issoire, Issy-l'Evêque, Chartres, la grotte de Massabielle à Lourdes. Isis serait apparue à Eve chassée de l'Eden et lui aurait révélé une voie de restauration du paradis perdu. Les Celtes sont des initiés "aoriques" d'après leurs symboles et leur culte solaire. Le culte de l'eau chez les Chrétiens (les sources des églises romanes) prolonge ce savoir celte. Ils ont beaucoup travaillé sur les mégalithes celtiques.

Jeanne Lépine-Authelain, collaboratrice des époux Noaillat, secrétaire de l'Association du Hiéron, expliquera que Paray-le-Monial fut le lieu où l'incendie des Pyrénées fut éteint par l'invocation d'Isis.

Elle fut l'initiatrice de Paul Le Cour, fondateur le 24 juin 1926, du Groupe d'Etudes atlantéennes (devenu ensuite Atlantis). Le Cour, en quête de sens pour sa vie, fut aiguillé en 1923 vers Paray-Le-Monial par le libraire Pierre Dujols, frère de celui qui se disait descendant des Valois. La rencontre entre Lépine et Le Cour fut d'ailleurs providentielle (récit à 1h29). Ils vont s'écrire 2 à 3 lettres par mois. Une lettre de Le Cour en 1925 pensait que derrière le Hiéron se trouvaient les supérieurs inconnus porteurs de l'Ere du Verseau comme il y a les templiers derrière les Jésuites. Lépine-Authelain lui explique certains aspects de l'architecture secrète, le feu sacré vers lequel elle pointe. En 1923 elle le félicite de ne plus s'égarer vers la théosophie et lui promet d'être bientôt prêt pour l'initiation à la combinaison de l'Evangile et de la Tradition.

Le Cour eut une grande influence sur l'homme qui braqua les projecteurs sur Rennes-le-Chateau, Pierre Plantard. Parmi les apocryphes qu'il a déposés à la Bibliothèque nationale, il y a "Les dossiers secrets " Les dossiers secrets d'Henry Lobineau". On y trouve des extraits d'ouvrages de Paul Le Cour, avec en plus une référence au Hiéron du Val d'Or et à Paray-le-Monial.

Doumergue estime que Pierre Plantard et les gens qu'il inspira comme Gérard de Sède ou Henry Lincoln co-auteur de Holy Blood, Holy Grail, sont des artistes qui mêlent le vrai au faux parce qu'ils ne peuvent pas tout dire. Plantard dans diverses revues (notamment la revue Vaincre de la médium Geneviève Zaepffel) a confié croire que dans des endroits secrets se trouvent des savoirs transcendants antédiluviens. Il cherchait la tradition primordiale comme le Hiéron (et comme Guénon au même moment).

Gérard de Sède dans "L'Or de Rennes" écrit (min 1h09) "Les découvertes de quelque poids modifient toujours profondément l'univers mental de ceux qui les font. A plus forte raison l'auteur d'une trouvaille stupéfiante sera s'il en peut la révéler prisonnier d'une contradiction presque intolérable entre l'orgueil qui le pousse à publier et la crainte qui le contraint à se taire. Qu'on l'imagine obsédé sa vie durant par ce qu'il a vu qui était peut-être effrayant, mais dont il ne peut se délirer auprès de quiconque. Pour un tel homme la seule issue serait ainsi de parler en prenant soin qu'on ne puisse le comprendre ou de se faire comprendre en veillant à ne pas parler mais pour ce faire le langage commun n'est d'aucun secours. Il lui faudra donc forger un autre langage, créer une mer pour y jeter sans trop de risque le message qu'il tient en bouteille c'est-à-dire en futile ignorant réinventer l'hermétisme".

Tous les thèmes sur le trésor et sur la descendance de Jésus et Marie-Madeleine ne seraient que des devantures d'une recherche plus profonde sur la transmission de la tradition atlantéenne. Le conférencier dira même que Plantard a agi sur ordre en suivant des instructions d'initiés anonymes. Il remarque aussi que le travail sur Rennes-le-Chateau pourrait conduire à déplacer le regard vers Rennes-les-Bains, la commune voisine, dont le curé était passionné par les Celtes.

Doumergue remarque que l'abbé Saunière est lié au photographe de Toulouse Clovis Lassalle. Or celui-ci est mentionné dans des documents émanant de l’AMORC (Ancien et Mystique Ordre de la Rose Croix) américaine dont le fondateur Harvey Spencer Lewis a été initié dans le Sud de la France. Dans Voyage d'un pèlerin, ce dernier, ce dernier dit avoir été orienté à Toulouse par un photographe (dont il ne dit pas le nom) qui l'orienta vers un lieu secret d'initiation.

Gino Sandri, lui, précisait en 2018 qu'il était ancien membre de la société Atlantis de Jacques d'Arès, présenté comme un fils adoptif de Paul Le Cour. Je renvoie à sa vidéo pour mieux comprendre l'inspiration du Hiéron.

Ce mouvement millénariste a l'air très lié à la déesse mère (d'ailleurs Sarachaga aurait transmis à Le Cour via la succession de sa secrétaire une bague d'intronisation qui portait le portrait de Cybèle. A moins que la connexion à la Terre-mère soit purement allégorique.

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Vannina Schirinsky-Schikhmatoff

12 Mai 2024 , Rédigé par CC Publié dans #Médiums, #Histoire secrète, #Sainte-Baume, #Pythagore-Isis

On peut entendre sur You Tube un témoignage étonnant d'expériences de mort imminente de la médium Vannina Schirinsky-Schikhmatoff (née en 1973). Cette dame est fille d'un journaliste connu et d'une princesse Xénia Alexandrovna Schirinsky-Schikhmatoff qui avait elle-même des dons de médiumnité (qu'elle cachait) et issue d'une grand-mère qui avait fait  une expérience de mort imminente en Russie jadis (et qui voyait des lutins).

Réincarnationniste convaincue (et adepte des spiritualités qui vont avec cette croyance dont elle parle dans de très longues interviews dont l'écoute est facultative), cette médium a aussi fait parler d'elle en 2019 sur France 3 Corse comme chargée de mission à la conservation et la restauration à la bibliothèque patrimoniale Fesch d'Ajaccio où elle a retrouvé le Thesaurus hieroglyphicorum, premier recueil d'égyptologie - dans sa version corse de 1610 (il n'y en a que 7 au monde répertoriés, dont 2 en France), annotée avec des nombres mystérieux qui ont pu être utilisés pour la création de loges maçonniques par des fidèles de Napoléon au retour de la campagne d'Egypte. La version corse a appartenu à Colbert (avec la signature de son bibliothécaire). Schirinsky-Schikhmatoff a aussi retrouvé des courriers de la famille impériale de Bonaparte (perdus au milieu de 13 mètres linéaires de livres de notre époque que la nouvelle bibliothécaire voulait jeter le lendemain). On sait que les médiums sous l'inspiration de leurs "guides" font souvent des trouvailles inattendues, quand ils se mêlent d'archéologie par exemple. Elle y a aussi retrouvé dans une réserve réputée hantée (on avait fait venir un exorciste pour nettoyer cet endroit en 1986, les lumières continuaient à y clignoter et une ambiance fort angoissante y régnait, d'après son témoignage sur Corse Matin en 2020), un exemplaire de la première édition du Philosophiae naturalis principia mathematica de Newton, ouvrage qui vaut des millions de dollars. Ici la médium raconte (en minute 24) qu'un fantôme (et peut-être d'autres entités) l'a aidée à trouver les livres, et notamment le Thesaurus au milieu de 2 500 livres. Son séjour à la bibliothèque s'est mal fini. Elle a même été attaquée à coup de poings et de tournevis (cf ici 29' minute). C'est d'ailleurs juste avant de partir avec tout le monde contre elle qu'elle a vu le livre de Newton dans le listing informatique des ouvrages, il lui est apparu comme surligné en lumière puis elle a été guidée jusqu'aux Principia mathematica en escaladant les étagères. "En prenant mes fonctions, j'ai eu l'impression que la bibliothèque m'appelait au secours", dit-elle. Elle l'a sauvée en lui rapportant une dotation de millions d'euros. La bibliothèque avait rendu des tas de gens odieux ou fous.

La bibliothèque corse a été constituée par Lucien Bonaparte. Rappelez vous que la  Ste Baume aurait été sauvée en partie de l'extrémisme de la Terreur que par le zèle de Lucien Bonaparte (voir ses mémoires p. 49) et son adjoint, un moine défroqué surnommé "Epaminondas" (tout cela est très pythagoricien, comme la foi de Mme Schirinsky dans la réincarnation). Donc tout cela nous renvoie à l'aura de ce sanctuaire.

La dame a fait aussi des enluminures dans l'Allier (à Charroux).

Voilà donc un personnage étrange, visiblement bien intentionné quoi que l'on pense de ses croyances, qui a été utilisée par la Providence à des fins assez curieuses comme cette exhumation de livres rares. Les recherches sur le Thesaurus qu'elle a sorti des nimbes de la bibliothèque ajaccienne il y a cinq ans ne font l'objet d'aucune publicité sur le Net, le devenir du livre de Newton non plus. Dans son interview sur France 3 elle laisse échapper sur un mode énigmatique qu'elle a trouvé aussi d'autres choses, mais la journaliste ne la relance pas (il y a peut-être un accord pour que cela ne soit pas dit à l'antenne). Dommage...

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L'alchimie en Bohème

17 Mars 2024 , Rédigé par CC Publié dans #Pythagore-Isis, #Alchimie

En 2019, on pouvait lire dans la revue Talanta  (journal international de chimie analytique pure et appliquée), que Gleb Zilberstein et le chimiste Pier Giorgio Righetti, ont découvert des quantités très importantes de métaux – notamment d’or, d’argent, de mercure et de plomb – dans les pages d’un manuscrit de Kepler relatif à la lune, catalogué sous le nom d’« Hipparque » aux archives de l’Académie des sciences de Russie. L'astronome danois au nez d'or (qui avait perdu son nez dans un duel pour défendre Pythagore) Tycho Brahe, décédé en 1601, l’avait fait venir à la cour de Rodolphe II en 1600, un an avant sa mort et l’aurai instruit dans cet art dans son laboratoire sur l’île de Ven. Lorsque le corps de Tycho Brahe a été exhumé en 2010, l’analyse d’échantillons de poils a révélé qu’ils contenaient des quantités d’or « jusqu’à 100 fois supérieures à celles d’une personne normale aujourd’hui » . Son observatoire était situé dans la ville de Benátky nad Jizerou ( Venise sur l'Iser, ex Benatek) près de Prague avant qu'en 1600 Rodolphe II ne l'oblige à s'installer au belvédère du chateau de Prague.

Le fait ne devrait surprendre personne : Prague était la capitale européenne de l'alchimie. On dit qu'à l'époque elle comptait 200 alchimistes.

Au même moment le roi de Pologne Sigismond III (1566-1632) avait pour alchimiste Michał Sędziwój (Michael Sendivogius) qui était en lien avec Edward Kelley l'alchimiste de Rodolphe II. Il fit d'ailleurs des allers-retours Cracovie-Prague en partie pour des missions de renseignement.

En 1604 Sendivogius reçut de l'écossais Alexandre Sethon qu'il avait aidé à fuir les geôles de l'électeur de Saxe Christian II Wettin (comme Kelley avait été prisonnier de Rodolphe II) et obtint de lui une once de pierre philosophale qui lui permit de réaliser une belle transformation devant Sigismond III. "Je pourrais, écrit-il dans son traité "Cosmopolite" traduit en français, rapporter plusieurs auteurs renommés pour témoins incontestables de la certitude de cette Science. Mais les choses que vous voyons sensiblement et dont nous sommes convaincus par notre propre expérience, n'ont pas besoin d'autres preuves. Il n'y a pas longtemps, et j' en parle comme savant, que plusieurs personnes de grande et petite condition , ont vu cette Diane toute nue." Selon la revue Eon qui le republia en 1925 ce traité avait Alexandre Sethon comme auteur véritable. Voir le portrait de Séthon ici.

La même année 1604 paraissaient à Prague les douze traités de Seindivogius "sur la pierre du Saga" qui allaient nourrir le courant rosicrucien (en 1616 quelques écrits rosicrusiens étaient vendus à Prague pour 16 000 thalers, et en 1641 en Bohème deux rose-croix qui avaient fait connaître leurs richesses sont mis à la torture jusqu'à en mourir pour arracher leurs secrets).

Sendivogius condamnait l'utilisation de l'or qu'il jugeait être une matière morte comme tous les autres métaux pour la recherche de la pierre philosophale. Lui-même eut assez vite de nombreux ennuis comme Sethon avant lui.

Revenons à Kepler, protestant, fils naturel d'un jésuite et d'une herboriste qui fut poursuivie pour sorcellerie (il la défendit en justice). La journaliste cinéaste Henriette Chardak, fille et petite fille d'inventeurs, racontait en 2004 à Radio Ici et Maintenant comment elle en est venue à travailler sur lui. Un 1er avril, elle était chez un ami musicien pour une musique de film et elle regarda la pleine lune, et découvrit ses lacunes sur les astres. Elle a travaillé sur lui à partir de 1983. Pour elle Kepler est à la fois un génie, un clown, un prophète et un homme bon, bon mari, bon père (ce qui est rare chez les savants).

"Tout est incertain ici, Tycho est un homme avec lequel on ne peut pas vivre sans être sans cesse exposé à de cruelles insultes. La solde est brillante, mais les caisses sont vides, et on ne paie pas. " écrivait-il en 1600 à Prague.  Joshua et Ann-Lee Gilder ont accusé Kepler d'avoir empoisonné accidentellement ou volontairement Tycho avec du mercure. Owen Gingrich, professeur émérite d'astronomie à Harvard l'a démenti. Peter Andersen de la fac de Strasbourg pense que le criminel fut Eric Brahe, cousin de Tycho et diplomate suédois au service du Danemark (qui lui disait en public "tu es bâtard comme ton dieu et maître Pythagore"). pour se venger de la relation de Tycho avec sa mère. On dit que la mort de Tycho Brahe inspira l'Hamlet de Shakespeare.

H. Chardak pense que Brahe se méfiait de Kepler parce qu'il avait été toute sa vie spolié (c'est pourquoi sur son lit de mort il suppliait Kepler de ne faire en sorte qu'il n'ait pas vécu en vain).

Tycho Brache faisait des horoscopes pour se détendre. Kepler aussi sans trop y croire. A la veille de son mariage Kepler a fait son horoscope en y projetant sa personnalité. Astrologie et alchimie vont généralement de pair.

Pour ma part je suis très réservé à l'égard de l'un et l'autre art;

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Deux visages

27 Janvier 2024 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire secrète, #Pythagore-Isis, #Philosophie

J'ai déjà fait plusieurs fois sur ce blog l'éloge d'Ariel Cohen Alloro. Je pense qu'il est un peu fou et que délibérément son flot verbal qui mêle anglais de débutant et hébreu est destiné à égarer les gens, en outre il manie un peu trop le paradoxe et la réhabilitation du Mal, mais il y a au moins 10 % de précieuses vérités à retirer de son discours (par exemple, comme je l'ai déjà souligné, à propos de Nathanael, du serpent et des douze apôtres).

J'aime bien aussi ses récentes réflexions (vidéo ci-dessous) sur le double visage de tout un chacun, qui renvoie en hébreu au pluriel panim. Il en tire une conclusion intéressante sur le verset Matthieu 5.39 "Mais moi, je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre" (même s'il faut se méfier des interprétations ésotériques de l'évangile, qui la tirent trop vers le savoir - et donc l'orgueil - au détriment de l'éthique et de l'humilité). Cela m'a rappelé cette représentation romaine de Sappho (une héroïne pythagoricienne) qui combine deux visages, comme la Joconde de Léonard de Vinci.

 

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La géométrie spectrale selon Nalini Anantharaman

13 Août 2023 , Rédigé par CC Publié dans #Philosophie, #Pythagore-Isis

En 2008, je me suis aventuré sur le terrain des mathématiques en parcourant pour Parutions.com un livre de Penrose. J'y étais revenu six ans plus tard à l'occasion de mes incursions dans le pythagorisme.

Saisissons l'occasion de la leçon inaugurale de Nalini Anantharaman (née en 1976, docteure depuis 2000) pour son accession à la chaire de Géométrie spectrale (une théorie qui s'intéresse au lien entre la géométrie d'un objet et ses fréquences de vibration) au Collège de France en octobre 2022 pour remettre un orteil dans ce sujet.

Le premier à avoir employé le mot spectre en sciences est Newton, dans une lettre à la Royal Society de 1672. il raconte qu'ayant fait passer la lumière du soleil à travers deux prismes il a vu le spectre coloré et s'est étonné de sa forme allongée. Il en a conclu que la lumière blanche mélangeait diverses couleurs qui peuvent se séparer parce que diffractées. Au XIXe siècle on découvert que le spectre des couleurs présente de fines discontinuités (raies de Fraunhofer), et si on chauffe certains éléments chimiques la lumière émise a spectre ne contenant que de fines raies de couleur (cf les raies jaunes du sodium- cf à droite). Chaque élément chimique a son propre spectre.

Cela a incité à explorer l'infiniment petit sans outil d'observation. Le caractère discontinu (discret) de ces spectres surprend, comment nait-il dans un monde continu ? En mathématiques un ensemble discret peut être indexé par des nombres entiers (positifs ou nuls sans décimales ni fraction). Un ensemble continu n'est pas dénombrable car il y en a autant que de nombres réels (nombres qui peuvent être représentés par une partie entière et une liste finie ou infinie de décimales). Planck, Einstein et Bohr ont essayé d'incorporer le discret dans des modèles mathématiques en postulant que certaines quantités physiques doivent être des nombres entiers. Planck dans un article de 1900 a fait apparaître que ce côté discret, granulaire doit être dans la nature des choses. La mécanique des quantas (grains d'énergie indivisibles, comme le photon par exemple) est née. Bohr introduit le quantum dans la description de l'atome : si l'électron autour de l'atome d'hydrogène est imaginé comme une planète autour du noyau, le moment cinétique doit être un nombre entier. C'est la règle de quantification de Bohr, et effectivement les énergies correspondant aux différentes trajectoires possibles rendent exactement compte du spectre discret de l'hydrogène.

Ainsi il fut rendu compte du spectre du premier atome de la table des éléments. Mais il y en a plus de cent et il faut trouver la règle de quantification pour chacun d'entre eux. Max Born à partir des travaux de Poincaré en mécanique céleste travaille sur le mouvement des 3 corps de l'atome d'hélium (le second corps de la table). Mais en 1923 il avoue son échec dans un article. Mais deux ans plus tard son élève à Göttingen Heisenberg transforme son échec en succès et même en révolution.

Dans un article de 1925, Heisenberg trouve des règles de calcul algébriques reposant sur des principes a priori qui permettent de calculer des spectres, c'est-à-dire les fréquences qui sont la signature de chaque élément. Il utilise sans le savoir l' "algèbre de matrices", connue en mathématiques depuis les années 1850. Le spectre des physiciens c'est la valeur propre en mathématiques. Les couleurs sont des fréquences, 'est-à-dire des nombres exprimés en hertz. On peut les calculer en cherchant les valeurs propres de matrices, ou leurs analogues en dimension infinie, appelés "opérateurs".

John von Neumann (1903-1957) qui a eu de multiples apports à la mécanique quantique, à l'informatique, au projet Manhattan, a rédigé un traité de théorie spectrale mathématique orienté vers la mécanique quantique. Celle-ci devient si mathématisée qu'il devient difficile d'en parler avec un vocabulaire ordinaire. La théorie spectrale explique comment le discret peut naître du continu. Même pour un modèle physique continu les valeurs propres peuvent former un ensemble discret (cf l'oscillateur harmonique - en mécanique quantique son énergie est remplacée par un opérateur dont il faut calculer les valeurs propres, qui sont des nombres entiers, donc le spectre comprend un ensemble discret ; cela ne peut être calculé pour tous les phénomènes ; à noter aussi que la description en une dimension dans la mécanique quantique on doit faire des calculs dans un espace vectoriel de dimension infinie).

L'opérateur de Laplace delta décrit le potentiel gravitationnel. Il calcule la différence entre la valeur d'une fonction en un point et la moyenne de cette fonction sur les points voisins. Il estime la valeur de la grandeur étudiée à vouloir s'équilibrer entre points voisins. Le laplacien est réapparu en 1807 dans les travaux de Joseph Fourier sur l'équation de la chaleur. Il exprime que la chaleur se diffuse dans toutes les directions du chaud vers le froid, tendant à compenser le déséquilibre entre un point et ses voisins, ce qui uniformise la température. Le laplacien est aussi utilisée dans l'équation des ondes (qui généralise l'équation de d'Alembert sur les cordes) ou dans l'équation (non linéaire, l'addition des causes n'aboutit pas à une addition des effets - principe de superposition) de Navier-Stokes sur la viscosité (la non-linéarité explique pourquoi cette théorie appliquée au climat ne permet pas des prédictions fiables), et encore dans le mouvement brownien.

En 1925, Schrödinger après De Broglie introduit une version ondulatoire de la mécanique. La lumière était d'abord considérée comme une onde, puis divisée en petits grains d'énergie (les photons). Pour Schrödinger les électrons sont aussi des ondes, et il veut introduire une équation qui remplacera celle de Newton pour décrire leur évolution. Les précédentes équations étaient déduites de phénomènes physiques appliqués au niveau microscopique, Schrödinger ne raisonne que sur l'équation. Il se demande ce qu'il en attend, comment la construire.

L'équation se présente ainsi :

Il a placé dedans le laplacien (pour qu'elle ressemble à une équation d'onde) ainsi que la constante de Planck (qui représente le grain élémentaire d'énergie - quand elle tend vers 0 on doit retrouver la mécanique newtonienne / approximation semi-classique).

Les prédictions de Eisenberg et de Schrödinger qui sont concurrentes se rejoignent tout en s'éloignant de la physique classique : un atome n'est plus une collection de petites planètes. Pour Schrödinger les électrons sont des ondes, et pour l'école de Copenhague, ils sont mathématiquement représentés par des opérateurs.

Nous n'avons pas d'images visuelles pour la mécanique quantique. La géométrie spectrale permet de satisfaire notre besoin d'intuition.

Nalini Anantharaman s'est beaucoup intéressée au chaos. Einstein en 1917 a étendu le principe de quantification de Bohr à des situations plus générales non pas d'atomes mais de systèmes physiques abstraits. La règle qu'il a énoncée n'a de sens que pour des systèmes très spéciaux dits "complètement intégrables". Un système dynamique est un système dont on étudie l'évolution dans le temps. Pour ceux qui sont "complètement intégrables", l'évolution est calculable et prévisible sur de grandes échelles de temps. Il y a beaucoup de quantité conservée ce qui concerne chaque trajectoire à rester dans une toute petite partie de l'espace et à suivre un mouvement quasi-périodique : par exemple la gravitation d'un corps autour d'un autre (mouvement elliptique périodique képlérien, du moins jusqu'à trois corps). Au delà de trois corps pour la gravitation ça ne marche pas (d'où l'échec des travaux sur l'hélium). en 1917 Einstein pose la question de la prédiction des systèmes pas complètement intégrables, notamment les systèmes ergodiques (dans lesquels la conservation de l'énergie est la seule contrainte qui pèse sur les trajectoires).

La particule visite de façon équitable tout l'espace laissé à sa disposition. La description du spectre quantique associé aux systèmes ergodiques est une des principales questions du domaine appelé "chaos quantique".

En 1955, le physicien Eugene Wigner a proposé l'idée que le spectre du noyau des très grands atomes (pour lesquels le formalisme de Schrödinger ne permet pas de calcul) devrait ressembler à une matrice aléatoire de grande taille. Autrement dit à ce niveau de complexité le physicien renonce à chercher des lois fondamentales, et se contente de modèles pratiques pour le calcul, qui peuvent être aléatoires. On ne va pas calculer le spectre de l'opérateur de Schrödinger, mais seulement celui d'une très grande matrice, avec des coefficients mis au hasard (ce qui marche assez bien statistiquement).

Wigner a confessé son amour pour les mathématiques appliqués aux sciences. L'application de la méthode de Wigner avec des ordinateurs dans les années 1980 se répand, par exemple pour le calcul du spectre de l'opérateur de Laplace dans des domaines du plan euclidien. On fait apparaître des comportements universels où des histogrammes de valeurs propres épousent la courbe théorique de Wigner. Mais il y a aussi des types de billards où cela fonctionne moins bien, surtout les billards non ergodiques.

Beaucoup de physiciens ne trouvent plus utiles d'en démontrer les raisons mathématiques. Mais Nalini Anantharaman voudrait trouver un modèle mathématique qui permette de relier la trajectoire d'un billard ergodique, le spectre du laplacien, et le spectre des matrices aléatoires.

Un système dynamique est chaotique si une variation infinitésimale de la condition initiale est amplifiée de façon rapidement exponentielle.Si on applique cela au système dynamique du billard, le caractère chaotique vient de la courbure du bord. Le billard est dispersif si le bord est courbé vers l'extérieur. Chaque rebond amplifie immédiatement une petite variation de la condition initiale, ce qui conduit à un comportement chaotique. Pour un billard convexe (parois tournées vers l'intérieur), les situations sont plus diverses. Quand c'est une ellipse, il y a des familles de trajectoires qui épousent une courbe intérieure, c'est un système intégrable.

Alexander Schnirelman a été un des premiers à montrer qu'il y a un lien direct entre l'ergodicité du billard et la délocalisation (propension à occuper tout l'espace) du mode propre du laplacien (théorème d'ergodicité quantique). Si le billard est ergodique, alors l'immense majorité des modes propres occupe uniformément l'espace quand on considère les petites longueurs d'ondes.

Pour relier de façon plus forte le caractère chaotique du billard à un comportement désordonné des ondes, l'intuition géométrique classique est d'un faible secours. La mécanique quantique ne s'y prête pas. Chez Feynman, le mouvement d'une particule n'est pas une trajectoire mais une superposition de tous les chemins possibles. Chaque chemin est affecté d'un coefficient de probabilité d'emprunter ce chemin.

Dans la limite semi-classique, les chemins qui satisfont à l'équation de Newton l'emportent sur tous es autres.

N. Anantharaman a été fascinée par un cours de G. Ben Arous concernant la représentation par intégrales de chemins des solutions de l'équation de la chaleur. Elle a essayé de mettre en œuvre un calcul du même type pour l'équation de Schrödinger sur des échelles de temps arbitrairement grandes. Elle a démontré que pour un système chaotique toutes les trajectoires classiques apparaissent avec des coefficients comparables, même sur des temps très longs. Les ondes doivent donc emprunter beaucoup" itinéraires très différents. Elle espérant même démontrer ainsi la  Conjecture d’Unique Ergodicité Quantique qui prédit une délocalisation parfaite des modes propres sur les variétés de courbures négatives. Elle est parvenue à quantifier le caractère désordonné de la propagation des ondes grâce à une quantité appelée l'entropie.

La théorie spectrale ayant pour but de distinguer le spectre discret du spectre continu, et parmi les continus, ceux qui sont absolument continus de ceux qui sont singuliers. Mais dire si un opérateur donné a un spectre continu ou discret reste un problème très difficile. Cf le modèle d'Anderson : qui modélise la transition d'un comportement conducteur vers un comportement isolant dans un métal. Il a été possible de modéliser plus finement les transitions d'un comportement à l'autre.

Si l'on prend un pavage hyperbolique, on n'en connaît pas la nature du spectre, bien qu'il possède une forme de périodicité pour un groupe de transformation totalement explicite (espace non euclidien). Anantharaman , avec Le Masson et Sabri ont mis en évidence la délocalisation des ondes sur certaines familles de graphes finie mais de grande taille. Ils ont appelé cela l'ergodicité quantique pour les graphes en le rattachant au théorème de Schnirelmann, mais d'autres préfèrent le rattacher à la thermalisation des fonctions propres, il faut comprendre la lien entre les deux notions.

Il s'agit uniquement de démontrer des théorèmes. La géométrie spectrale est apparue comme branche des mathématiques à partir du théorème de l'indice (1963) qui pose une égalité entre un invariant topologique et le bas du spectre d'un opérateur elliptique. L'invariant topologique le plus classique est la caractéristique de l'aire Poincaré d'une surface.

Soit une sphère plongée dans l'espace euclidien de dimension 3, avec un axe vertical disons nord-sud.

Si on trace des parallèles (sept courbes de points de même latitude). Tous les parallèles sont des cercles sauf deux parallèles particuliers qui sont des points : le pôle nord et le pôle sud.

Soit une sphère déformée (mais avec la même topologie).

La plupart des tranches sont encore des cercles (certaines deux cercles) avec 4 parallèles sur 9 qui ne sont pas des cercles. En comptant les points critiques en comptant +1 pour un sommet ou pour un puits et - 1 dans le cas d'un col (sur la figure en 8). la somme pondérée donne 2, comme dans l'exemple précédent. Cette somme ne dépend pas de la géométrie mais uniquement de la topologie.

Ce nombre 2 pour la sphère est aussi la caractéristique de l'aire Poincaré définie en découpant la sphère en polygones. Nombre de sommets - nombre d’arêtes + nombre de faces donne toujours 2. En chaque point de la surface je peux calculer la courbure. La courbure X l'aire divisée par 2pi donne toujours 2. Et pour la courbe déformée la moyenne de la courbure fois l'aire divisée par 2pi donne toujours 2 (formule de Gauss Bonnet). La quantité continue de la courbure et de l'aire pour des raisons topologiques ne peut prendre que des valeurs entières. Et cela vaut pour n'importe quelle surface.

Reprenons l'équation de Laplace Delta-phi=0 (bas du spectre). On peut compter la dimension de l'espace des solutions, c'est un nombre entier (pour une variété compacte c'est le nombre de morceaux de la surface). Il vaut 1 pour n'importe quelle surface en un seul morceau.  On peut le chercher dans des formes différentielles de degré 1, 2, 3 etc. A chaque degré j'obtiens un entier qui donne la dimension de l'espace des solutions. En faisant l'addition alternée (+ et -), Le total est la caractéristique de l'aire (2 pour la sphère), ce qui veut dire que la topologie impose une contrainte sur le bas du spectre du laplacien. Le théorème de l'indice (1963) montre que cette relation existe pour tout opérateur pseudo-différentiel elleptique (l'opérateur de Dirac en mécanique quantique relativiste, un opérateur en géométrie complexe etc).

Le livre de Berger-Gauduchon-Mazet de 1971 "Le Spectre d'une variété riemannienne" a marqué à Paris VII une école dont la descendance est impressionnante. Le théorème de l'indice est d'ailleurs essentiel en physique dans la matière topologique (manifestation concrète des contraintes que la topologie exerce sur le spectre). Il y en a eu des illustrations récentes comme sous la plume de Dang-Rivière.

Un des thèmes les plus importants de la géométrie spectrale c'est la question des problèmes inverses : en mesurant le spectre d'un objet ou la manière dont ses ondes se propagent, peut-on deviner la géométrie de l'objet ? comment le reconstruire à partir de mesures spectrales ? En 1992, Gordon, Webb et Wolpert ont montré que deux polygones différents avaient le même spectre. Des familles entières d'objets présentent aussi cette caractéristique. Tous les contrexemples au lien spectre-forme sont des polygones non convexes. Par contre si un objet a le même spectre qu'un disque c'est nécessairement un disque identique. pour une ellipse on ne sait pas sauf si elle est presque circulaire.

Connexe à cette problématique est aussi celle du contrôle des ondes. Peut-on les téléguider d'un état initial vers un état final donné en plaçant des termes sources comme second membres de l'équation de d'Alembert ou de Schrödinger ? La question est : dans quelles zones vaut-il mieux placer ces sources. Soit des ondes se propageant dans deux dimensions dans un disque ; si je me place à l'intérieur du disque, je ne peux pas tout contrôler, certaines ondes m'échappent. Certaines ondes (whispering-gallery modes) se propagent en restant confinées près du bord (cf dans le dôme de la cathédrale). Pour tout contrôler il faut être près du bord et sur une zone qui mesure près de la moitié de la circonférence. Si l'onde se propage selon l'équation de Schrödinger, les ondes sont mieux dispersées que selon l'équation de d'Alembert et donc on peut les contrôler à partir d'une région du bord même très petite, ce qu'N. Anantharaman a démontré il y a quelques années avec Matthieu Léautaud et Fabricio Macia.

Aujourd'hui, dans son échange avec les chercheurs qui travaillent sur les graphes aléatoires, N. Anantharaman cherche à démontrer des théorèmes valables pour 99 % des graphes, avec une ignorance sur les autres. Relâcher l'exigence ainsi permet d'aller plus loin, et notamment de faire de même pour des modèles géométriques plus généraux (des surfaces aléatoires). Cela nécessite de développer de nouvelles techniques de calculs d'intégrales en partant des formules de Maryam Mizakhani (1977-2017), pour évaluer la probabilité que la surface contienne tel ou tel motif géométrique.

Voilà, j'ai voulu tirer profit de cette leçon inaugurale du Collège de France de 2022 pour faire un petit détour par la recherche mathématique actuelle et ses applications à la physique quantique. J'ai essayé de coller au plus près au vocabulaire de Nalini Anantharaman, car, évidemment, n'ayant pas fait de maths au delà du bac, je n'ai pas du tout les moyens de comprendre la plupart des points qu'elle évoque. Mais ce n'est pas parce qu'on ne comprend pas un domaine qu'il faut complètement le négliger. Pour pouvoir développer un point de vue philosophique sur le monde, même très sommaire comme le mien, il faut avoir ne serait-ce qu'une vague idée de ce que les scientifiques en défrichent. Cela fut évident pour les penseurs jusqu'au milieu du XIXe siècle et je crois que cela devrait le redevenir, même sur un mode très approximatif. J'ajouterai que cela me paraît d'autant plus nécessaire qu'il existe un usage très abondant de la notion d' "énergie", de "connaissance quantique" etc. dans le domaine de la spiritualité auquel je m'intéresse (voyez par exemple les travaux du Père Brune auxquels je me référais en 2019). Fournir un petit effort pour entrevoir ce que cela peut signifier chez les chercheurs universitaires  professionnels ne me paraît pas complètement superflu.

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Le pythagorisme astral de Scipion l'Africain

13 Août 2023 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire secrète, #Pythagore-Isis

 

Il y a 14 ans sur ce blog j'avais dit un mot de l'excellent livre de Schiavone sur l'histoire du droit romain.

Je retombe aujourd'hui dans cet ouvrage sur les pages où il explique comment dans son organisation du corpus juridique, Quintus Mucius Scaevola (140 av JC-82 av JC) essaya de rénover l'héritage sans pour autant accepter une refonte suivant les canons de la philosophie grecque comme la proposait Cicéron.

A partir d'une citation de Mucius par St Augustin, Schiavone note notamment que ce jurisconsulte (qui fut pontifex maximus en 89) refusa la théorie stoïcienne selon laquelle les héros (Hercule, Castor et Pollux) ou même des dieux comme Esculape étaient des humains divinisés car cette idée pouvait donner de mauvaises idées aux généraux et aventuriers prêts à prendre le pouvoir dans la République finissante (qui pourraient se légitimer en se présentant comme des dieux potentiels).

J'ai pensé en lisant cela aux vers de Lucain qui racontent l'apothéose de Pompée, mais Schiavone, lui, cite Scipion l'Africain, Marius et César (p. 251)

"Le risque n'était pas imaginaire, car la professionnalisation et la prolétarisation de l'armée, écrit Schiavone, rendaient ces fantasme réels. Du reste, une partie de l'aristocratie n'était nullement épargnée par ces influences, qui se répandront de façon plus ou moins souterraine à partir du 'mysticisme' pythagoricien de l'Africain jusqu'à toucher jusqu'à César".

En 2014, à propos de Massalia, j'ai rappelé en quoi pythagorisme allait plutôt de pair avec républicanisme. Mais ce républicanisme n'est pas antithétique du recours à l'homme providentiel si celui-ci est un philosophe.

Schiavone ne développe pas la question du "mysticisme pythagoricien" du vainqueur de Carthage Scipion l'Africain (236 av JC-183 av JC) et ne renvoie à aucune référence. Je vais donc ici la creuser en suivant une autre piste, celle d'un article du philologue Jean Préaux (1920-1978) intitulé "Caeli civis" extrait de : L'Italie préromaine et la Rome républicaine. I. Mélanges offerts à Jacques Heurgon de 1976  .

Préaux montrait comment le récit classique (par trois auteurs romains) du retrait de Scipion dans le temple de Jupiter à minuit pour dialoguer avec la divinité était construite sur la base d'un thème classique : l'image de Pythagore scrutant la voûte céleste sur les épaules du titan Atlas (dans Ovide, Métamorphoses15). Atlas, comme Prométhée, Héraclès et Iopas, connaissent les lois du monde, en tant qu'astronomes et astrologues (concernant Atlas, voir aussi Martianus Capella ici).

L'astronomie, mesure du ciel explorée par les titans, comme la géométrie est mesure de la terre, "prépare, nourrit et organise grâce aux connaissances des rythmes saisonniers, bref par la science du calendrier, garante de la supériorité 'divine' du chef de guerre". Scipion en avait percé les secrets quand il a fait  retraite au temple de Jupiter. Dans son Cato Maior (49), Cicéron a montré que dans la famille de Marius il y avait cette idée que le chef de guerre était initié à l'astronomie, et Paul-Emile vainqueur de Pydna avait un astronome auprès de lui qui prédit l'éclipse de lune du 21 au 22 juin 168 av J.-C.

La familiarité de Scipion avec l'astrologie-astronomie se retrouve dans cette allusion de Cicéron "nous avons vu un Gallus de la famille de votre père, Scipion, à la poursuite de la libération du ciel et de la terre." Elle relie Scipion à S. Sulpicius Gallus qui après l'assassinat d'Archimède en 212 avec la prise de Syracuse permit à Rome de déchiffrer son planétaire.

L'épitaphe d'Ennius à Scipion renvoie à une apothéose par le succès des armes, mais qui a été précédée par lui de l'étude des astres :  "Si je fais ce qu'il faut, c'est à n'importe qui de monter au ciel. la plus grande porte de mon soleil est ouverte sur le ciel, . . c'est vrai, Africain; car la même porte était ouverte à Hercule."

D'ailleurs quand Scipion en 204 remporte une victoire sur les Carthaginois en Sicile, il préfère jouer les philosophes au gymnase de Syracuse (selon Tite Live). Le savoir des muses dans Horace recommande une puissance raisonnée et non pas privée de réflexion. C'est le propre de celle d'Alexandre et de Scipion.

Tite-Live précise : P. Cornelius Scipio Africanus, avant de partir, a placé un portique dans le Capitole face à la route par laquelle il monte au Capitole, avec sept statues dorées et deux chevaux et deux lèvres de marbre devant le portique.

Sept, comme les sept planètes alors connues, les deux chevaux représentent les Dioscures, maîtres des hémisphères ou le cheval à dompter dans le Phèdre.

Préaux conclut son texte en se disant persuadé que la songe de Scipion a une base historique : "maints traits de la biographie de Scipion l'Africain relèvent de l'histoire plus que de la légende, même lorsque Cicéron fera de l'homme et du citoyen éclairés le héros d'une révélation sur l'au-delà". D'après lui, il était un initié d'une religion astrale.

Il faut ajouter que Tite-Live écrit aussi que "chaque fois ou presque qu’il parlait à la foule, ou bien il faisait
état d’apparitions nocturnes ou bien il invoquait des avertissements divins". Scipion en Espagne fait écarter les eaux pour faire passer ses légions et l'on ne sait si cela relève du calcul ou de la magie divine car Scipion l'attribue aux dieux : "Attribuant ce qui était le résultat d’une enquête soigneuse et du calcul à un prodige et aux dieux, qui écartaient la mer pour livrer passage aux Romains, supprimaient les lagunes et ouvraient des routes jamais encore foulées par un pied humain, Scipion leur ordonnait de suivre Neptune qui leur montrait le chemin et par le milieu de la lagune, de parvenir jusqu’au rempart". N'oublions pas comme on l'a vu avec Pytheas de Massalia que le travail sur les marées est typiquement pythagoricien, et le pythagorisme lie calcul et mysticisme indissociablement. Sur les vertus romaines (mais aussi pythagoriciennes) qui accompagnent la religiosité de Scipion voyez aussi le mémoire ici.

La remarque de Schiavone sur le mysticisme pythagoricien de Scipion apparaît donc fondée, quoiqu'il faille tout de suite ajouter qu'il s'agit là d'un mysticisme "pratique" nourri notamment d'études astrologiques.

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