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Un cercle de malédiction autour d'Antiochos IV Epiphane ?

7 Mars 2018 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire secrète, #Christianisme

Peter Green, historien universitaire et athée (donc myope) écrivait ceci dans "D'Alexandre à Actium" (eds Robert Laffont, coll. Bouquins 1997 p. 474) à propos d'une ambassade romaine au roi hellénistique Antiochos IV Epiphane en 168 av JC (un an après que, dans le cadre de ses guerres contre Ptolémée VI d'Egypte, il eut pris Jérusalem à la demande des fils de Tobie et y ait imposé des cultes païens - Flavius Josèphe - Guerre des Juifs, I, 32-35 et livre des Macchabées): "Un ordre officiel (senatus consultum) lui fut adressé, lui enjoignant d'évacuer non seulement l'Egypte, mais également Chypre où ses troupes se livraient à une débauche de pillages et de destructions. L'envoyé romain, Popillius Laenas (ou Popilius Laenas), rencontra le roi dans le faubourg alexandrin d'Eleusis (juillet 168) et attendit en silence qu'Antiochos eût fini de lire le message du Sénat. Lorsque Antiochos réclama un délai pour examiner cette requête, Popillius prit son bâton, et traça dans la poussière un cercle autour du roi ; puis, d'un ton sans réplique, il ordonna à celui-ci de lui répondre par oui ou par non avant de sortir du cercle". C'est ce qu'on appela la "journée d'Eleusis". Antiochos accepta puis eu une petite revanche symbolique en organisant les jeux de Daphné pour laver l'humiliation.

La source se trouve dans Polybe 29.27.1-10, Tite-Live 45, 12.3-8, Appien Les Guerres Syriennes 66, Justin 34.3.1-4.

Polybe dans ses Histoires à ce sujet a le même ton" positiviste" que Peter Green :

When Antiochus had advanced to attack Ptolemy in order to possess himself of Pelusium, he was met by the Roman commander Gaius Popilius Laenas. Upon the king greeting him from some distance, and holding out his right hand to him, Popilius answered by holding out the tablets which contained the decree of the Senate, and bade Antiochus read that first: not thinking it right, I suppose, to give the usual sign of friendship until he knew the mind of the recipient, whether he were to be regarded as a friend or foe. On the king, after reading the despatch, saying that he desired to consult with his friends on the situation, Popilius did a thing which was looked upon as exceedingly overbearing and insolent. Happening to have a vine stick in his hand, he drew a circle round Antiochus with it, and ordered him to give his answer to the letter before he stepped out of that circumference. The king was taken aback by this haughty proceeding. After a brief interval of embarrassed silence, he replied that he would do whatever the Romans demanded. Then Popilius and his colleagues shook him by the hand, and one and all greeted him with warmth. The contents of the despatch was an order to put an end to the war with Ptolemy at once. Accordingly a stated number of days was allowed him, within which he withdrew his army into Syria, in high dudgeon indeed, and groaning in spirit, but yielding to the necessities of the time.

Notez que Polybe précise que le bâton est un cep de vigne (vitis), ce bâton de 80 cm qui servait aux centurions pour frapper les légionnaires. N'oublions pas que la vigne dans la Bible est le symbole d'Israël, ce qui n'est pas sans intérêt par rapport à ce que nous verrons un peu plus loin.

Tite-Live dans "L'histoire de Rome" livre 45 présente un récit semblable :

"After crossing the river at Eleusis, about four miles from Alexandria, he (Antiochos) was met by the Roman commissioners, to whom he gave a friendly greeting and held out his hand to Popilius. Popilius, however, placed in his hand the tablets on which was written the decree of the senate and told him first of all to read that. After reading it through he said he would call his friends into council and consider what he ought to do. Popilius, stern and imperious as ever, drew a circle round the king with the stick he was carrying and said, "Before you step out of that circle give me a reply to lay before the senate." For a few moments he hesitated, astounded at such a peremptory order, and at last replied, "I will do what the senate thinks right." Not till then did Popilius extend his hand to the king as to a friend and ally."

Sous la plume d'Appien (Guerres syriennes chap 11) cela donne un récit plus empreint de mysticisme parce qu'il relie le geste de Popilius au sort funeste d'Antiochos juste après, ainsi qu'à un événement curieux autour d'un temple de Vénus :

" While he was encamped near Alexandria, Popilius came to him as Roman ambassador, bringing an order in writing that he should not attack the Ptolemies. When he had read it he replied that he would think about it. Popilius drew a circle around him with a stick and said, "Think about it here." He was terrified and withdrew from the country, and robbed the temple of Venus Elymais; then died of a wasting disease, leaving a son nine years of age, the Antiochus Eupator already mentioned. "

Même ambiance chez l'historien Justin dans le livre 34 de son Abrégé  des Histoires Philippiques de Trogue Pompée.qui fait lui aussi le lien entre le cercle et la mort rapide du roi à son retour en Syrie, et qui précise au passage que tous ses courtisans étaient dans le cercle :

"On députa donc Popilius à la cour d’Antiochus, pour ordonner au roi de respecter l'Égypte, ou d'en partir, s'il s'y trouvait déjà. Popilius le trouva en Égypte, et le prince, qui, étant en otage à Rome, avait formé avec lui d'étroites liaisons, s'approchant pour l'embrasser, l'envoyé romain fait taire ses affections privées devant les ordres de sa patrie, et lui présente le décret du sénat. Le voyant hésiter et renvoyer à son conseil la décision de cette affaire, d'une baguette qu'il tenait à la main, il trace autour du roi un cercle assez vaste pour contenir aussi ses courtisans, lui défendant d'en sortir sans avoir répondu au sénat et déclaré s'il veut être en paix ou en guerre avec, Rome. Effrayé de cette fermeté, Antiochus promit d'obéir. De retour dans ses états, il mourut bientôt, laissant un fils en bas âge."

Avant de développer sur le cercle tracé par Popilius, un mot du temple de Vénus d'Élymaïs. Les premières références à un "royaume" d'Élymaïs sont par Néarque (ou Nearchus), l'Amiral d'Alexandre le Grand (336-323), dans un passage conservé par Strabon (Géographe Grec, v.63 av.J.C-v.23 ap.J.C - Livre 2.13.6). Il situe le "royaume" vers le Nord de la Susiane. Il rapporte que le "Elymaei".

Flavius Josèphe dit qu' Élymaïs est le nom d'une ville. Certains historiens en font la capitale du pays d'Elam d'autres  la situent en Perse (ce qui est aussi le témoignage que rend le livre I des Macchabées, lequel signale aussi que finalement Antiochos ne put pas piller la ville). L'histoire des Juifs et des Peuples de Mr Prideaux, doyen de Norwich dans sa traduction française de  1764 p. 81, précise que la ville passait pour avoir de grandes richesses en or et en argent, et surtout que dans un Temple de Diane ou de Vénus de cette Ville, il y avait des trésors immenses. Ce qui fit qu'elle fut pillée en 165 av JC par Antiochos IV après sa guerre contre les Arméniens et avant qu'il ne s'en prenne à la Judée en 164, année de sa mort.

Revenons en au cercle de Popilius. L'affaire fait penser à cette anecdote du gourou Gurdjieff à propos des Yézidis du Kurdistan. Avec son collègue Pogossian, il se retrouve entouré de chiens de bergers yezidis entre Lalish et Mossoul formant un cercle qui les empêche d'en sortir, (Rencontre avec des hommes remarquables - Meetings with Remarkable Men chap 5) tout comme en 1888 à l'âge de 16 ans il avait vu un petit garçon yézidi, pleurer, effectuer des mouvements étranges, lutter de toutes ses forces pour sortir d'un cercle tracé par d'autres garçons qui le persécutaient. Gurdjieff libéra le garçon en effaçant une partie du cercle et l'enfant put échapper à ses bourreaux.

"Le cercle magique, peut-on lire dans l'Echo du Merveilleux de juillet 1906, une idées pratiques les plus puissantes et les plus antiques de I'initiatïon, employé en Egypte, en Chaldée et en Grèce, — employé dans les solennités maçonniques et dans celles dé l'Eglise catholique,— était connu dèquelques tribus, qui l'avaient apporté dès époques extinctes, qui sait même, des centres d'initiation delà Lémurie ou de l'Atlantide. " Dans le Roland amoureux  la magicienne Mélisse place Bradamante dans un cercle magique. Le Faust de Goethe s'enferme dans un cercle magique. Ce cercle sert à initier mais aussi à piéger et à maudire.

Il est très intéressant que Justin trace une causalité : cercle autour d'Antiochos-décès de celui-ci 4 ans plus tard-enfant en bas âge laissé derrière lui,et qu'Appien élargisse la chaîne causale de cette façon cercle autour d'Antiochos-pillage du temple de Vénus-décès de celui-ci 4 ans plus tard-enfant en bas âge.

Ces deux versions plaident clairement pour l'interprétation du cercle de Popilius comme étant un cercle de malédiction. Si nous croisons cela avec le livre des Macchabées et Flavius Josèphe nous avons la série causale suivante : profanation du temple de Jérusalem par Antiochos-cercle de malédiction avec un cep de vigne par Popilius-profanation d'un temple de Vénus-mort d'Antiochos-orphelin de 9 ans laissé derrière lui (donc une succession mal assurée). Ce qui pourrait donner la lecture parabiblique (car ça n'est pas stricto sensu dans la Bible) suivante : les lois de l'Au-delà fait que la rétribution de la profanation de Jérusalem devient, pour Antiochos, la malédiction par l'intermédiaire du cep de vigne (symbole d'Israël) d'un général romain qui trace un cercle magique (à un moment où d'ailleurs, comme le note Flavius Josèphe, Israël se rapproche diplomatiquement de Rome).

Pour un développement supplémentaire sur les cercles magiques voir cette vidéo.

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Charles Edward Gordon Crawford, pionnier du nudisme anglais

7 Mars 2018 , Rédigé par CC Publié dans #Nudité-Pudeur en Europe

On sait que la nudité individuelle au soleil est une pratique ancienne que partageaient dans le monde occidental aussi bien le père fondateur des Etats-Unis franc-maçon Benjamin Franklin que le philosophe athée Nietzsche. La nudité collective s'est pratiquée dans les sectes hérétiques dans des perspectives plus ou mois adamites puis dans les milieux anarchistes au XIXe siècle, avant de trouver un institutionnalisation en Allemagne avec le Freiluchtpark de Hambourg en 1903.

Les anglo-saxons reconnaissent comme pionnier de leur naturisme nu (car il y eut un naturisme habillé) Charles Edward Gordon Crawford, un juge britannique veuf qui fonda une micro colonie de quatre nudistes à Thane en Inde, The Fellowship of the Naked Trust, avec deux fils de missionnaires en 1891. L'existence de ce groupe (mise en exergue en 2010 par le Mumbai Mirror repris par CNN) qui ne dura qu'un an à l'abri des regards jusqu'au remariage de Crawford (mariage qui le conduisit à déménager à Ratnagiri) est connue seulement à travers la brève correspondance de Crawford avec le "gourou gay" Edward Carpenter, un poète socialiste végétarien anglais proche du philosophe indien Rabindranath Tagore (à quel titre se connaissaient-ils ?).

On ne sait pas si ce Crawford fut lié à la franc-maçonnerie comme le sera un peu plus tard l'autre célèbre fonctionnaire colonial britannique Gerald Gardner amateur de nudité au grand air qui allait mélanger nudisme et sorcellerie néo-païenne dans la religion wiccane dont il fut le fondateur.

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