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Iconographie de Marie-Madeleine

12 Juillet 2014 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire des idées

Récemment, des Femen ont tenté une profanation à cinq centimes dans l'église de la Madeleine. Bien sûr elles sont passées une fois de plus à côté du symbole qu'elles visaient.

 

Les artistes, eux, ont mieux compris de quoi il retournait.

 

Voici une Marie-Madeleine allemande en tilleul attribuée à Gregor Erhart qui selon le site Tétramorphe au XVI ème siècle aurait été suspendue à la voûte de l'église des dominicains d'Augsbourg et entourée d'ange (ce qui rejoint la tradition de son élévation par les anges à Ste Baume). Les gens la voyaient donc d'en bas. Le site remarque que son extase peut être mystique ou érotique.Elle est au Louvre depuis 1902.

 

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Voici celle du Titien :

 

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Celle de Guido Reni :

 

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Celle du Caravage qui, comme le rappelait Manara récemment utilisait des cadavres de prostituées pour ses modèles de saintes.

 

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Celle de Vrouet (même époque) :

 

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Celle de Murillo :

 

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Celle de Jules Lefebvre au XIXe siècle à Saint Petersbourg, toute en rousseur :

 

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Celle d'Aldophe Binet (vers la même époque)auprès du Christ :

 

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Celle de Philippe Martinery (de nos jours) :

 

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Celle de Cyril Leysin (de nos jours) :

 

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Même cette chanson dont les paroles veulent tout dire et son contraire a quand même un côté authentique : le décor qui fait penser un peu à la grotte de Sainte Baume, avec en plus une pyramide de lumière. Arnold Lebeuf cite bien "la Madelon", je peux donc citer Sandra...

 

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Bric à brac ésotérique

7 Juillet 2014 , Rédigé par CC Publié dans #down.under, #Sainte-Baume, #Médiums

2011-0039.JPGDe nombreuses librairies ésotériques en France ont dans leurs rayons des ouvrages comme "La Numérologie révèle votre avenir" de Caroline Leroy (eds Exclusif), livres écrits en grosses lettres, avec peu de lignes par pages.

 

Celui-la comprend bien des approximations : Apollonios de Tyane mal orthographié (Caroline Leroy lui ajoute un "h"). L'auteure estime (p. 12) que "ses écrits manquent d'objectivité" (sic) alors que ce philosophe n'a laissé aucun texte, Philolaos est orthographié "Philocaos" (p. 13). Le livre nous dit que "Saint Augustin recommandera que la construction des églises romanes tiennent (sic) compte des structures géométriques harmonieuses" alors que l'art roman commence au XI sècle... à peu près 600 ans après la mort d'Augustin !

 

On y apprend que "le frère de Jésus, Jacques le Mineur dit aussi Simon le Zélote (le magicien), très proche des mages samaritains de Manassé et des thérapeutes de Qumran - communauté des gardiens de l'alliance fondée en 44 av. JC par Menahem, un essénien - grand père de Marie Madeleine. Menahem descend lui-même des prêtres asmonéens largement influencés par le pythagorisme (...). Les connaissances en arithmologie arrivent en France avec Simon le Zélote qui accompagne Marie-Madeleine puis elles transitent en Ecosse et en Irlande où les druides en feront grand usage".

 

Tout d'abord, on sait que les pythagoriciens ont influencé (sinon même créé) le druidisme via Marseille trois ou quatre siècles avant JC. Ensuite Qumran n'a pas été fondée en 44 av JC (date de la mort de César), on serait bien en peine de dater à l'année près ce genre de fondation et les historiens préfèrent la situer vers - 100 (alors pourquoi inventer 44 ? parce que le chiffre est joli ?). On voit bien que certaines évocations de la rencontre entre Jésus et Marie-Madeleine ont des relents pythagoriciens (l'image de Jésus écrivant sur le sable), en revanche l'apôtre Simon le Zélote évangélisateur des Berbères n'a rien à voir avec Simon le Mage, le gnostique, ni non plus avec l'arithmologie. Quant au lien entre Menahem l'Essénien mentionné par Flavius Joseph et Marie-Madeleine, il semble aussi gratuit que l'hypothèse qui fait de la sainte une prêtresse d'Isis.

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Le Livre d'Esther

1 Juillet 2014 , Rédigé par CC Publié dans #Ishtar

esther.jpgLe livre d'Esther dont je parlais il y a peu fait partie de ces ouvrages de l'Ancien Testament sur lesquels il faut savoir revenir à divers moments de sa vie.

 

C'est une belle histoire avec des passages très intéressants sur le fonctionnement de l'absolutisme perse, avec les règles de mépris en cascade et de mimétisme qu'il produit (côté mimétisme je pense à la crainte des grands de l'empire quand ils découvrent que la première femme d'Assuerus refuse de voir son mari : nos épouses feront-elles de même ? - notez qu'on n'est pas loin dans ce passage d'une ambiance à la Lysistrata d'Aristophane...)

 

Le livre pose une question : qu'est-ce que c'est que d'être en contact direct avec le divin ? Qu'est-ce que ça implique ? Il y a un peuple, qui est élu de Dieu (souvenez vous que les péripatéticiens grecs considéraient les Juifs comme un peuple de philosophes, notamment à cause des fortes prescriptions alimentaires, comportementales et éthiques, les unes n'allant pas sans les autres, qu'ils appliquaient), un peuple qui donc n'a pas vocation à être ni dans le mépris en cascade, ni dans le mimétisme, et qui, de ce fait, s'attire des jalousies (et même dans le livre d'Esther une volonté d'extermination). Il doit donc pratiquer sa foi clandestinement comme Esther. Le lien avec Dieu ne lui promet pas une hégémonie, mais une compensation symétrique, un rétablissement dans ses droits selon les règles de la justice (celui qui voudrait pendre sera pendu) et cela à soi seul montre que Dieu "ne laisse pas tomber". Mais pour le reste, le peuple élu ne cherche pas de bien terrestre, car, pour lui, la soumission au pouvoir d'un homme (le Roi des rois, mais on pourrait dire de tout homme et de toute femme), est une soumission au néant (c'est très clairement dit dans le texte), et c'est pourquoi aux fastes de la cour s'opposent en permanence le deuil, les sacs, les cendres (de Mardochée, d'Esther) qui sont autant de renoncement aux fastes.

 

Esther ne renoue avec sa splendeur que pour sauver son peuple, elle se pare de ses habits de reine pour aller parler à son époux le roi. Et notez qu'elle ne le fait même pas pour son peuple mais pour son Dieu : pour que son Dieu ait encore des "bouches" pour témoigner de lui. Cela aussi est écrit en toutes lettres.

 

Je voudrais dire aussi un mot des deux prières qui figurent dans ce livre : celle de Mardochée et celle d'Esther. Ce sont des professions de foi, des appels au Tout-Puissant, mais aussi, de ce fait, des incantations magiques, des appropriations de pouvoirs magiques. Esther revêtue des insignes royaux risque la mort en allant implorer le roi sans y avoir été invitée. Les lois du harem le lui interdisent. Elle ne survivra que si elle inspire de la bienveillance au roi et si celui-ci pose son sceptre d'or sur son cou. Devant lui elle défaille de peur. Mais c'est parce qu'elle a invoqué son Dieu qu'au milieu de son trouble celui-ci produit le miracle : il lui fait trouver les mots justes, et attendrit le coeur du roi, préparant ainsi un retournement complet de la situation du peuple juif captif. Le retournement vient de Dieu, comme récompense de la foi, mais il n'a été provoqué que par l'humilité de Mardochée et Esther, leur persévérance dans la résistance à la loi des hommes, leur fidélité à leur divinité, celle avec qui ils ont un contact intime depuis Abraham (le lien d'une promesse paternelle), tout cela s'étant noué dans la parole sacrée de la prière.

 

Aussi, si je trouve intéressant comme je l'indiquais récemment qu'Arnold Lebeuf repère dans Esther tous les traits d'Ishtar (qu'il retrouvera aussi dans Marie-Madeleine), je crois qu'Esther reste profondément une anti-Ishtar parce qu'elle est une anti-reine. Elle est une "ancilla domini" comme la Vierge Marie, et ne trouve de sens et de pouvoir existentiel que dans ce lien intime avec l'absolu, qui est un lien sans compromis avec le pouvoir politique (ou affectif) terrestre.

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