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Un commentaire de mon livre consacré à Nietzsche

30 Avril 2017 , Rédigé par CC Publié dans #Philosophie, #Publications et commentaires

Cela m'avait échappé, mais en 2012, un certain "Pripri" sur Senscritique.com avait produit un compte-rendu très bienveillant  de mon livre "Individualité et subjectivité chez Nietzsche".

Je ne veux pas ici "commenter ce commentaire". Beaucoup de gens vivent avec Nietzsche toute leur vie. Ca ne sera pas mon cas. J'ai croisé sa pensée à 17 ans, "Individualité et Subjectivité chez Nietzsche" est un mémoire que j'ai soutenu en Sorbonne à l'âge de 21 ans, puis que j'ai transformé en livre dans les années 2000. Les deux ou trois universitaires à qui je l'avais transmis n'ont pas jugé utile de le faire. Tant mieux si des personnes sur le Net reconnaissent à l'ouvrage quelque mérite, et s'il les aide à rassembler quelques problématiques - il était surtout destiné à cela, ratisser, rassembler, mettre un peu en ordre, et rien de plus. Je pense aujourd'hui qu'à la différence de ce que pensait Nietzsche, le problème de l'individualité doit se pense par rapport à "l'autre monde" dont il avait un peu trop vite refermé la possibilité. Mon dialogue (critique) avec les médiums qui ne fait que commencer porte sur ce thème là.

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« Individualité et subjectivité chez Nietzsche » est le fruit d’un travail précis et honnête.
L’auteur, Christophe Colera, se propose dans les premiers chapitres d’exposer les deux facettes de la critique nietzschéenne de la notion de sujet et de subjectivité - thème académique mais pas inintéressant, et s’approche naturellement dans le dernier d’une définition de ce que serait l’individualité aux yeux du « plus sublime des » syphilitiques. La plume de l’auteur est la plupart du temps très lisible, un peu mécanique mais puisqu’il se paye le luxe précieux de confronter ses thèses à celles de commentateurs plus renommés que lui (Heidegger, Jean Granier, Michel Haar et même Luc Ferry qui avait commis avec quelques autres un Pourquoi nous ne sommes pas nietzschéens) tout ça donne vite au lecteur un air très respirable. Si l’ouvrage est truffé de coquilles, la lecture n’en est pas pour autant rendu si désagréable, les chapitres étant aérés et les références au texte nietzschéen nombreuses et très pertinentes.

Une fois débarrassés des questions de forme, vous allez évidemment me demander ce qu’il y a au fond de la marmite. Comme je l’ai déjà écrit, les deux premières parties bien qu’assez classiques ne manquent pas de pédagogie et de précision pour exposer les différentes critiques que Nietzsche adresse à l’encontre de la notion de sujet. Le premier chapitre se contente de servir d’introduction correcte à cette critique en passant notamment en revue les raisons extra-épistémologiques qui ont motivé Nietzsche - pêle-mêle : l’importance du cas de la Grèce présocratique (où le sujet moderne n’existe pas), la volonté constante chez Nietzsche de dépasser sa maladie par la philosophie et pour finir l’influence majeure de l’art comme (nouveau ?) paradigme de la pensée. Le deuxième chapitre lui va au cœur du propos de Friedrich et énonce les arguments que ce dernier emploie à mainte reprises contre les avatars du sujet. Qu’il s’agisse de l’âme chrétienne, du libre-arbitre ou de la subjectivité libérale moderne (que Nietzsche hérite de sa lecture de Tocqueville selon l’auteur) chacun se voit mis à la porte de la Gaya Scienza dont le physionomiste (« Encore un black ! » « Non un allemand. ») est parmi les plus sévères que je connaisse. Le troisième chapitre est évidemment le plus dangereux car il s’agit là de réunir ce qui a été intentionnellement disséminé par le généalogiste à la fois dans les œuvres publiées - principalement le Gai Savoir, Ecce Homo et Par-delà bien et mal mais tristement pas la Généalogie de la morale qui est trop souvent exploitée par l’auteur comme un texte uniquement critique – mais également dans les Notes posthumes.

Quid alors de cette reconstitution à la Isis ? Il me faut tout de suite reconnaître que l’auteur ne démérite pas et prend le soin d’accuser premièrement l’indécrottable aspect métaphorique de la pensée de l’individualité chez Nietzsche, deuxièmement le caractère incertain d’une telle recomposition et troisièmement le paradoxe qui nourrit cette conception déterrée. En effet, cette individualité nietzschéenne qu’il faudrait retrouver repose sur trois éléments majeurs de la philosophie du moustachu qui la soutiennent (l'individualité, pas la moustache). Le premier élément c’est la nouvelle conception du Corps qui marque l’arrêt de mort de la distinction sujet-monde et ouvre quelque part la voie au Dasein heideggérien ; ‘’l’individu’’ avant d’être tel est d’abord un corps, une multiplicité d’affects, de volontés qui combattent les unes contre les autres pour imposer leur perspective. Le deuxième élément c’est la doctrine de l’Eternel Retour du Même dont la conception cyclique du temps permet, si elle est tenue pour vrai par l’individu, d’atteindre le troisième élément capital et nécessaire qu’est l’ego-fatum, pendant théorique de l’amor fati.

C’est ici que réside le paradoxe de l’individualité nietzschéenne : l’individu n’est certainement pas une unité mais une multiplicité (d’affects, de petites volontés) qui se donnent l’apparence de l’unité, qui se croit identique à elle-même à travers le défilement des instants. Plus précisément encore c’est sur l’instant que repose l’individualité que reconstruit ici Christophe Colera : l’individu n’est pas ni ne se fait lui-même, il est fait à tout bout de champ. A chaque instant c’est par un devoir-être (!), par une sélection éthico-pratique qu’il advient tout en étant dépassé par ce qui le meut (soit les instincts nihilistes triomphent, soit ce sont les instincts supérieurs – il n’y a pas de voie intermédiaire ou attentiste dans cette ‘’éthique’’). Christophe Coléra écrit : « Le vouloir issu d’une solitude individuelle se révèle ainsi comme étant virtuellement porteur d’une volonté passive-active du monde, laquelle est indéfiniment en attente de sa reprise dans un instant quelconque, sans sujet pour en gouverner le destin » (p.126). On oubliera donc les versions à l’aspartam d’un Nietzsche-Victor Novak éducateur, venu prêcher la bonne parole pour élever les bonnes âmes humanistes à la libération de l’aliénation et au sapere aude des Lumières. ‘’L’individu’’, du point de vue de la volonté de puissance, est l’outil de cette dernière. ‘’L’individu’’, du point de vue de la conscience claire, n’est individu que lorsqu’il accepte de se comprendre comme volonté de puissance, lorsqu’il accepte de se voir comme « plusieurs âmes dans un seul corps » - comme voulu par un Destin.

On pourrait objecter à nos auteurs que la notion d’individualité perd alors complètement son sens : l’individu se retrouve entièrement soumis, à chaque instant, au travail interprétatif de ces petites âmes, de ces affects qui cherchent à commander la perspective sur le monde, qui cherchent à imposer les mobiles de l’action à venir aussi. Eh bien c’est exactement ça, l’individualité est toujours à venir et ne cesse jamais de l’être (sinon la circularité du temps perçue via l’Eternel Retour n’aurait pas lieu d’être pensée) et l’individu n’advient qu’en acceptant de jouer le jeu de son Corps, en évitant de se méconnaître au point de se mortifier (soi ou les autres d’ailleurs). Les vieux briscards ne s’étonneront pas du paradoxe car Nietzsche n’a de cesse de penser en-dehors, à côté, en-deçà des antinomies du langage. En une phrase : « la transmutation de l’individu en monde, l’éclatement du sujet, se joue là dans un acte pur, c’est-à-dire dans un verbe pur, à l’infinitif, sans sujet grammatical et, qui plus est, un verbe qui possède les deux modes actif-passif » (p.126). Moralité de l’histoire : devenez ce que vous êtes.

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Indigo et Torah

30 Avril 2017 , Rédigé par CC Publié dans #Médiums, #Histoire des idées

Puisque vient de paraître mon essai sur les médiums (voir ici à gauche), une petite vidéo sur l'indigo dans la culture juive :

 

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Le Mercure de France contre la nudité

27 Avril 2017 , Rédigé par CC Publié dans #Nudité-Pudeur en Europe

 

Mercure de France 1931p. 185 sous la plume de Saint Alban :  "je me trouve d'accord avec M. le Médecin général G. Saint-Paul (Espé de Metz) qui dans le Progrès médical du 13 juin rattache nudisme, freudisme, etc., à l'obsession sexuelle, et même avec le compagnon Armand, qui reconnait loyalement et contrairement, précise-t-il, à la plupart des théoriciens gymnistes, que la vue du nu exalte le désir érotique. Mais, au lieu de se rendre à ce qui semble l'évidence, ces théoriciens affirment, au contraire, que le nudisme en commun affaiblit ce désir et favorise la chasteté. Croyons-les sur parole

Quoi qu'il en soit, il semble que le nudisme marque en France un temps d'arrêt. Le dernier livre de reportage de M. Roger Salardenne, Le Nu intégral, ne donne pas l'impression d'un développement très victorieux. A Strasbourg, le petit groupe gymnique avoue qu'il se heurte à de grandes résistances et à Bordeaux on semble avoir peur de la propagande. En somme, il n'y a qu'à Paris, Marseille- et Alger que le mouvement continue. A Toulon, quelques nudistes ayant pratiqué leurs jeux en lieu trop ouvert, se sont vu dresser procès-verbal; quelque indulgent qu'on soit pour le nu en plein air, on ne peut pas admettre en effet que les gymnistes ne prennent pas les précautions indispensables s'ils ont le droit de pratiquer leurs jeux dans le costume qui leur plait, les passants ont encore plus le droit de ne pas vouloir de ce costume-là. Avec un peu de bon sens et d'indulgence, comme il serait facile de mettre tout le monde d'accord, sauf, bien entendu, les politiciens qui ne voient dans toutes ces questions-là que des moyens de prôner le malthusianisme, le défaitisme, l'anticapitalisme et autres inepties!"

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"Les Sabéens-Mandéens - Premiers baptistes, derniers gnostiques" de Claire Lefort

21 Avril 2017 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire des idées


Les Sabéens-Mandéens sont une minorité religieuse basée dans le Sud de l’Irak et en Iran, qui compte moins de 100 000 adeptes à travers le monde. L’auteure du livre que les éditions du Cygne leur consacre cette année, une jeune étudiante en anthropologie à Normale Sup’, qui mène des enquêtes dans les camps de réfugiés en Jordanie et en Mésopotamie, reconnaît elle-même qu’elle n’en avait jamais entendu parler avant de se rendre au Proche-Orient.

Il s’agit d’un groupe ethno-religieux en quelque sorte invisible, et qui pourtant a fait couler beaucoup d’encre chez les spécialistes de l’histoire des religions, notamment au début du XXe siècle (grande époque de la redécouverte de la mosaïque des anciennes croyances qui survivaient sous le joug ottoman entre Erbil et Bassorah). On a vu en eux tantôt une religion autochtone vieille de 5000 ans, tantôt les derniers descendants des disciples de Saint Jean-Baptiste, et, en même temps, les dépositaires de secrets kabbalistiques, voire de gnoses magiques venues des bords du Nil ou des temples du zoroastrisme.

L’ouvrage s’insère dans une collection, «Frontières», qui publie des textes courts sur des contrées méconnues (la Transnistrie, l’Abkhazie), lesquels mêlent souvent invitation au voyage et réflexion géopolitique. Dans cette logique, le livre offre dans un premier temps une présentation assez brève mais très claire de l’ensemble des croyances et pratiques cultuelles des Sabéens, notamment leur usage abondant du baptême purificateur dans l’eau vive des fleuves, ce qui n’est pas allé sans leur jouer des mauvais tours, notamment dans les périodes d’épidémies. Dans un second temps, il apporte de précieuses informations sur la situation de cette minorité depuis qu’une chape de plomb de barbarie islamiste s’est abattue sur l’Irak et la Syrie. L’exposé montre très concrètement de quels harcèlements quotidiens les Sabéens sont la proie depuis la chute de Saddam Hussein, dans les provinces chiites d’Irak, quand bien même ils n’étaient pas exposés à la folie meurtrière de Daech, comme les Yézidis et les Assyro-chaldéens au nord de Mossoul. Il fait toucher du doigt la douleur d’un peuple à travers les assassinats, les viols, les pillages, les discriminations à l’emploi, mais aussi l’impossibilité de conserver des structures culturelles et cultuelles stables à l’étranger, quand la présence des prêtres et des lieux de prière n’est plus assurée pour cette communauté qui n’avait jamais eu de vocation à l’exil. À ce titre, il s’agit d’un témoignage précieux, fondé sur des entretiens directs avec les réfugiés dont certains sont d’ailleurs reproduits in extenso en fin d’ouvrage.

Le parti pris du livre de fournir tous les arguments pour une reconnaissance du génocide des Sabéens-Mandéens peut cependant prêter à discussion. Peu conforme au devoir de neutralité des sciences sociales, il participe d’une logique selon laquelle le monde doit demeurer un conservatoire des religions et cultures les plus anciennes, comme par ailleurs un laboratoire de la biodiversité naturelle, dans une conception très muséographique en vogue à notre époque qui, tout de même, ne devrait pas aller complètement de soi compte tenu des nécessaires dynamiques transformatrices de l’humanité, dynamiques qui n’ont jamais été, hélas, sans violences (les Sabéens, selon leur version de l’histoire, subiraient aujourd’hui leur septième tentative d’extermination). Mais on comprend que les appels pressants des réfugiés («ne nous oubliez pas») aient transformé l’anthropologue en militante, les droits d’auteurs de l’ouvrage étant d’ailleurs directement reversés à une association caritative.

On était entré dans ce livre avec en tête quelques petites questions gardées de lectures antérieures : pourquoi le nom du démiurge des Sabéens est-il dérivé de la divinité égyptienne Ptah ? Pourquoi, comme dans la tradition talmudique, certains de leurs textes sacrés voient-ils dans le sexe une «seconde bouche» ? Laquelle des deux veines mystiques a-t-elle inspiré l’autre et par quel canal ? Quelle est donc la philosophie mandéenne de la nature dont une mienne correspondante yézidie s’était dite profondément «amoureuse» ? On n’a pas trouvé de réponse à ces interrogations dans le livre, mais celui-ci a donné un panorama clair de l’héritage culturel de cette communauté et des enjeux de survie auxquels elle se trouve confrontée. En ce sens le contrat moral avec le grand public qui en général n’a jamais lu une ligne sur ce groupe ethno-religieux dans les journaux paraît donc être pleinement rempli.

La recension est aussi ici.

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médium au ministère de la guerre

17 Avril 2017 , Rédigé par CC Publié dans #Médiums

Extrait de L'Écho du merveilleux : revue bimensuelle / directeur : Gaston Mery 1908-05-01

"JK Huysmans avait connu, avant sa conversion, un chef de bureau du ministère de la guerre, M. François, lequel était un médium extraordinaire. JK Huysmans me raconta souvent les phénomènes auxquels il assistait d'abord en sceptique ; mais, comme il savait regarder et voir, et qu'il n'avait aucun parti pris, il dut se rendre à l'évidence d'incontestables fait spirites, obtenus sans dol ni tricheries." écrit son fidèle disciple et secrétaire Jean de Caldain p. 172

 

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