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Articles avec #sainte-baume tag

Le professeur Montagnier et la mémoire de l'eau

5 Mars 2022 , Rédigé par CC Publié dans #Philosophie, #Christianisme, #Médiums, #Sainte-Baume

Le professeur Montagnier, prix Nobel de médecine 2008 décédé le mois dernier, était connu pour ses travaux de pointe sur la mémoire de l'eau. Ce sujet, je m'en souviens, animait déjà des débats lorsque j'étais en Terminale, en 1988, autour des travaux du Pr Benveniste, et il a bien évolué depuis. Ce chercheur s'était exprimé au premier colloque scientifique international organisé par le sanctuaire de Lourdes les 8-9 juin 2012. Le lieu s'y prêtait car on sait que les apparitions mariales s'accompagnent souvent de l'apparition de sources, ce qui n'est pas sans poser de questions dans l'explication des miracles (et ceux qui ont lu mon livre sur les médiums se souviennent peut-être du rôle que joua la source de la Saint-Baume, une source pourtant peu accessible aux visiteurs, dans ma "guérison" de 2015).

Je vais essayer de retranscrire ici en le résumant le propos du professeur Montagnier, en essayant de rester assez clair.

La physique, explique le professeur, fonctionne sur le paradigme qui prend en compte à la fois la matière et l'énergie. La biologie, elle, considère toujours les intéractions moléculaires comme des intéractions de contact uniquement, sans intégrer les ondes électro-magnétiques.

L'eau est un médium extraordinaire. C'est un ensemble de structures assorties de champs magnétiques.

Toute eau de source comprend du calcaire, qui est le cristal le plus connu dans le monde. Il existe aussi, notamment en Espagne, de l'aragonite

Une série d'expériences de croissance d'aragonite, qui est un polymorphe de carbonate de calcium (CaCO3), a été réalisée dans un cristalliseur à lit fluidisé sous l'influence d'un champ magnétique (voir Revue du génie chimique de 2010). Dans le processus de croissance, les propriétés de la solution, y compris la sursaturation relative (σ), le pH, la force ionique (I) et le rapport d'activité Ca2+ à CO32− (R), ont été maintenues presque constantes dans le processus de croissance à l'aide d'un auto-titreur. Différents types et intensités de champ magnétique, y compris un aimant permanent (PM) et un dispositif magnétique commercial de traitement de l'eau (MWTD) avec une intensité effective de 212,6 et 1800,0G, respectivement, ont été testés. Les germes cristallins d'aragonite ne se sont pas développés sans magnétisation à température ambiante, mais se sont développés sous l'influence du champ magnétique.

Ainsi donc la calcite (calcaire) sous  l'effet du champ magnétique se transforme en aragonite, comme l'avait le premier montré en 2008 le dr Alkiviadis-Constantinos Cefalas. L'eau elle-même dirige la cristallisation.

L'équipe du Pr Montagnier a observé que la molécule d'ADN aussi crée des structures dans l'eau. Certaines séquences d'ADN émettent des signaux électro-magnétiques dans des solutions aqueuses. Des nanostructures durables se forment dans l'eau et s'y maintiennent. Les séquences d'ADN de nos bactéries et virus ont des émissions de basse fréquence (mais cela est transposable à notre ADN).

On mesure ces signaux dans une solution d'ADN en enregistrant la composante électrique du champ électro-magnétique qu'on amplifie et analyse sur ordinateur. Or il y a une résonance. L'énergie vient de l'extérieur. Nous sommes exposés depuis toujours à un champ électro-magnétique faible, les résonances de Schumann, qui entourent la terre, elles commencent à 7 Hz, et qui proviennent probablement des orages. L'homme en a apporté récemment d'autres par ses télécommunications dont on ne peut prévoir les effets à long terme.

Ces fréquences excitent les virus et les bactéries. Si on les dilue de dix en dix, avec très peu de molécules. On identifie les fréquences qui répondent aux sollicitations de l'extérieur (à la résonance de Schumann et à nos propre générateurs) par la formation d'ondes électro-magnétiques.  Des ondes électromagnétiques à ultra basse fréquence (ULF 500−3000 Hz) ont été détectées dans certaines dilutions de filtrats et dans le sang des gens atteints par des maladies chroniques.

On peut par des techniques biophysiques mettre en évidence ces structures dans l'eau. L'eau peut être à certains stades formatées par les ondes émises par l'ADN ou par d'autres molécules et les structures qu'elle porte alors peuvent être détectées par des techniques de spectométrie. Ces structures ne sont pas des impuretés, mais bien des composantes de l'eau elle-même, et cela peut avoir une explication quantique semble-t-il.

Les structures dans l'eau portent une information spécifique de l'ADN. Plusieurs laboratoires ont pu le constater. Le SIDA est un virus ARN qui grâce à l'enzyme de la transcriptase inverse produit un ADN complémentaire, les gènes de cet ADN sont bien connus. Les séquences de 104 paire de bases de répétition terminale à chaque extrémité, qui se conservent bien,  que l'on conduit à émettre des signaux électro-magnétiques dans une solution appropriée sont émis dans un tube d'eau en plastique. L'on pose à côté un tube qui ne contient que de l'eau non formatée. En générant une fréquence d'excitation de 7 Hz pendant une nuit, tout en protégeant les tubes des radiations extérieures, on découvre dans le nouveau tube qu'il émet lui aussi des signaux électro-magnétique, par induction du premier tube. Et par la technique PCR (polymerase chain reaction) découverte par Kary Mullis qui permet d'amplifier des millions de fois une séquence d'ADN, des tubes A et B, on retrouve dans le tube B la même séquence que dans le A, ce qui prouve bien l'existence d'un transfert.

Les enzymes qui synthétisent l'ADN depuis les origines de la vie ont pu utiliser la même structure de l'eau pour lire et répliquer la séquence, sans qu'il y ait une lecture directe base contre base.

Pour rendre la démonstration encore plus inattaquable, les EMS transportant les informations ADN ont été enregistrées sous forme numérique de fichier et envoyé via Internet à un laboratoire destinataire où un travail sur cet ADN ou sur la bactérie ou le virus qui a été la source de cet ADN n'avait jamais été faite. Des laboratoires destinataires ont été choisis en Italie (Salerne) et en Allemagne (Göttingen). Dans le laboratoire allemand, le courant électrique issu du fichier numérique communiqué par notre laboratoire a été converti et amplifié. Le courant était alors connecté à un solénoïde. Un tube d'eau a été inséré dans le solénoïde et a ainsi été soumis au champ magnétique modulé induit pendant une heure. Puis les ingrédients ont été introduits dans une aliquote d'eau du tube, et après 40 cycles PCR d'amplification l'ADN originel a été détecté. Cela s'est confirmé en Italie et en Allemagne avec une séquence du virus du SIDA et de la bactérie borrelia à l'origine de la maladie de Lyme.

L'eau garde donc la mémoire d'une structure chimique complexe. Est-ce que cela joue un rôle dans le fonctionnement physiologique normal ?

On détecte des signaux de l'ADN dans beaucoup de maladies chroniques. Connaître le mécanisme de reproduction dans l'eau peut permettre de neutraliser des maladies nosocomiales ou des maladies dégénératives ou l'autisme qui peuvent venir de signaux d'origine bactérienne dans le sang (qu'on détecte même dans des structures associées à des globules rouges, lesquelles sont censées ne plus avoir d'ADN). Les médecines traditionnelles peu toxiques peuvent éventuellement compléter les thérapies modernes.

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"Les Géants et le mystère des origines" de Louis Charpentier

23 Février 2022 , Rédigé par CC Publié dans #Sainte-Baume, #Histoire secrète

Ceux qui ont lu mon livre "Les Médiums" savent que j'ai une dette personnelle à l'égard du sanctuaire de la Sainte-Baume en Provence. En 2014, j'ai même pu participer à un pèlerinage des Compagnons du Devoir sur le flanc de sa colline (et il se trouve d'ailleurs que j'ai été conduit à travailler récemment à nouveau sur ce sanctuaire dans le cadre de la préparation d'un nouveau livre qui paraîtra prochainement).

A propos des Compagnons du Devoir, et des grands bâtisseurs, je voudrais mentionner ici le livre pitoresque de Louis Charpentier, "Les Géants et le mystère des origines" paru aux éditions Robert Laffont en 1969 (ouvrage qu'Amazon m'a livré chargé d'odeurs d'huiles essentielles dont comme nous dit Doreen Virtue il faut se méfier). Comme beaucoup de livres de cette époque sur l'histoire secrète (on peut penser par exemple aux travaux de Gérard de Sède sur les Goths), ce genre de texte est rempli d'affirmations gratuites, reposant notamment sur des toponymies controversées. Mais dès que l'on essaie d'aller un peu au-delà de l'historiographie académique pour comprendre certains phénomènes spirituels à l’œuvre dans l'évolution humaine, il peut être intéressant d'y jeter malgré tout un coup d'oeil, au cas où, sait-on jamais, quelque vérité se mêlerait aux erreurs.

Carpentier est spécialiste de l'architecture et de ses codes secrets qu'on a parfois évoqués sur ce blog et que lui-même a explorés autour du cas de la cathédrale de Chartres. Il fait partie de ces gens qui trouvent que cette cathédrale a des proportions semblables à la pyramide de Chéops en Egypte, et qu'elle comprend trois tables, rectangulaire, carrée et ronde, qui aurait servi aussi à la construction de temples égyptiens, et au temple indien de Konarka (il se prévaut d'un courrier que lui adressé l'indianiste suisse Alice Boner à ce sujet, mais aussi du béarnais Raoul Vergez sur le volet français).

Son intuition est que les constructeurs de mégalithes (qui auraient été éventuellement instruits par des extra-terrestres), ont été les détenteurs de savoirs secrets, qui se seraient ensuite diffusés en Europe et en Orient, et transmis par des confréries plus ou moins clandestines, des sortes de "maîtres Jacques" qui auraient effectué des tours du monde permanents comme les Compagnons du Devoir avec leur tour de France (ce qui rejoint un peu les théories actuelles sur les Bâtisseurs de l'Ancien monde). Ils ne seraient appelés Géants (par exemple dans toute la toponymie de Gargan) que par référence à leur supériorité spirituelle (un complément intéressant à mes considérations sur l'histoire des Géants dans mon livre Les Nephilim).

Cette hypothèse amène Louis Charpentier à reconstituer toute une chronologie historique secrète, en partie articulée à l'astrologie. Il y aurait eu selon lui 5 ères astrologiques avant la nôtre. Celle du lion (illustrée notamment par le sphinx) de 10 910 av JC à - 8 750, celle du cancer de - 8 750 à - 6 600 avec les scarabées égyptiens, celles du Gémeau de - 6 600 à - 4 600 (qui lui fait penser aux colonnes jumelles de Tyr), celle du taureau de - 4 600 à - 2 300 (le temps du Minotaure, d'Apis en Egypte, de Cualngé en Irlande, de Tarnos en Gaule), de - 2 300 à - 150 celle du bélier (le temps de la Toison d'Or et du dieu Amon cornu), enfin celle du poisson de - 150 à nos jours (le temps du christianisme).

Il exploite la légende d'Hercule/Héraklès, dans laquelle il veut voir la trace de guerres de civilisations. Elle commence avec la mort du lion de Némée (la fin de l'ère du lion) et cela se termine avec les constructions des deux colonnes jumelles (le début des Gémeaux), donc pour lui cela pourrait correspondre à l'ère du cancer (l'époque du mésolithique)... Les armées hérakléennes dont on peu suivre la progression à travers la toponymie (Port Hercule à Monaco, Heraklea Caccabaria/Cavalaire-sur-Mer) auraient traversé à pied sec le détroit de Gibraltar non encore creusé pour combattre les peuples atlantes à Tanger où se trouve le tombeau d'Antée leur roi, fils de Poseidon (le royaume de la mer, Hercule,  lui est fils de Zeus, le royaume de la terre, le troisième fils de Cronos étant Caron, dans les enfers). Hercule vola les boeufs roux du géant Geryon, puis les pommes initiatiques (elles permettaient d'ouvrir l'Olympe) des Hespérides. Pour Charpentier ,il s'agirait là de peuples de géants dans un sens métaphorique, c'est-à-dire de maîtres bâtisseurs versés dans les sciences ésotériques.

Charpentier prête les mêmes qualités aux Ligures que combattit aussi Héraklès. En s'appuyant sur Camille Jullian, il veut trouver des traces de leur dieu Lug dans toutes sortes de villes de Londres à Louviers, Lyon, Lion-en Beauce, Lusignan, Loches, et veut aussi identifier sa parèdre Lugine à Mélusine. Mauléon, Luchon, tout vient de Lug et même Lourdes, qui, à travers la racine basque "ur" (eau) pourrait vouloir dire "eaux de Lug", un moyen bien commode d'attribuer ses miracles à la racine ligure... Lug eut pour symbole le corbeau, mais aussi l'oie (comme la patte d'oie de ce peuple de constructeurs qu'étaient les cagots parias dans les Pyrénées). Or les villes qui évoque Lug forment une spirale à travers la France, comme le jeu de l'oie, nous explique l'auteur... Et des restes du génie des premier bâtisseurs se trouveraient dans la configuration astrologique de Stonehenge et dans les artefacts de Glozel. Tout cela dessine une géographie sacrée de lieux à vibration tellurique particulière où l'on aurait planté de la vigne ou dansé des danses rituelles pour se remplir d' "énergies subtiles" dont les sabbats de sorcières auraient gardé le souvenir (je crois que l'apologie des sorciers qui marque toujours ce genre de spéculation montre assez leur parti pris idéologique anti-chrétien).

Je vous passe les développements sur les menhirs...

L'Orient et l'Occident auraient donc été instruits par ces grands bâtisseurs, mais finalement ceux d'Orient auraient progressé plus vite que ceux de l'Ouest, et auraient dû leur apporter des savoirs complémentaires (avec le cas des Phéniciens et de maître Hiram). Même la légende de la venue de Ste Marie Madeleine et sa famille en Provence, à l'arrière-plan du sanctuaire des Compagnons du Devoir à Ste Baume serait une allégorie de ce mouvement (p. 194).

Rien dans toutes ces considérations ne paraît bien sérieux, mais l'ouvrage trouve sa place dans les nombreuses rêveries autour de l'architecture secrète qui ont enfanté celles qui passionnent certains geeks sur Internet aujourd'hui...

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Des nouvelles de mes travaux

10 Juin 2021 , Rédigé par CC Publié dans #Publications et commentaires, #Christianisme, #Sainte-Baume, #Histoire des idées, #Philosophie

Il semble que cette année, je ne publierai pas de livre. Après avoir écrit 150 pages sur la vue du RP Lacordaire, j'ai finalement suspendu ce travail en mai. J'avais pourtant à travers cette recherche abordé des sujets importants, sur les origines du catholicisme social, les question qu'il posait sur le droit de révolte, le rapport à la modernité, aux libertés publiques à la question sociale. C'était un bon support de réflexion sur le rapport de notre pays à son Eglise, la manière dont il gérait l'héritage révolutionnaire et celui de Napoléon. La façon dont Lacordaire avait approché la question, sa propre relation à toutes sortes de sujets épineux comme le clivage gauche-droite, la réhabilitation du Moyen-Age (à travers ses essais sur le Saint Siège, sur Saint Dominique), la philosophie grecque, les hérésies du romantisme, et même le magnétisme étaient source de nombreux enseignements. Qui plus est cela permettait de croiser des personnalités très intéressantes comme Sainte-Beuve, le vicomte de Melun, Mme Swetchine, ou Ozanam, qui avaient eux aussi leur façon bien particulière de prendre position sur tous ces sujets et qui l'exprimaient dans le joli style de leur époque. Ces gens qui se sont influencés les uns les autres, parfois soutenus mutuellement, parfois critiqués, ont contribué chacun à leur manière à enfanter un nouveau regard sur le passé et le présent de la religion, à lui définir une nouvelle place.

Même l'histoire de la restauration des Dominicains à la Sainte-Baume et son avis sur Marie-Madeleine avaient son intérêt au regard notamment de mon propre itinéraire sur le sujet que je raconte dans mon livre sur les médiums.

Mais finalement j'ai eu l'impression que ce travail était une impasse. Je ne saurais trop dire pourquoi. Même l'échange par courriel avec une étrange guide touristique de Saint-Maximin qui se disait admiratrice de Lacordaire m'a convaincu que mon travail, comme les précédents, ne trouverait de toute façon pas le public qui lui correspondait (les gens fonctionnent avec des schémas mentaux qui ne sont pas les miens, donc tout ce que j'essaie de leur dire tombe dans un puits d'incompréhension).

Par ailleurs diverses personnes ont pris contact avec moi avec qui j'ai été conduit à réexplorer les sujets à la mode du rapport de la physique quantique au monde invisible, la prétention qu'ont beaucoup, sous l'influence des mysticismes orientaux (comme avant eux Schopenhauer, Nietzsche et Heidegger) à abroger la différence sujet-objet, réalité-représentation etc, à substituer a "méditation" inspirée au travail laborieux, autant de dérives qui ne sont pas du tout ma tasse de thé. Mais je ne crois pas avoir trop convaincu mes interlocuteurs soumis au Zeitgeist du moment.

Comme je ne suis pas obligé de publier quoi que ce soit, j'ai la chance de pouvoir préférer le silence plutôt que d'exposer des problématiques décalées par rapport à celles formatées les médias et l'ingénierie sociale de notre époque, je crois que, à part quelques billets sur ce petit blog, cette année 2021 sera finalement surtout, de mon côté, une année de silence.

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Lacordaire

6 Avril 2021 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire des idées, #Sainte-Baume

Je travaille sur la vie du P. Henri Lacordaire, un des hommes qui, sous la Monarchie de Juillet et sous la Deuxième République, essayèrent de réconcilier l'Eglise avec l'idée de Liberté et la faire retourner dans les catacombes pour s'y regénérer (comme allait aussi le proposer Pasolini dans les années 1960). Aussi, accessoirement (mais c'est peut-être tout aussi important, voire plus, je ne sais pas encore), le restaurateur de l'Ordre Dominicain en France, notamment au sanctuaire de la Sainte-Baume (à Saint-Maximin)...

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Quand la Vierge Marie bénissait les dominicains

21 Mars 2021 , Rédigé par CC Publié dans #Sainte-Baume, #Christianisme, #Histoire secrète

Extrait de "La Sainte Baume en Provence, ou Histoire de sainte Marie-Magdeleine : suivie d'un exposé sur la sainte grotte et les diverses particularités de ce désert / par M. l'abbé Maille" (1860) : "Au commencement de l'ordre Dominicain, l'antienne Salve Regina, se disait seulement à genoux dans le couvent de saint Romain de Toulouse, d'après la prescription de saint Dominique lui-même, les frères de Rome suivirent ensuite cet exemple, et en 1220 , on la récitait également à Bologne, lorsqu'arriva le miracle de l'apparition de la sainte Vierge à saint Dominique.

Voici dans quelles circonstances la bonne mère voulut manifester sa tendresse maternelle pour cet ordre privilégié :Un soir que Dominique était resté dans l'église à prier, il en sortit à l'heure de minuit ; il entra dans le corridor où les frères avaient leurs cellules et dormaient.

Lorsqu'il eut achevé ce qu'il était venu faire, il se mit à prier à l'une des extrémités du corridor, et regardant par hasard à l'autre bout, il vit s'avancer trois femmes, dont l'une , qui était au milieu , paraissait la plus belle et là plus vénérable. Ses compagnes portaient, l'une un vase magnifique, l'autre un aspersoir qu'elle présentait à sa maîtresse. Celle-ci aspergeait les frères et faisait sur eux le signe de la croix. Dominique alla au-devant de la femme qui bénissait et qui était déjà au milieu du corridor, près de la lampe suspendue à cet endroit, il se prosterne à ses pieds , et, quoiqu'il l'eût déjà reconnue, il la supplia de lui dire qui elle était. La femme qui bénissait répondit au bienheureux Dominique : je suis celle que vous invoquez tous les soirs, et lorsque vous dites : Eia ergô advocata nostra, je me prosterne devant mon fils pour la conservation de cet ordre. Alors le bienheureux Dominique s'informa qui étaient les deux jeunes filles dont elle était accompagnée. A quoi la bienheureuse Vierge répondit : l'une est Cécile et l'autre Catherine.

Ce miracle ayant été rapporté au chapitre général de 1228, il fut ordonné qu'on chanterait le Salve Regina, après complies, dans tous les couvents de l'ordre. Cette sainte pratique, qui a depuis passé à toute l'Eglise, est encore pieusement observée de nos jours partout où se trouvent des enfants de saint Dominique, par conséquent à Saint-Maximin.

Il y a indulgence de deux cents jours pour les religieux et les fidèles qui assistent au chant du Salve, soit à Saint-Maximin , soit dans une autre église de l'ordre."

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"Mystique et Magie" de Jean-Gaston Bardet

24 Janvier 2021 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Alchimie, #Spiritualités de l'amour, #Sainte-Baume, #Shivaïsme yoga tantrisme, #Anthropologie du corps, #Philosophie, #Histoire des idées

"Ne t'arrête pas de hurler sur le cadavre du genre humain que tu vois s'en aller vers des malheurs si grands que la langue ne peut les décrire" (Ste Catherine de Sienne, Le Livre des dialogues, CVII)

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Un lecteur de ce blog que j'interrogeais il y a peu à propos de la numérologie et des heures miroirs m'a conseillé la lecture de Jean-Gaston Bardet (1907-1989), architecte urbaniste qui étudia avec le docteur Alphonse Gay (un clinicien enseignant à la Faculté catholique) le fonctionnement des mystiques chrétiens mais aussi publia divers ouvrages sur la spiritualité (ce qui lui valut de devenir un conseiller du pape Jean XXIII). Je me suis procuré Mystique et magies, paru chez Trédaniel, 1972 puis réédité deux fois, et me suis décidé à le commenter sur ce site, particulièrement parce que cet ouvrage s'intéresse de très près à la problématique du double spirituel, que j'ai un peu abordée dans mon essai sur les médiums de 2017 et qui a pris une importance certaine dans mon expérience personnelle depuis lors. J'essaierai de présenter ici pas à pas le contenu de ce livre, tout en m'excusant auprès des lecteurs pour mes maladresses, mes approximations, et mon ingénuité, car je suis tout à fait Béotien dans les sujets que je vais exposer ici.

Le livre commence, en introduction, par cette problématique du dédoublement. Il en est de deux sortes, nous dit l'auteur : il y a la sortie du corps naturelle dans l'espace et le temps, auquel on peut parvenir dans des rites initiatiques ou par la consommation d'enthéogènes - ça, cela relève de la magie ; et puis il y a l'extase surnaturelle hors du continuum espace-temps, et cela, ça relève de l'expérience mystique.

D'emblée il annonce qu'il ne pourra pas examiner ces deux aspects de la sortie du corps sans avoir examiné la problématique de l'alphabet hébraïque, parce que "chacun sait, écrit-il p. 20, que la plupart des formules ou pantacles magiques (même si on les donne sous couvert de celtisme) renferment des expressions et des lettres hébraïques".

Qu'il me soit permis d'ouvrir une parenthèse ici. Je me souviens que Maurice Caillet, franc-maçon repenti converti au catholicisme, avait un jour dans une conférence témoigné qu'une femme avait été prise d'un malaise dans le cadre d'un cours lorsque l'orateur avait écrit des lettres hébraïques au tableau, ce dont ce dernier s'était excusé ensuite car il s'agissait effectivement des lettres d'un mot magique. Depuis lors, je suis tout à fait convaincu de la puissance des lettres hébraïques, et cette vidéo dans laquelle le rav Menahem Berros (dont on a déjà croisé le nom sur ce blog) raconte comment il a pu réaliser un exorcisme à partir d'une spéculation sur les lettres hébraïques finira, je pense, de vous en persuader...

Suit dans cette introduction une thèse un peu compliquée sur le fait que l'alphabet hébraïque n'est pas purement consonantique (sans quoi le tétragramme YHWH serait imprononçable), ce dont les Juifs eux-mêmes ont perdu le sens à partir de la codification d'Esdras (au IVe s av JC), avec notamment la perte du fait que dans le tétragramme, le vav porte aussi le "o" qui ouvre la voie à l'incarnation de Dieu. "La signification de l'Ecriture esdraïque étant perdue, deux grands courants se formèrent : le courant talmudique, moraliste et le courant kabbalistique ésotérique et mixturé de gnose alexandrine" (p. 28), le Talmud ayant oublié d'utiliser dans la Torah les lettres anormales et les kabbalistes (pour la gematria) les 5 lettres finales qui s'ajoutent aux 22 lettres. A partir d'une analyse serrée du bras de fer entre Moïse et les magiciens du Pharaon (autour de la question des divines proportions) et des compétences de Joseph et Daniel en matière d'interprétation des rêves, Bardet pose (p. 45) que les "Hébreux n'avaient rien à apprendre des Egyptiens ni des Chaldéens en matière de science divine" (ce qui est effectivement normalement le postulat de tout chrétien attaché à la Bible), ce qui lui permet de révoquer toute la numéralogie pythagoricienne prisée par l'ésotérisme français (Claude de Saint Martin, Papus), que Bardet considère comme fausse ("le pythagorisme est une véritable caricature de la Torah", écrit-il).

A la racine de l'erreur de la magie, nous dit Bardet, il y a l'acte de rébellion d'Eve qui, faisant confiance au serpent, croit qu'elle deviendra "comme Elohim", et, ce faisant, agit aussi sans référer à Adam qui est normalement sa tête (ce qu'a redit Paul dans sa première lettre aux Corinthiens). "C'est l'amorce du matriarcat, nous dit Bardet, période la plus funeste des sociétés humaines. La femme, physiquement plus faible cherchera ses pouvoirs dans le psychique, d'où les 'mille sorcières pour un sorcier' de Michelet" (p. 46).

J'ouvre ici une parenthèse pour noter que Bardet à la différence des Chrétiens d'inspiration hénochienne de nos jours (voir mon dernier livre là-dessus) identifie bien la faute d'Eve comme origine de la magie, et non pas l'union des Fils de Dieu/Veilleurs avec les Filles des hommes (Genèse 6:1-4).

L'opposition entre magie et mysticisme se découvre , nous dit Bardet, dans la différence entre le moment où Moïse extrait de l'eau en frappant un rocher de son bâton (Exode 17:5) avec un geste technique qui est celui du sourcier du cas où, dans Nombres 20:7, il est censé faire surgir de l'eau d'une seule parole sur ordre de Dieu (mais il commet ensuite l'erreur de frapper deux fois le rocher de son bâton de peur que cela ne marche pas...).

Venons en maintenant à la question de dédoublement, de la dualité, abordée dans le chapitre II, qui a déjà son principe dans la dualité entre le monde d'en haut et celui d'en bas ("sur la Terre comme au Ciel"). L'humain comprend le rouach (l'esprit, pneuma, la lettre pi, qui vient du he hébraïque), et le nefesh (l'âme vitale, psyché, psi, qui vient du shin hébraïque). Le rouach, pneuma, commande tout. Il est non localisé par essence. Le nefesh-psyché coordonne les plans de vie. "Grâce à elle peuvent s'exprimer instrumentalement les actes intellectuels et libres de notre pneuma...Elle assure, à l'étage végétatif, la continuité nécessaire à la chair. Enfin, elle peut, hors du corps, continuer à assurer la vie. Soit dans le cas des âmes séparées après la mort ; soit dans le cas du dédoublement." (p. 70,

Au passage Bardet condamne Descartes qui coupe l'âme-psyché-nefesh du corps, mais aussi CG Jung qui appelle "âme" (Seele) aussi bien le rouach que le nefesh. On pourrait au passage reprocher à Bardet dans son obsession de tout dédoubler d'oublier au passage qu'il existe aussi dans le judaïsme un troisième élément, la neshama, dont il ne parle jamais.

Attaché à la démarche empirique, justement à cause du dédoublement (qui pour Bardet n'est pas démoniaque mais très ordinaire), il s'intéresse à des cas comme Léo Ferrer, adepte du yoga, ou du réalisateur (qu'il présente comme un peintre) Guy Casaril , auteur dans la collection "Maîtres Spirituels" (Editions du Seuil) de "Rabbi Siméon Bar Yochaï et la Kabbale", qui faisait des sorties du corps par la tête. Il évoque la vision du double dans un brouillard bleuté, transparent, blanc ou blanc violet, l'élévation du double au dessus du charnel. Ce n'est pas une bilocation précise-t-il sauf que ce corps ne peut être touché sans quoi il serait blessé en réintégrant le corps (il rapproche cela du corps de Jésus ressuscité qu'on ne peut toucher en Jean 20:17).

Il ne faut pas que ce soit un dédoublement volontaire comme le font les gourous indiens. Genese 15:10 est mal traduit selon Bardet : c'est Abram lui même qui se divise. A juste titre il critique les expériences de projection dans l'astral des rosicruciens (AMORC) qui peuvent faire perdre la raison (d'ailleurs au 9ème degré de l'AMORC on ne se dédouble qu'à 30 cm). Avec un oeuf de 80 cm qu'ils font tourner les rosicruciens projettent dans cette forme leur double pour y rencontrer des larves astrales.

Puis Bardet évoque les âmes du purgatoire (qui est un état et non un lieu) qui vont rencontrer les vivants comme l'autrichienne Maria Simma. Celle-ci souffrait pour elles et ajoutait que les âmes catholiques souffraient plus mais moins longtemps que les protestantes. Elles ne peuvent rien faire pour elles-mêmes, seules les prières des vivants peuvent les sauver. Ensuite c'est au tour des anges de trouver place dans le livre avec des souvenirs de l'auteur sur son expérience de guerre en 1940 et sa visite au Padre Pio en 1952 à l'invitation de Raoul Villedieu (un ange matérialisé dans un corps le guida comme dans Tobie 12:19). Sur les anges déchus il renvoie à Giovanni Papini - son livre sur les démons dans l'art contemporain (p. 104). On trouvera ensuite dans l'ouvrage de Bardet une critique de la "bêtise" des entités spirites qui rappelle celle (plus inspirée) que fait Guénon, et une analyse expérimentale d'une canalisation de Lola Montès par une certaine Mme Laval de Montauban en 1932 et de celle de Suzon Clairac.

En venant aux exorcismes, JG Bardet estime qu'ils ne doivent être accomplis que par des prêtres irréprochables et que l'Eglise catholique les minimise trop maintenant du fait d'une surévaluation du rôle des démons qu'il y eut auparavant pendant la contre-réforme. Il cite longuement des exorcismes figurant dans un ouvrage de Mgr Léon Cristiani paru en 1959, ce qui est peut être une façon, me semble-t-il, de leur faire un peu trop de publicité. Une petite anecdote "Le brave Père Lamy, curé de La Courneuve, voyait souvent Satan dans un coin de son église et il l'apostrophait : 'va t en sale Bête !'. Alors Marie présente intervenait : 'Souviens toi que c'est un Prince' ". Le Père Lamy a sa fiche Wikipedia aujourd'hui. Je ne suis pas sûr que cette anecdote serve sa cause. Bardet aurait mieux fait de citer Bérule

Au total le chapitre II "La structure humaine" apparaît assez banal et sans grande envergure. Le chapitre suivant sur la magie (que l'auteur situe dans la sphère du paranormal, entre le surnaturel et le naturel, et dans laquelle il voit surtout un facteur de déséquilibre cosmique), est très marqué par la figure de Papus que l'auteur a lu lorsqu'il était lieutenant dans le Génie à Metz. Il insiste sur la nécessité de s'y livrer dans un cercle protecteur (circulus) après avoir été exorcisé selon le rite romain par les quatre éléments, avec sur soi un pantacle et de faire preuve d'ascétisme.

Faisons une mention de ses remarques sur le rapport de la magie à l'eucharistie car c'est un élément important du débat actuel (comme ça l'a toujours été) avec les protestants. Il rapporte l'expérience de Papus qui avait amené un sujet hypnotisé à la messe et avait vu une lumière sortir du coeur de fidèles pour aller entourer le prêtre au moment de la communion. Ce qui recoupe le propos du théosophe Arthur E Powell (que Bardet orthographie par erreur "AF Powel" il y a quelques coquilles de ce genre dans son livre...).... tout en ajoutant : "Mais ce que Powel ne précise pas, c'est qu'il n'y a aucune manifestation dans le cas des pseudo-évêques théosophes". La même expérience a montré aussi une condensation de lumière en provenance des fidèles sur les hosties protestantes (mais pas sur le pasteur), et le voyant orthodoxe a vérifié la même choses sur les hosties orthodoxes lors de la communion. Bardet dit (p. 144) refuser volontairement de rapporter les expériences de voyants catholiques pour qu'il n'y ait pas de soupçon de partialité. Et comme beaucoup de catholiques l'auteur rappelle que l'utilisation des hosties consacrées par les satanistes qui les détournent (c'est encore arrivé récemment au Canada) suffit à en prouver le pouvoir. Bardet évoque aussi des expériences pendulaires sur du pain béni. Selon lui, la force de l'eucharistie aurait dû dispenser Papus et les autres de pratiquer la magie.

"Au lieu de s'adresser à des esprits qui réclameront un lourd paiement différé, l'ami de Dieu - par la prière, par l'oraison, par le secret des pères du désert, s'adresse directement à l'Essence créatrice. Il renoue le contact perdu" et l'attitude apparemment passive du mystique est "la plus haute forme d'action" disait Bergson...

La magie s'est frayé un chemin au Moyen-Age sous couvert d'hébraïsme avec notamment Rachi de Troyes qui tirait profit de l'influence des foires de Champagne (Louis Chochod). Les chrétiens débattaient avec les rabbins, mais une fois découverte la kabbale, le concile de Latran IV impose l'étoile jaune en 1215, Saint Louis fait brûler le Talmud et l'Angleterre expulse les Juifs en 1290. En 1516 Venise crée un ghetto. Mais l'hébraïsme a déjà envahi l'Europe avec l'astrologie et l'alchimie "jusque dans les boucles d'oreille - à l'imitation des Maures et des Tsiganes - que portaient les Compagnons du Devoir".

Plus grave encore aux yeux de Bardet, les hérésies comme le catharisme dont le "consolamentum" provoque des décorporations sataniques calquées sur le Corpus Hermeticus (Jean Guiraud).

Bardet examine ensuite le Graal dont j'ai montré dans mon livre sur Barbara Aho qu'un courant évangélique (entre autres) lui prête une nature luciférienne. Pour Bardet il s'agit du Christ à double nature : shin (vert - Luc 23:31) et waw (rouge).

Selon Bardet, les Compagnons du Devoir détiennent un secret sur le Graal... Je pourrais développer le sujet dans un billet séparé. Mais cela me prendrait trop de temps et d'énergie, donc je préfère traiter la chose en quelques lignes ici même si cela risque de rendre le billet fort long. Disons que divers événements biographiques m'ont sensibilisé aux thématiques de Bardet sur le sujet. Concernant le Graal, j'ai vécu six mois à Troyes en 1994 (salut Valérie Gruyer et Héry Ramilijoana !) ce qui m'a sensibilisé à l'intérêt littéraire (sinon mystique). Et j'ai  connu les compagnons du devoir par le biais de la provençale New Age possédée dont je parle dans mon livre sur les médiums, j'ai même effectué une ascension initiatique de la Sainte Baume avec eux.

Jean-Gaston Bardet mentionne un "dit" (une tradition orale) des Compagnons du Devoir : "Le Saint Graal a été porté par trois tables, une ronde, une carrée et une bicarrée. Toutes les trois ont une même surface et leur Nombre est 21".

Bardet rappelle que les Compagnons sont nés dans la mouvance bénédictine et qu'une partie s'est compromise avec les Templiers : les "Enfants du Père Soubise, de Nogent-sur-Aube ou Nogent-en-Othe, composé exclusivement de charpentiers ("Bons-Drilles" ou "Passants") contre les "Enfants de Maître Jacques", qui ont été interpénétrés avec les Tziganes et les Francs-maçons, se réfèrent à la kabbale et effectuent leur Tour de France en sens inverse de celui des congrégations religieuses (pour mémoire il y a une statue de "Maître Jacques" de Molay, à la Ste Baume).

Le Compagnonnage bénédictin savait que la valeur du Shin est 21 (et non 300 comme dans la Kabbale et le tarot). Le Shin (corps du Christ) qui a la forme d'un vase utilise d'ailleurs les trois formes : ronde (le point sur l'axe), carrée (les têtes des Wawin), rectangulaire (la base). On renverra au livre (p. 162-163) pour la polémique mathématique que Bardet engage avec Raoul Vergez (dit "Béarnais") et Louis Charpentier sur l'exploitation du Shin dans les cathédrales.

Pour Bardet, le sens du Shin présent dans l'architecture de la cathédrale de Chartres (construite entre 1194 et 1220) s'est perdu ensuite dans l'art gothique par la "pénétration gnostique" substituant l'étoile magique au Tétragramme sacré.

Selon lui, la vérité originelle du Graal est dans ce savoir maçonnique bénédictin champenois autour du nombre, de la figure et du poids, que l'hermétisme spéculatif va défigurer en en faisant un objet de voyage alchimique, comme la Toison d'or, tandis que seule la Table ronde est conservée (sans les autres formes), "symbole d'égalité-fraternité", puis on ira même au XIII ème siècle jusqu'à y introduire de la magie celtique (Merlin) et même Alexandre le Grand, symbole du syncrétisme.

Shin est la lettre centrale dans le nom de Jésus au milieu du tétragramme : Y H Sh W H, et 21, sa valeur est la seule lame au tarot non numérotée au fronteau et le Shin y est surnommé "le Fou" à titre blasphématoire (Chochod). Tout homme normal a un shin à l'endroit au vertex et un shin inversé au pied et c'est l'inverse chez les satanistes (on renvoie à la p. 167 du livre pour une approche pendulaire des diverses dispositions de Shin chez des personnalités des années 1970).

Pour rapprocher le travail de Bardet de celui de l'évangélique Barbara Aho auquel j'ai consacré mon avant dernier livre, je dirais qu'ils partagent une même aversion pour le talmudisme, mais une même fidélité à l'hébraïsme originel revivifié par le sacrifice de Jésus-Christ. Cependant Bardet a un regard plus nuancé que la prédicatrice texane sur les Templiers dont il souligne l'utilité initiale. Toutefois il reconnaît des problèmes originels de symbolisme dans cet ordre (la croix renversée sur l'épaule gauche), le danger qu'il y avait à laisser une "armée coloniale" de ce type, même pourvue d'une règle de fer, évoluer "en vase clos", et le placement dans ces ordre, à titre de redressement, disciplinaire, de dignitaires cathares repentis. L'orgueil des Templiers à qui on put faire avaler qu'ils auraient des savoirs orientaux secrets sans en payer le prix, la compromission de Gérard de Ridefort, jusqu'à l'adhésion à la Sourate IV du Coran (Jésus n'est pas mort sur la croix), firent le reste ce qui explique que les Templiers aient ensuite volé à Constantinople en 1207 et caché le St Suaire (preuve de la crucifixion de Jésus) réapparu seulement en 1353 (46 ans après la dissolution de l'Ordre).

Pour Bardet, toutes ces magies prolongées par la rose-croix et la franc-maçonnerie recherchent le dédoublement psychique, le contact avec des entités, la promotion (comme les chrétiens sociaux) d'un Christ humain, dans la lignée de l'arianisme, au cœur même d'une France qui, placée sous le même archange (Michel) qu'Israël, est appelée à sauver le monde (p. 185). Papus avait déjà vu qu'en franc-maçonnerie, "les mystères du dédoublement conscient de l'être humain, ce qu'on a appelé la sortie consciente du corps astral... ont été développés pour constituer les degrés écossais, ajoutés par le Suprême Conseil de Charleston (en Caroline du Sud) vers 1802"... " et ces grades conduisant au dédoublement sont précisément, couronnés... par des grades Templiers" Cette maçonnerie "écossaise" était en fait américaine, et hébraïque avec la fondation du B'nai B'rith en 1843.

Tout cela n'est que supercherie pour Bardet car les dédoublements volontaires (magiques) ne font rencontrer que des "larves astrales". Le psychisme ne sort pas de lui-même (idem dans les exercices ignaciens des jésuites p. 305).

Le vrai dédoublement s'obtient par la voie ascétique (celle de la mortification) et la voie mystique (la mort spirituelle), qui est le renoncement à la volonté personnelle (St Jean de la Croix, Eze 1:12). Là la chair s'aligne sur l'esprit, mais l'esprit a encore à progresser et s'affranchir de ses propres frasques, et il doit continuer à progresser vers les demeures les plus intérieures de son château (Ste Thérèse d'Avila). La grâce de l'entrée dans la 5eme demeure peut advenir au moment le moins attendu par l'extase des Ténèbres comme ce fut le cas pour J de J qui n'était jamais passé par l'étape de l'oraison. Elle arrivait à tout moment à Anne Marie Taïgi (p. 334).

Une petite parenthèse à ce stade : un lecteur de ce blog qui a bien connu Gaston Bardet, me précise : "Gaston Bardet avait  demandé au docteur  Charles Villandre  un crucifix  reproduit d'après les  travaux du Docteur Pierre Barbet au sujet du  Linceul de Turin. Il me semble que ce crucifix était grandeur nature et comportait les détails anatomiques les plus précis révélés par  les photos en négatif de la Sainte relique. Gaston Bardet entendait  battre le cœur de Jésus à l'intérieur de cette très fidèle reproduction . C'est à partir de ce moment qu'il  ajouta  le prénom de" Jean" au sien propre: "Gaston". Dans ses livres, il parle de J de J. Il s'agit de lui-même soit "Jean de la Joie" Il avait en effet reçu les "grâces de jubilation" si bien décrites par Sainte Thérèse d'Avila."

On oublie trop souvent, nous dit Jean-Gaston Bardet p. 336, que l'intelligence puissante de St Thomas d'Aquin s'enracinait dans une propension très forte pour l'oraison. Il pouvait, sur cette base, se provoquer des extases à volonté comme beaucoup d'autres saints selon Richard de Saint Victor. Selon son biographe (Vita Sancti Tomae), Guillaume de Toccoprocureur du couvent des frères Prêcheurs à Bénévent représenté  en bas à gauche du tableau de Zurbaran ici , très sensible à la douleur, il se provoquait des extases en lieu et place de nos anesthésies, lorsqu'un chirurgien devait effectuer sur lui une opération chirurgicale. Bardet précise dans une note de fin de chapitre que lui-même a tenté d'entrer en extase pour une opération mais que cette initiative combinée aux effets de l'anesthésie l'a plongé dans une syncope bleue. Il pense que St Thomas était un homme à la peau fine comme les sélectionnait Swami Vivekananda pour en faire ses disciples.

P. 338 Gaston Bardet s'essaie à des observations médicales sur les effets de l'oraison. Il relève notamment l'apaisement des névroses, des angoisses, lié à un ralentissement de la vie végétative (ce dont, note-t-il, les taoïstes et les "yoguins" abusent). Il étudie aussi les maladies de l'Esprit que peuvent occasionner les extases mais aussi l'effet étrange de la communion spirituelle sur ces maladies comme une bronchite qu'il avait lui-même contractée dans une extase mais qui fut ensuite stabilisée pendant trois semaines au point que son médecin lorsqu'il l'examina pensa qu'elle n'avait que trois jours. Il condamne au passage le mot de "faiblesse" forgé par Ste Hildegarde pour les léthargies extatiques, y voyant les premiers effets funestes d'un humanisme naissant (le bébé qui s'endort contre le sein de sa mère vivrait-il dans la faiblesse ? demande-t-il).

Ces effets de l'oraison lui paraissent diamétralement opposés à ceux des "états hypnoïdes" (pratiqués en sophrologie, chez certains médiums etc) qui "consistent en un clivage de plus en plus accentués du cerveau antérieur (hémisphères cérébraux et cerveau intermédiaire ou diencéphale) et du névraxe : moelle et cerveau postérieur. Ce clivage  entraîne une dissociation de plus en plus grave de l'intelligence et de l'imagination, de la volonté et de la sensibilité, de la mémoire des concepts et de la mémoire des images, une suppression de la sensibilité, puis, progressivement, des cinq sens ainsi que de la motricité". Dans le sujet animal coupé de son cerveau antérieur, l'hypnotiseur peut insérer une image, une suggestion, comme fait le démon dans la tentation qui agit par l'imagination (cela une voyante me l'avait déjà dit...). Joseph Breuer sur cette base introduisait des images inconscientes dans le cerveau animal qu'il pouvait ensuite refaire surgir et manipuler. L'AMORC (le rosicrucisme américain) l'utilise pour plonger les adeptes dans des états qui les font rencontrer des entités.

Le magnétisme plonge aussi dans un sommeil comme l'hypnose mais sur un mode plus progressif. Bardet en décrit les étapes et témoigne qu'il a pu faire parler en anglais un sujet en état de cataleptie magnétique (p. 350) ce qu'il rapproche des cas de possession décrits par Mgr Saudreau, cité par L. Christiani (et cela est à rapprocher aussi du programme MK Ultra de la CIA). Cela conduit à des états de somnambulisme, perception à distance etc.

Au delà, c'est la dissociation du corps subtil (le "ka" égyptien) chère aux adeptes du yoga, et obtenu électriquement par le colonel de Rochas à l'aide d'une machine Wimhurst. Hector Durville les photographia. Le journaliste anglais adepte du yoga Paul Brunton (Raphael Hurst), a raconté son expérience dans la Grande Pyramide de Khéops de déboublement dans les années 1930, qu'il vécut comme un début de mort, avec une remontée de l'âme vers la poitrine et le cerveau et la sensation de basculer dans l'infini. Bardet explique en note de fin de chapitre que "son dédoublement inopiné provient sans doute des radiations dangereuses qui baignent le tiers inférieur de la Pyramide" (nb : sur les pyramides et l'électricité voir notre billet ici) et observe qu'ensuite Brunton n'aura que des expériences décevantes en Inde. Pour lui, c'est une expérience de psyché (nephesh), pas de pneuma (rouach). La part du nefesh qui sort est un ectoplasme froid, reptilien, sans intelligence, physique et donc affecté par le chaud et le froid (je vous renvoie à mon billet de 2018 dans lequel je relevais cette anecdote racontée dans la revue Smash Hits de 1988 par la chanteuse californienne bouddhiste ex-cocaïnomane Belinda Carlisle, de son contact en 1977 - à 19 ans - à Londres avec un ectoplasme froid).

Bardet revient ensuite sur les bilocations, celles du Padre Pio dont on a beaucoup parlé sur ce blog, celles de Mère Yvonne-Aimée de Jésus (aussi citée sur ce blog) celles du dominicain péruvien Martin de Porres, bilocations liées à une union supérieure avec le Dieu trinitaire. La même méthode d'opposition du mysticisme chrétien à la magie païenne et juive revient dans le chapitre VII sur la kabbale où il invoque l'autorité de St Bonaventure (et même des qaraïtes p. 406) contre Gershom Sholem et les tarologues.

Ceux qui se confrontent couramment au yoga, au New Age, à tous les coachs de "développement personnel" très en vogue en ce moment et de bien être pourront lire avec profit le chapitre VIII. « Approché par la Route de l’Est (identification), avait écrit en août 1948 Teilhard de Chardin dans "Comment je vois", l’Ineffable n’est pas Aimable. Atteint par la Route de l’Ouest (union), Il est dans la direction prolongée de l’Amour. Ce critère très simple permet de distinguer et de séparer comme antithétiques des expressions verbales presque identiques chez un chrétien et un indou » . Le penseur, nous dit JG Bardet, après s'être égaré dans une "synthèse philosophico-scientifique" et une aberration comme le "rôle cosmique de la sexualité" retrouvait ainsi la voie de la Trinité : aucun salut ne vient de l'Orient. La France après l'Allemagne (où la syllabe "oum" servait à conjurer depuis le XVIe siècle) est devenue en 1945 une terre de mission pour le yoga. L'opération nous dit Bardet était coordonnée par les francs-maçons qui savaient que la théosophie n'avait pas suffi à garantir l'importation du culte de la déesse mère sous nos latitudes (il s'appuie à ce sujet sur le livre de Jacques Lantier "L'extraordinaire aventure de la théosophie" paru en 1970). Le celtisme en Bretagne et au Canada n'est qu'un auxiliaire de cette tendance : "ce dernier pue l'hitlérisme sous couvert d'aryanisme", note l'auteur p. 420 qui cite un extrait non daté de la "Revue du Québec Libre" celtisante lequel disait : "Pourquoi parler des camps de concentration dans l'Allemagne national socialiste où, d'ailleurs, aucune chambre à gaz n'a jamais existé ?"...

Pas toujours ordonné dans ses démonstrations (c'est le moins qu'on puisse dire), JG Bardet fait un détour par la vie affective désastreuse des piliers du mouvement théosophiques que furent Helena Blavatsky, Annie Besant et Anne Kingsford. Puis il se confronte à la civilisation indienne : "Ce pays de mathématiciens, d'idéalistes - et non de mystiques, c'est à dire de réalistes - a dévié la notion d'éternité : Eternel Présent" (p. 422), tandis que les Indiens s'interdisaient justement de penser l'éternité en ajoutant des zéros (leur invention) aux années, ce qui entraîna un désespoir collectif devant le réel représenté par la doctrine de la réincarnation des bouddhistes et des jaïnistes.

Le Hatha-Yoga, nous dit Bardet, ne conduit pas à "servir" Dieu "mais à se transmuer en dieu par la violence de son énergie sexuelle, et le Jnana-Yoga n'est qu'un enfermement orgueilleux dans la connaissance de soi. Seul le Bakhti-marga comme recherche de l'unité avec le Bien-aimé trouve grâce à ses yeux. Il évoque au passage un échange qu'il avait eu avec le Swami Siddheswarananda qu'il avait rencontré dans les années 1950 pour lui dire qu'il se trompait sur St Jean de la Croix et qui mourut ensuite "très vite d'un cancer consécutif à ses pratiques" (p. 424).

Pour JG Bardet, le Hatha-Yoga consiste à "transmuer l'énergie due à la respiration et l'énergie sexuelle en énergie dite cérébrale", et il se livre à une analyse de l'énergie de nature électrique (qui est aussi celle des magnétiseurs) dont on constate la circulation avec l'acupuncture chinoise et d'énergies purement spirituelles dont le "gayographe" avec lequel il a travaillé pourraient enregistrer les variations. De ces énergies invisibles l'hindouisme dégage la notion de corps subtil mais qui n'est qu'une partie du corps glorieux chrétien et qui, bien qu'il survive au corps "lourd" après la mort physique, est voué à terme à la dissolution. Le Hatha-Yoga, union du soleil (ha) et de la lune (tha), est un travail sur la Kundalini-Shakti, le Serpente originelle (Alain Daniélou, Yoga, méthode de réintégration, L'Arche, 1951). "Aujourd'hui, le yoga qui nous est transmis n'est pas le yoga initial, le mode d'union de la Révélation primitive, mais le Yoga sexualisé de l'ancien matriarcat, c'est à dire la pire dégradation satanique de la Révélation de la Vierge Marie" (condamnée par le Concile d'Ephèse de 431 qui en la proclamant theotokos rompt toute confusion possible avec la déesse mère). La contraction du périnée (yoni) à la base des postures (asanas) n'est pour JG Bardet qu'une activation d'une vulve en tout un chacun, et un massage des parties sexuelles qui active une énergie laquelle conduit à des vibrations de l'hypophyse analogues à celle que provoquent le chant et la psalmodie - à ce stade on peut émettre une réserve : toute séance de yoga n'implique pas des contractions du périnée.

En bout de chaîne, aux yeux de Bardet, il y a le tantrisme, dernière invention indienne (selon Mircea Eliade, mais ce point est controversé) sous l'influence du taoïsme (je précise que cela est confirmé par Van Gulik). Pour JG Bardet qui s'inspire toujours des travaux de Daniélou qu'on a cités sur ce blog il y a 13 ans, il y aurait là une sorte de revanche du shivaïsme dravidien sur les vedas aryennes : "le sang noir l'a emporté (comme chez les Soufis) pour pousser à l'orgie" (sic). Cham qui s'est moqué de l'ivresse (mystique) authentique de son père, Noé, a bien mérité d'être maudit" (p. 434). Ce passage révèle une connaissance très superficielle du tantrisme, avec des clichés raciaux dignes de Benoist-Méchin, et du style de pensée très années 40 de l'administration vichyssoise. Sans doute le pire passage du livre.

Il y aurait selon Bardet une catalepsie yogique qui accélère le pouls là où les catalepsies de magnétiseurs fonctionneraient plutôt sur des ralentissements du pouls (mais là encore cette remarque ne correspond guère aux pratiques actuelles en Occident pour ce que je peux en savoir).

Pour terminer JG Bardet fait l'éloge de l'hésychasme, au moins dans sa version originelle car selon lui au Mont Athos, en Grèce, il est dénaturé par une volonté de "faire descendre la prière dans le coeur"... Il y a peu, comme je lui parlais de Bardet, un de mes lecteurs m'a adressé le "scan" d'une dédicace du livre de l'indianiste béarnais Jean Biès sur le Mont Athos (Editions Albin Michel) ainsi rédigée : "A Monsieur Gaston Bardet, qui me révéla, entre autres, dans son huitième chapitre de "Je Dors", le secret de la prière perpétuelle, je suis heureux de faire don de ce premier livre mien, - un essai sur nos frères séparés, une description d'un des derniers promontoires dominant encore l'An 2000. Jean Biès. Arros de Nay, 6 novembre 1963".

Jésus-Christ disait qu'on reconnaissait un arbre à ses fruits. Jean Biès, guénonien, s'est suicidé en janvier 2014, à l'âge de 81 ans, n'ayant pas supporté le décès de sa femme Rolande, qui était une admiratrice de la très jungienne Marie Louise von Franz... Disons le tout net : je ne suis pas très adepte de l'hésychasme (même si je défends évidemment la prière permanente mais sous d'autres formes), et cette affaire de suicide ne révèle pas une présence spirituelle très positive dans la maison de Jean Biès. Si Jean Biès est le "fruit" de l' "arbre" Gaston Bardet, il y a matière à s'inquiéter.

Un de mes amis orthodoxes me disait il y a quelques années qu'il y a danger à pratiquer la "prière du coeur" sans l'encadrement d'un Staretz. Je le crois volontiers. Gaston Bardet, lui, suggère de se préparer à l'extase mystique par la simple répétition mentale perpétuelle "d'une phrase mariale" (p. 480). "Une paix, purement psycho-somatique, commence à se faire sentir. Quand vient le soir, il ne faut plus rien faire qui puisse empêcher l'invasion de l'Esprit. Pour faciliter cette plongée, il faut se garder de faire oraison à genoux ou dans toute position nécessitant le contrôle de l'équilibre". S'asseoir dans un fauteuil, dans le silence, réciter avec un rythme lent, pendulaire, des litanies. "Ne rien chercher, aucun exercice touchant de près, ou de loin, à l'hésychasme et au yoga" (sans doute vise t il l'hésychasme "dégénéré" qu'il n'avait pas encore bien identifié en 1963 quand Jean Biès lui dédicaçait son livre). Pour finir il décrit les effets de cet abandon, et même les observations qu'il a pu en tirer au "gayographe"...La démarche même de se mettre dans un fauteuil le soir pour se rapprocher de Dieu parce qu'on l'a lu dans le livre de Gaston Bardet ne serait-elle pas en soi contraire au principe même d'abandon à la volonté du Créateur qui exclut par principe toute initiative ou tout "plan" personnels ? Nous terminerons ici la lecture sur cette question.

Voilà, en résumé (un résumé fort long j'en conviens mais je m'en servirai comme d'un aide-mémoire), le contenu du livre que je voulais vous exposer. A l'heure d'émettre une appréciation globale, il est difficile de juger l'expérience et le savoir exposés par Jean-Gaston Bardet. Beaucoup sont prompts à catégoriser "c'est de Dieu" "c'est du diable"... Au niveau théorique, on ne sait ce que vaut son travail sur le "shin" et sur le tétragramme. La volonté de travailler sur une langue réputée venir directement de Dieu, l'hébreu, en la soustrayant aux erreurs de la sorcellerie kabbalistique (et maçonnique) est louable. Je suis bien incapable de dire si elle est réussie (j'espère seulement que la connaissance de la kabbale par l'auteur n'est pas aussi biaisée que celle du tantrisme...). Au niveau pratique, les extases sont réelles. Sont-elles de Dieu ? On ne sait ce qu'il faut déduire du fait que Bardet mente à leur sujet en les imputant à un certain J. de J. alors que c'est lui qui les a vécues. Ce geste, en tout cas, lui, n'est pas de Dieu. De même on peut s'interroger sur l'impact de tout cela sur sa vie, son remariage avec une jeune femme, dont il eut une fille qui aujourd'hui étale ses états d'âme dans les médias du système 666, exactement dans le langage que ceux-ci veulent entendre. On sait que Ste Marguerite de Cortonne avait abandonné son fils en entrant au couvent : Mauriac reconnaissait que c'était l'ombre principale au tableau de sa sainteté. Est-ce que le sort donné à la progéniture est le critère de vérité d'une doctrine ? Question délicate de l'articulation entre théorie et pratique... Il est possible que Bardet ait été encore trop tributaire de Papus et des expérimentateurs de tout poil auxquels il ne faisait que tenter d'opposer un christianisme pur, puisque son christianisme lui-même se faisait expérimental et spéculatif, avec un pendule à la main. Le statut de sa recherche renvoie à celui de la recherche empirique. Y a t il une "science chrétienne" ? Faut-il fuir le travail mi-rationnel mi-inspiré autour du surnaturel ? On sait quel tribut la protestante Doreen Virtue paya au fait d'avoir grandi dans une famille adepte d'un mouvement américain qui se baptisait lui-même "science chrétienne" (elle attribue à cela son errance dans le "New Age"). Mais condamner l'observation expérimentale, n'est ce point également condamner St Thomas d'Aquin et même St Augustin qui lui aussi s'était interrogé sur les fantômes et les bilocations (voir ici) ?

Peut-être Augustin eut-il au moins la sagesse de ne pas consacrer des livres entiers à cela, et, après avoir vaguement soulevé les questions, laisser l'entière réponse à Dieu. Le livre de Bardet a en tout cas le mérite de présenter un état des connaissances assez érudit sur le parapsychisme et le surnaturel à la date du début des années 1970, avec une volonté sincère de ne pas céder aux sirènes de l'orientalisme, de la sorcellerie ou du New Age. A ce titre, il mérite une place dans nos bibliothèques.

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Sainte-Baume

7 Novembre 2015 , Rédigé par CC Publié dans #Sainte-Baume

Sainte-Baume

A signaler à propos de Sainte-Baume, du père Sébastien Michaëlis prieur de Saint Maximin : Histoire admirable de la possession et conversion d'une pénitente [Madeleine de Demandouls, autrement de La Pallud] séduite par un magicien... conduite à la Scte Baume pour y estre exorcizée l'an 1610... soulz l'authorité du R. P. F. Sebastien Michaelis ... commis par luy aux exorcismes et recueil des actes le R. P. F. François Domptius ,... Ensemble la Pneumalogie, ou Discours des esprits du susdit P. Michaelis ... corrigé et augmenté par luy-mesme, avec une apologie explicative des principales difficultez de l'histoire... Édition seconde - 1613

Le livre, dédié à la régente en hommage à Henri IV qui selon le père a préféré mourir que suivre l'avis des magiciens, et à son fils qui couronné à 8 ans comme Josias a vocation à faire preuve d'autant de piété que lui. Ce livre raconte jour après jour l'exorcisme de Magdaleine de Demandouls et Louyse Capeau par les dominicains, avec au milieu de cela un étrange dialogue de démons, un des démons repentis, Verrine, qui parle dans le corps de Louyse venant contredire un des cinq démons de Magdaleine, en servant la cause des dominicains sous l'influence des trois saints que l'un d'entre eux avait invoqués.De nombreux discours théologiques des démons, et des actions sur les possédées repentantes sont rapportés au jour le jour (à partir de novembre 1610) dans le cadre de cet exposé de l'exorcisme organisé comme une dramaturgie, pour légitimer l'issue finale : la condamnation au bûcher par le Parlement de Provence du confesseur marseillais Louis Gaufridi ou Ganfredi devenu sorcier qui disait ses messes en la synagogue, et qui aurait envoûté Magdaleine.

Une précision de Fortuné Chailan (1839) autour de Ste Baume : selon la tradition (cf le comte de Villeneuve) Madeleine exorcisée à 32 ans, serait restée un an avec Jésus, et 13 ans avec la Vierge à Ephèse avant d'arriver en Provence en 46 (à 46 ans) avec Lazare, Marthe, Maximin et quelques autres, serait restée 7 ans à Marseille puis 33 ans à Ste Baume. L'exposé de Chailan pour le reste s'attarde beaucoup sur la flore du massif. Dans la même veine on peut se reporter au récit de l'abbé Maille curé de Zacharie qui fait naître Marie-Madeleine douze ans après Jésus, et raconte sa jeunesse sur un mode très semblable à celui des visions d'Anne-Catherine Emmerich. L'histoire de son installation en Provence remonte à Julius ou Lucius Dexter contemporain de St Jérôme).

Papes et rois se sont succédés à Ste Baume qui aurait été sauvée en partie de l'extrémisme de la Terreur que par le zèle de Lucien Bonaparte (voir ses mémoires p. 49) et son adjoint, un moine défroqué surnommé "Epaminondas" (Pythagore avait été popularisé chez les prêtres au début du XVIIIe siècle par un bibliothécaire provençal à la cour de Louis XIV). On trouvera ici une description du lieu par le poête Pétrarque (mais la source n'est pas indiquée).

Une mise en garde de Barrès dans La Colline inspirée (1913 eds Emile-Paul Frères p. 3) à propos des lieux saints comme Lourdes, Ste Baume, le Mont St Michel : "Tout l'être s'émeut (...). C'est le sentiment religieux qui nous envahit. Il ébranle toutes nos forces. Mais craignons qu'une discipline lui manque, car la superstition, la mystagogie, la sorcellerie apparaissent aussitôt, et des places désignées pour être des lieux de perfectionnement par la prière deviennent des lieux de sabbat. C'est ce qu'indique le profond Goethe, lorsque son Méphistophélès entraîne Faust sur la montagne de Hartz, sacrée par le génie germanique, pour y instaurer la liturgie sacrilège du Walpurgisnachtstraum".

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Bric à brac ésotérique

7 Juillet 2014 , Rédigé par CC Publié dans #down.under, #Sainte-Baume, #Médiums

2011-0039.JPGDe nombreuses librairies ésotériques en France ont dans leurs rayons des ouvrages comme "La Numérologie révèle votre avenir" de Caroline Leroy (eds Exclusif), livres écrits en grosses lettres, avec peu de lignes par pages.

 

Celui-la comprend bien des approximations : Apollonios de Tyane mal orthographié (Caroline Leroy lui ajoute un "h"). L'auteure estime (p. 12) que "ses écrits manquent d'objectivité" (sic) alors que ce philosophe n'a laissé aucun texte, Philolaos est orthographié "Philocaos" (p. 13). Le livre nous dit que "Saint Augustin recommandera que la construction des églises romanes tiennent (sic) compte des structures géométriques harmonieuses" alors que l'art roman commence au XI sècle... à peu près 600 ans après la mort d'Augustin !

 

On y apprend que "le frère de Jésus, Jacques le Mineur dit aussi Simon le Zélote (le magicien), très proche des mages samaritains de Manassé et des thérapeutes de Qumran - communauté des gardiens de l'alliance fondée en 44 av. JC par Menahem, un essénien - grand père de Marie Madeleine. Menahem descend lui-même des prêtres asmonéens largement influencés par le pythagorisme (...). Les connaissances en arithmologie arrivent en France avec Simon le Zélote qui accompagne Marie-Madeleine puis elles transitent en Ecosse et en Irlande où les druides en feront grand usage".

 

Tout d'abord, on sait que les pythagoriciens ont influencé (sinon même créé) le druidisme via Marseille trois ou quatre siècles avant JC. Ensuite Qumran n'a pas été fondée en 44 av JC (date de la mort de César), on serait bien en peine de dater à l'année près ce genre de fondation et les historiens préfèrent la situer vers - 100 (alors pourquoi inventer 44 ? parce que le chiffre est joli ?). On voit bien que certaines évocations de la rencontre entre Jésus et Marie-Madeleine ont des relents pythagoriciens (l'image de Jésus écrivant sur le sable), en revanche l'apôtre Simon le Zélote évangélisateur des Berbères n'a rien à voir avec Simon le Mage, le gnostique, ni non plus avec l'arithmologie. Quant au lien entre Menahem l'Essénien mentionné par Flavius Joseph et Marie-Madeleine, il semble aussi gratuit que l'hypothèse qui fait de la sainte une prêtresse d'Isis.

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