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Les danseuses nues de Gadès (Cadix)

5 Août 2011 , Rédigé par CC Publié dans #Généralités Nudité et Pudeur

Pompeidance1.jpgCatherine Salles l'explique bien dans "Les bas-fonds de l'Antiquité" (p. 213) : "Il faut faire une place à part aux danseuses de Gadès, l'actuelle Cadix, dont les Romains font un des divertissements les plus recherchés de leurs banquets. Même si elles ne sont pas toujours de sang espagnol, elles exécutent des danses d'origine ibérique, dont la spécialité est d'éveiller l'érotisme des convives. Leurs castagnettes, leurs trémoussements lascifs, les cris obscènes dont elles scandent le balancement de leurs reins sont particulièrement prisés à Rome".

 

Elle cite à l'appui de cette remarque un texte de Juvénal (Satire XI, v. 162-175) : "Peut-être comptes-tu que les danseuses de Gadès vont se mettre à exciter les désirs par leurs chansons lascives et que ces filles, encouragées par les applaudissements, se laisseront glisser jusqu'au sol, en agitant leur croupe... Ce crépitement de castagnettes, ces parole dont aurait honte l'esclave toute nue qui se tient à l'entrée du bordel, ces vociférations obscènes".

 

L'art des danseuses de Gadès (Puellae Gaditanae) serait un peu supérieur à celui de la cabaretière syrienne (p. 207) ornée d'un turban grec qui fait "onduler des hanches au son du crotale, déjà ivre" (les crotales sont des sorts de castagnettes orientales).

 

Martial (VI 71) évoque la danseuse Telethusa :

 

"Telethusa, cette belle si habile à prendre des poses lascives au son des castagnettes de la Bétique, et à reproduire les pas des danseuses de Cadix ; Telethusa, capable de redonner du nerf au tremblant Pélias, et de réveiller les sens du mari d'Hécube, jusque sur le bûcher d'Hector ; Telethusa consume et met au supplice son premier maître : servante, il l'a vendue ; maîtresse, il la rachète aujourd'hui. "

 

Telethusa dansait-elle nue ?

 

Il existe un épigramme sur Telethusa qui peut le laisser penser, si cette Telethusa est bien la même  :

 

"Hic quando Telethusa circulatrix,
Quae, clunem tunica tegente nulla,
Sexum latius altiusque motat,
Crisabit tibi fluctuante lumbo:
Haec sic non modo te, Priape, possit
Privignum quoque sed movere Phaedrae."

 

Après la traduction initiale datant de 1890, de Leonard C. Smithers et Sir Richard Burton, une version plus récente dit :

 

"Quand Telethusa, cette petite pute des rues qui aime secouer son derrière nu / Bougeant son minou en haut et en bas, à gauche et à droite agitant sa chatte à la vue de tous ; / Elle t'émeuvra, Priape, elle te donnera chaud et même Phèdre ne peut lui résister."

 

On peut trouver sur le Net un texte intéressant qui laisse entendre que les danseuses de Gadès portaient un très mince vêtement à la taille ou plus vraisemblablement étaient nues (http://www.public-domain-content.com/books/classic_greece_rome/priap/prp107.shtml). Selon Gifford, la danse de Telethusa pouvait avoir un rapport avec le fandango tandis que des femmes esclaves ("tractatrices") masturbaient les spectateurs. Ce serait une sorte de fandango nu.

 

On peut se poser mille questions sur cette "école de danse" particulière qu'on trouvait à Cadix (Gadès en latin, Gadeira en grec). Et notamment si elle n'avait pas quelque chose à voir avec l'origine phénicienne de la ville (Gadir), puisque Cadix a été au monde Phénicien ce que Marseille fut aux grecs : la première fondation en Méditerranée occidentale, et l'avant-poste du commerce maritime dans cette zone barbare. Gadès avait-elle encore gardé quelque chose de phénicien à l'époque romaine - après tout ne dit-on pas qu'on parlait encore le punique à Carthage à l'époque de Saint Augustin ?

 

Le cas échéant, la danse des filles de Cadix aurait moins à voir avec le fandango qu'avec la danse de la cabaretière syrienne dont parle Catherine Salles, et serait donc beaucoup plus phénicienne qu'ibérique.

 

danseusesdaps.jpgLe Proche-Orient possède une longue tradition en ce qui concerne la danse nue. Dans un article d'octobre 2009, Andrea Deagon évoque les danseuses nues (vêtues de bijoux) en Egypte à partir d'une fresque du tombeau de Nebamun vers 1 400 av. JC. Selon elle il pourrait s'agir de "danses du ventre" mais elle reconnait ne pas en avoir la preuve (de même d'ailleurs qu'on ne sait pas s'il s'agit d'une image réaliste de banquet ici-bas ou d'une allégorie de banquets dans l'au-delà). La fresque d'époque romaine (2ème siècle de notre ère) qu'elle repère relative à une fête d'Apis lui paraît en tout cas cautionner l'idée qu'il y avait des danses du ventre (définies largo sensu) dans l'Egypte hellénistique. On note que les femmes y sont nues vêtues d'un voile transparent. Elle rattache ce style de danse explicitement aux danses syriennes et à l'école de danse de la colonie "syrienne" (selon ses propres termes) de Gadès.

Ces danses pourraient être en filiation (sur un mode profane) avec le culte phénicien d'Astarté (Ishtar) souvent représentée nue, et avoir un rapport lointain avec la hiérodulie proche-orientale, à Babylone et au-delà (la prostitution dans les temples, par laquelle les gens s'unissaient à la divinité - hiérogamie - et étaient possédées par elle, voir Hérodote à ce sujet).

Pour aller plus loin dans la réflexion sur la danse nue dans l'antiquité, on peut aussi lire du même auteur cet article.  

 

---  bailadoras desnuda Cadiz. naked dancers

http://mrstiff.fr/film/sophie-mae-enseigne-la-danse-du--6729525

http://www.sexyandfunny.com/watch_video/nude-belly-dancer_38108.html

 

 

 

 

 

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