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La multiplicité intérieure

30 Mai 2025 , Rédigé par CC Publié dans #Philosophie, #Otium cum dignitate

Il y a vingt et un ans, je publiais "Individualité et subjectivité" chez Nietzsche. Ce livre reprenait mon mémoire de maîtrise soutenu à la Sorbonne. Ma conversion au christianisme, après être passé par les mains des médiums, a gardé un aspect de mes convictions nietzschéennes : l'attachement à la multiplicité méta-subjective et au devenir.

La société nous éduque à devenir "un". Répondre de nos actes, répondre du rôle qui nous est assigné. Depuis l'enfance. Moi, vous le savez (je l'ai raconté dans "Incursion en classes lettrées"), je suis fils d'ouvrier. Pas seulement fils d'ouvrier. Enfant de la guerre civile espagnole par mon père, héritier du long naufrage d'une famille de propriétaires terriens aragonais très chrétiens, descendant de mystiques d'outre-Pyrénées, et, par ma mère, fils du terroir béarnais, de ses coteaux et de son désespoir silencieux. Je n'ai jamais pu me plier à un rôle, pas même celui de premier de la classe que j'avais accepté d'endosser superficiellement pour venger l'échec existentiel de mes parents. J'étais chahuteur au fond de la salle de cours, jamais servile à l'égard des institutions. Savez vous que le mois où le livre sur Nietzsche était commercialisé je refusais l'invitation àaller parler à une tribune universitaire de mon précédent ouvrage "Une communauté dans un contexte de guerre", un livre collectif que j'avais dirigé sur les émigrés serbes ? J'avais préféré envoyer Marina Glamotchak à ma place. Il y avait plusieurs raisons à ce choix, mais mon refus des rôles, ma multiplicité intérieure y furent pour beaucoup. Marina avait dit que c'était à moi de "cueillir les fruits" du succès du livre. Je n'ai jamais voulu cueillir aucun fruit. Quand un livre est écrit, il est derrière moi. Je n'avais aucune envie de devenir un spécialiste de l'ex-Yougoslavie, des migrations ou que sais-je encore. Ce livre payait une dette morale à l'égard de certaines personnes. Une fois la dette acquittée, j'étais libéré.

Les succès et les rôles enferment. Souvent j'ai eu des gestes de "charité" (au sens profond de "caritas") envers les gens placés sur mon chemin. Mais je ne suis jamais demeuré au point où ces actes pouvaient m'enfermer.

Parce qu'il y a une multiplicité, un flux, qu'il ne faut pas arrêter. Ca peut être douloureux, et parfois un peu jubilatoire, mais en tout cas ça ne doit pas être fixé. Le monde vous assigne un rôle, vous demande des comptes. Il en demandera de plus en plus à travers l'identité numérique, l'intelligence artificielle, la robotisation des vies, et la dictature politique qui s'impose de plus en plus. Mais Dieu nous libère de cette "unidimensionnalité". Il nous donne une morale comme boussole, mais, pour le reste, il laisse le pluriel agir en nous. Dans notre pauvreté, dans notre silence. On n'est jamais aussi multiple que dans le silence. quand tout n'est plus que nudité, renoncement, pure virtualité.

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Genèse 6 rapproché de l'hermétisme

27 Mai 2025 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire des idées, #Histoire secrète, #Pythagore-Isis, #Alchimie

Mon livre sur les Nephilim explore l'exégèse purement biblique du 6e chapitre de la Genèse. Mais Jean Borella, dans Problèmes de gnose p. 59, rappelle qu'il en existe une versant hermétique.

Il cite René Guénon, dans Le Règne de la quantité et le signe des temps, Gallimard p. 257-258 qui rattache les origines du satanisme à la disparition de l’Atlantide – dont la tradition égyptienne fut en partie l’héritière – et « aux données symboliques » fournies par Genèse 6

Ce texte explique l’union de certains anges avec les « filles des hommes ». Or un texte parmi d’autres dans la tradition hermétique met en rapport Seth-Typhon avec cet « événement mystérieux » : Isis la Prophétesse, y révèle à Horus qu’ « au moment où il allait partir pour la lutte contre Typhon (…) un des anges qui résident dans le premier firmament, l’ayant vue, voulut s’unir à elle dans un commerce d’amour » (Opuscule d’Isis à Horus 1 trad de AJ Festugière, La Révélation d’Hermès Trismégiste, Gabalda 1944, t1 p. 256 258

« Il s’agit évidemment, ajoute Borella, de la désignation symbolique d’une descente d’énergie du niveau spirituel au niveau psychique, d’une chute du céleste dans le terrestre et de sa commixtion profanatrice avec lui » (Borella renvoie au Livre d’Hénoch qui rattache l’événement au temps de Yéred qu’il rattace à l’étymologie yârad (descendre)

« Et la Bible met directement cet événement en rapport avec le déluge qui, selon Guénon, correspond à la disparition de l’Atlantide » (dans Formes traditionnelles et cycles cosmiques, p. 49)

Pour aller un peu au delà de ce résumé de Borella, j'ai retrouvé le passage exact de l'opuscule qui est ici


"I. xiii. — ISIS A HORUS
 Isis la Prophétesse à son fils.

1. Isis, la prophétesse à son fils Horus: Tu devais t’éloigner, mon enfant, et aller combattre contre l’infidèle Typhon, pour le trône de ton père. Moi-même m’étant rendue à Hermonthis, ville (où l’on cultive) l’art sacré de l’Égypte, j’y ai passé un certain temps. D’après le cours des circonstances, et la révolution nécessaire du mouvement des sphères, il arriva que l’un des anges qui résident dans le premier firmament, m’ayant contemplée d’en haut, voulut s’unir à moi. Il s’avança, se disposant à en venir à son but: mais je ne lui cédai point, voulant apprendre de lui la préparation de l’or et de l’argent. Comme je l’interrogeais là-dessus, il me dit qu’il ne lui était pas permis de s’expliquer à cet égard, vu la haute importance de ces mystères, mais que le jour suivant, il viendrait un ange plus grand, l’ange Amnaél, et celui-là serait en état de me donner la solution de la question.

2. Et il me dit que celui-là porterait un signe sur sa tête et qu’il me montrerait un petit vase non enduit de poix, rempli d’eau transparente. Il (ne) voulut (pas) révéler la vérité.

3. Le jour suivant, lorsque le soleil était au milieu de sa course, apparut l’ange Amnaél, plus grand que le premier; pris du même désir à mon égard; il descendit vers moi, il ne resta pas immobile, mais se rendit en hâte au lieu où je me tenais; et moi je ne cessai pas de m’informer de la question.

4. Et comme il tardait (à me répondre), je ne me livrai point, mais je contins son désir jusqu’à ce qu’il m’eût fait voir le signe qu’il avait sur la tête et qu’il m’eût transmis sans réserve et avec sincérité les mystères que je cherchais."

On rappellera que Guénon dans Le Règne de la Quantité (p. 207) relie la métallurgie à la basse magie à cause du lien avec les planètes du système solaire (voyez là dessus Lili Kolisko).

A titre personnel j'ai tendance à penser que ce texte alchimique du IIIe siècle est tout de même assez éloigné de Genèse 6. Le seul point commun intéressant tient au fait qu'il s'agit d'anges haut placés dans la hiérarchie céleste, mais il peut s'agir d'un emprunt pur et simple au judaïsme très présent dans l'Egypte ptolémaïque et romaine. Le vocable Amnael lui-même évoque une construction hébraïque. Ou bien il peut s'agir comme le dit Borella d'une forme allégorique ad hoc, adaptée au propos alchimique, mais qu'il est probablement abusif d'étendre à l'histoire cosmique. D'ailleurs c'est Borella qui fait le lien avec l'Atlantide et pas, comme il l'affirme, Guénon dans Le Règne de la Quantité

Avant lui, le célèbre chimiste et homme politique Marcellin Berthelot avait fait de même dans son livre "Les Origines de l'alchimie" (1885). Celui-ci précisait :

" Les Saintes Ecritures rapportent qu'il y a un certain genre de démons ayant commerce avec les femmes. Hermès en a parlé dans ses livres sur la nature. Les anciennes et saintes Ecritures disent que certains anges, épris d'amour pour les femmes, descendirent sur la terre, leur enseignèrent les oeuvres de la nature; et à cause de cela ils furent chassés du ciel et condamnés à un exil perpétuel. De ce commerce naquit la race des géants. Le livre dans lequel ils enseignaient les arts est appelé Chêma : de là le nom de Chôma appliqué à l'art par excellence. » Ainsi parlait Zosime le Panopolitain, le plus vieux des chimistes authentiques, exposant les origines de la Chimie, dans son livre Imouth (c'est-à-dire dédié à Imhotep, dieu égyptien), livre adressé à sa soeur Théosébie. Ce passage est cité par Georges le Syncelle, polygraphe grec du VIIIe siècle (reproduit dans les Eusebiana de Scaliger p. 834 - Ed Goar 1852).

D'autres nous disent que ces œuvres de la nature, maudites et inutiles, enseignées par les anges tombes à leurs épouses, étaient l'art des poisons, des secrets des métaux et des incantations magiques (Tertullien).

Le nom du livre Chêma se retrouve en Egypte sous la forme Chemi, titre d'un traité cité dans un Papyrus de la XIIe dynastie et recommandé par un scribe à son fils (Masperc, Histoire ancienne des peuples de l'Orient, p. 125). Il est probable que le sujet en était tout différent. C'était un vieux, titre, repris plus tard pour s'en autoriser, comme il est arrivé souvent dans l'antiquité.

Quoiqu'il en soit, le passage de Zosime est des plus caractéristiques. Sans en conclure, avec les adeptes du IIIe siècle, que l'alchimie était déjà connue avant le déluge (3), il est certain qu'il nous reporte aux imaginations qui avaient cours en Orient dans les premiers siècles de l'ère chrétienne. Isis, dans son discours à son fils Horus, autre ouvrage alchimique des plus anciens, raconte également que la révélation lui fut faite par Amnael, le premier des anges et des prophètes, comme récompense de son commerce avec lui.

Quelques lignes étranges du chapitre V de la Genèse, probablement d'origine babylonienne, ont servi de point d attache à ces imaginations.(…) Les auteurs.du n° et du 111e siècle de notre ère reviennent souvent sur cette légende. Clément d'Alexandrie la cite (vers 200 de notre ère) dans ses Stromates, I. V, Tertullien en parle longuement (De Idolatria IX, D, De cultu feminum X, De cultu veminarum I, II, B). "

Berthelot souligne que Tertullien rapproche l'expulsion des anges du ciel de celle des mages de Rome de son temps, et y voit un signe de la méfiance des autorités religieuses de tout bord à l'égard des aspirations de la première science (tout aussi chimérique qu'elle soit aux yeux de Berthelot) à libérer l'homme.

Rappelons que Borella tient Clément d'Alexandrie pour le plus grand détenteur de la gnose chrétienne authentique au sens où Saint Paul l'entendait.

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Coupeurs de feu dans les hôpitaux

27 Mai 2025 , Rédigé par CC Publié dans #Médiums

Dans l'ambulance qui me conduisait à Toulouse hier le jeune chauffeur me racontait : "Au centre hospitalier de Pau, en pédiatrie, ils emploient un hypnotiseur pour remplacer l'usage du gaz hilarant chez les enfants ; il est aussi coupeur de feu ; il a fait des prodiges sur la main brûlée de mon fils"

Je lui ai appris que les coupeurs de feu devaient leur "don" à une formule. Je ne suis pas allé jusqu'à lui dire qu'il y avait une prière à Judas dans cette formule...

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Encore une star qui s'assimile à une sorcière

15 Mai 2025 , Rédigé par CC Publié dans #Otium cum dignitate, #Médiums

Il y a quelque chose de touchant dans cette interview (ci-dessous) sur BFM TV de Brigitte Bardot qui, à 90 ans, a des expressions du visage, des gestes de ses 25 ans.

A la minute 8'31 elle laisse échapper : "S'il y avait la tradition, il y a belle lurette qu'on m'aurait brûlée comme sorcière. Heureusement que certaines traditions n'existent plus".

Rappelons que Brigitte Bardot, qui a autorisé la commercialisation d'un tarot divinatoire à son nom (cf à droite), a son nom relié dans la chanson "Initials B. B." de Gainsbourg au roman de Pauwels sur la religieuse possédée Magdeleine de la Croix de Cordoue qu'elle lui avait conseillé de lire.

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Pluralité des christianismes

9 Mai 2025 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire des idées

Pour les Béotiens, ici un bon topo de Marie-France Baslez (que je lis depuis 1998) sur la pluralité des christianismes : l'affrontement des patriarcats d'Alexandrie et Antioche sur la christologie (une seule ou deux natures ?), l'imposition des dogmes par décrets impériaux, les querelles en Occident sur le salut (par la foi ou par les oeuvres ? Saint Jacques ou Saint-Paul ? Saint Augustin ou Pélage ?), le problème de l'Eglise dans la Cité. Attaché à l'oecuménisme (mais pas à n'importe quel prix doctrinal), j'ai écouté avec intérêt cette conférence.

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