L'évangélisation de la Gaule
Une conférence d'Arnaud Boüan du Chef du Bos, de la congrégation des Petits frères du Sacré-Cœur, qui pose beaucoup de questions. Son site est ici.
En gros Arnaud Boüan, inspiré par les Petits Bollandistes, reprend toute l'histoire soi-disant légendaire de l'évangélisation des Gaules au Ier siècle à laquelle on a cru pendant longtemps (alors que les universitaires reportent maintenant cette évangélisation au IIIe siècle) et essaie de voir comment elle fait système et jusqu'à quel point dans sa logique intrinsèque elle peut être crédible.
On auraît parmi les premiers évangélisateurs du Nord au Sud : Saint Lucien à Beauvais, Drennalus à Morlaix, Exupère à Bayeux, Nicaise à Rouen, Denis à Paris, Memmius à Châlons en Champagne, Sixte à Reims, Cléments à Metz, Materne à Cologne, Euchère en Germanie inférieure, Clair à Nantes, Julien au Mans, Gatien à Tours, Aubin à Orléans, Ursin à Bourges, Andoche à Autun, Bénigne à Dijon, Lin à Besançon, Eutrope à Saintes, Martial à Limoges, Austremoine à Clermont, Pothin à Lyon, Amadour à Bordeaux, Front à Périgueux, Saturnin à Toulouse, Trophime à Nîmes, Ste Marthe à Tarascon, St Maximin à Avignon, St Lazare et Marie Madeleine à Marseille, Aphrodisius à Béziers, St Paul dans les Pyrénées.
St Pierre a envoyé 7 apôtres : Trophime, Saturnin, Maximin, Austremoine, Martial, Gatien, Materne. Ce premier envoi est raconté par Grégoire de Tours dans la Gloire des Martyrs, on est sous le règle de Claude, ce sont des disciples directs du Sauveur. Et il y eut ensuite un second envoi par Clément de disciples des apôtres.
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Ces envoyés ont à nouveau leur filiation. Certains de ces saints ne sont pas connus. D'autres selon la tradition sont cryptés dans l'Evangile. par exemple Martial est le petit garçon qui apporte cinq pains au Sauveur (Matt 18:3). On le surnomme "l'apôtre des apôtres". Certains sont arrivés dès 72 ap JC, et il y a aussi des apparitions mariales dès le Ier siècle (ND du Puy, ND des Champs, ND de Bethléem - apparue à Saint Savinien à Sens - ).
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La conversion des élites romaines est importante aussi. Par exemple Silanus, bourreau de Sainte Valérie, convertie par St Martial à Limoges. Valérie était la petite fille de Lucius Capreolus, héros de la guerre de Cantabrie, et la fille de Léocade et de Suzanne (nom d'inspiration judéenne), la fille de Manilius Armillus, ex-lieutenant du proconsul des Gaules dans le Berry (que bizarrement en minute 7'22, Arnaud Boüan qualifie Suzanne de "duchesse d'Aquitaine de l'époque", ce qui est un anachronisme). Junius Silanus, cousin de Claude, proconsul d'Aquitaine en 42, avait été proconsul d'Aquitaine et aurait participé à la campagne de Bretagne. A son retour, il découvre que sa promise, Valérie, est devenue une vierge consacrée. Il la fait décapiter en 46 (c'est une sainte céphalophore). Silanus s'est ensuite converti. Cela a fait un gouverneur romain converti.
Les éléments convergent dit Arnaud Boüan. Les évangélisateurs sont des très proches des apôtres. Crescent, premier évêque de Vienne est un proche de Paul (mentionné dans Tim 4), Sergius Paulus, proconsul à Chypre, premier évêque de Narbonne (il aurait accompagné Paul à Narbonne, puis revenu à Chypre, il reçoit après la persécution de 66 sous Néron l'apparition posthume de Paul qui lui dit de s'occuper de Narbonne tandis que Barnabé s'occupera de Chypre). L'Eglise de Lyon est liée à Jean.
Véronique (Bérénice) née à Bazas (Cossium) en Aquitaine, servante chez un centurion romain suivit celui-ci et son épouse à Jérusalem quand le soldat y fut nommé. Quand ses maîtres retournent en Aquitaine pour fuir des persécutions (car Véronique les a convertis), Elle accompagne Saint Martial dans son travail d'évangélisation. En 1140, Garcias, évêque de Bazas dans son Baptista Salvatoris a expliqué que Véronique avait recueilli le sang de Jean le Baptiste avant que la hache ne s'abatte sur son cou. Michel Bourrières, professeur au collège des Petits Carmes à Cahors et spécialiste de Rocamadour allait avancer en 1895 que Véronique avait sûrement des origines juives.
St Philippe a aussi évangélisé la Gaule selon Isidore de Séville dans l'expédition de 63, En 69, Saint Clair (l'abbé Travers disait que c'était un Romain venu à Nantes par l'Aquitaine) a été converti par Saint-Pierre. Bouan tient de soeur Maryvonne historienne au Carmel de Morlaix que Drennalus envoyé par Joseph d'Arimathie (d'origine britannique car il faisait du commerce entre cette île et la Judée, ce qui faisait sa fortune, ce qui explique qu'il évangélisât Gastonbury) avait le premier évangélisé à Morlaix. St Maximin évêque d'Aix-en-Provence pendant 40 ans a été envoyé avec Joseph d'Arimathie par Saint Pierre en 63 (il faisait partie des 12 disciples envoyés). Il se serait arrêté à Rennes (Condate) avec Saint Luc et Suffrenus pour fonder l'évêché de Rennes.
Sainte Marthe a été enterrée par Saint Front (qui lui avait rendu visite à Tarascon quelques années plus tôt). Front, israélite du Mont Carmel,peut-être ancien soldat d'Hérode, qui fut un des 72 disciples présents à la Pentecôte accompagna Pierre à Rome. Evêque de Périgueux(Vésone), il participa aux funérailles de Marthe par bilocation.
Léon Dubois (1873-1959) le raconte ainsi :
"Le corps de la Sainte était exposé dans l’église qu elle même avait fait construire. Tout était prêt pour la sépulture, lorsque le Pontife allait célébrer, à Vésone, le Saint Sacrifice. En attendant le peuple, il se tenait recueilli à sa place. Tout à coup Jésus lui apparaît et lui dit : « Mon « fils, venez et accomplissez la promesse que vous avez a faite d’assister aux obsèques de Marthe, mon hôtesse. » Il dit, et tous les deux, en un clin d’œil, sont transportés à Tarascon auprès du cadavre de la Vierge de Béthanie qu’ils mettent dans le tombeau, au grand étonnement de la foule".
Arnaud Boüan retient aussi cette bilocation (prouvée par le gant et l'anneau de St Front que les gens de Périgueux ont pu aller récupérer à Tarascon). (minute 14')
Pour lui le fait qu'on ait retrouvé en 1943 une statue de déesse romaine brisée près de ND de la Délivrande en Normandie prouve que le récit de la tradition sur le remplacement du culte de Démeter par Regnobert était authentique.
Le nom des cathédrale Saint Etienne, premier martyr mort en 35, est lé au fait que les premiers évangélisateurs de la Gaule, Saint Martial, Saint Front, Sainte Véronique ont assisté à sa lapidation.
Dans un sermon St Augustin dit qu'en Afrique du Nord il y a une pierre qui a servi à lapider le martyr à son coude droit. On trouve des églises qui disent avoir ce genre de pierre dans le Médoc et à Limoges. Les cathédrales de Limoges, Metz, Auxerre, Sens, Bourges, Toulouse, Châlons, Toul, Agen, Cahors, Saint-Brieuc sont dédiées à St Etienne.
Au moment du martyr de Saint André, Saint Martial est à Bordeaux en 62, il reçoit l'apparition de Saint Pierre qui lui dit que son frère André vient d'être crucifié et de la lui dédier (source le dominicain Bernard de la Guionie/Bernardus Guidonis, ou Bernard Guy, dominicain évêque de Lodève vers 1300, qui dit aussi que Martial avait amené en Gaule du sang d'Etienne).
Pour la cathédrale Saint Pierre, à Poitiers, Jean Bouchet, dans ses Annales d'Aquitaine de 1557, rapporte qu'un jour que Saint Martial distribuait au peuple de Poitiers la parole de Dieu, la voix du Sauveur se serait fait entendre tout à coup, et en lui annonçant le martyre de saint Pierre (en 64), consommé à l'heure même dans la ville de Rome, elle lui aurait ordonné de "faire cy une église" en son honneur; ce que Martial aurait entrepris aussitôt.
Saint Amadour, envoyé à Rome 2 ans avant cela pour rendre compte de la situation en Aquitaine assiste au martyre et revient ensuite à Limoges avec des reliques, notamment a ceinture de St Pierre au moment de sa mort, des cheveux et un des clous (19ème minute). Des cathédrales St Pierre viennent ensuite en second (à Nantes, Beauvais, Rennes, Troyes, Angoulême) correspondent à la 2ème évangélisation.
Une fresque du palais papal d'Avignon montre la prédication du Sauveur devant Martial (né en 15), enfant de la multiplication des pains, son père et sa mère. Ils font partie de la tribu de Benjamin comme Etienne. On voit aussi son baptême. Il y a des représentations de l’apposition de la main sur son crâne. Le reliquaire de Limoges du chef de Saint Martial porte la trace de cette main.
Les témoins de la passion comme Martial et Véronique n'ont pas subi le martyre. Martial eut Alpinien et Austriclinien comme co-adjuteurs.
Ste Bénédicte à Bordeaux est la femme d'un gouverneur (Sigisbert) qui persécuta en 44 St Front et qui alla trouver St Martial pour guérir son mari tombé malade. Martial (30ème minute), convertie selon les Actes d'Amadour aussi sous l'influence de Véronique et Amadour devenus ermites à Soulac (comme Marthe l'était à Tarascon). Elle reçut le bâton d'évêque de Martial avec lequel elle réalisa des miracles (ce bâton allait en permettre jusqu'à la Révolution).
Arnaud Bouan admet que la conversion de gouverneurs permettait l'entrée des autorités chrétiennes dans les villes (auparavant des prieurés étaient construits hors de la ville tant que des autorités païennes gouvernaient la province).
Le tombeau de Ste Véronique est à Bordeaux (le corps a été enlevé de Soulac au moment des raids vikings). A Bazas la décollation de Jean-Baptiste fait partie des armes de la ville. Des vitraux à Bordeaux du XIXe siècle racontent toutes ces histoires.
Zachée, le publicain des Evangiles, est identifié à Amadour ("Amateur du Roc") par les traditions locales, et fut compagnon de Martial en Gaule. Le corps d'Amadour fut retrouvé intact en 1166 au seuil de la chapelle ND de Rocamadour. Arnaud Bouan fait siennes toutes les légendes, même celle consignée par le carme Bonaventure de Saint Amable des lettres de Martial à Zachée retrouvées sur le corps d'Amadour. Pour lui tout comme la déesse mère de St Aubin authentifie l'histoire traditionnelle de ND de la Délivrande en Normandie, une stèle au musée de Bordeaux disant "Arula a fait ce présent à Jupiter ; Saint Martial l'a consacré avec le temple et le vestibule" serait la preuve de l'apostolat de Marial."
A noter que Bonaventure de Saint Amable dit aussi qu'après avoir converti le gouverneur de Bordeaux Saint Martial réduit le paganisme au Pays Basque et en Béarn sous le règne de Néron en étant passé par Agen, puis obtient la conversion d'Austris, fille du cruel gouverneur de Toulouse Marcel qui avait avait supplicié l'évêque Saint Saturnin. Arnaud Bouan ne va pas jusqu'à suivre les traditions jusque là.
Je ne pense pas que ce conférencier rende vraiment service aux traditions en tentant d'évincer tout regard universitaire laïque sur elles, mais il a le mérite de faire connaître les discussions qui ont duré pendant des siècles sur l'action des disciples directs de Jésus et des douze apôtres en Gaule, discussions qui ne reposaient pas forcément que sur du vent. Et surtout, sa conférence peut être le point de départ d'une puissante méditation sur la notion de "militia dei".
Eglises parallèles : encore un témoignage
Encore une tranche de vie narrée par une dame qui attendait avec moi dans ma chapelle préférée avant-hier, et qui montre les dangers de certaines églises parallèles
La dame attendait, cheveux très courts, visage buriné. Elle s'appelle Monique, née en 1946, comme le père Mathieu.
Je lui ai demandé comment elle avait connu la chapelle. Son histoire est étrange. Elle vient pour la seconde fois. Au départ, il y a quelques semaines, c'est une bénévole d'Emmaüs qui lui a indiqué la chapelle. Quand elle y est arrivée, elle a eu une étrange impression : elle connaissait déjà ce lieu. Et effectivement : elle avait déjà vu le P. Mathieu il y a plusieurs années, mais entretemps elle avait oublié cette rencontre. Mais le P. Mathieu, lui (probablement guidé par quelque force) a immédiatement retrouvé dans son fatras la lettre qu'elle lui avait envoyée à l'époque, avant de "partie dans le Sud", puis de revenir en dans sa région.
J'ai dit que moi j'étais venu sur les conseils d'une médium en 2015 et que j'y revenais fréquemment. J'ai voulu en savoir plus sur cette dame, parce que je soupçonne qu'on ne vient jamais complètement par hasard par ce genre d'église.
Voici ce qui pousse cette dame (Monique) à venir. Elle vient pour sa fille quadragénaire qui a un cancer. Mais elle ne le dit pas à cette fille qui n'aime pas la religion et "ne croit en rien".
Toujours en creusant davantage, on comprend pourquoi la fille "n'aime pas la religion" (on devrait plutôt dire, en rectifiant les propos de sa mère : elle n'aime pas les églises parallèles).
En évoquant devant la dame le cas de l'église Ste Marie de M*, celle-ci m'a révélé qu'elle avait eu un rapport très fort à ladite église dans sa jeunesse.
Voici son histoire. Monique s'est mariée à 16 ans, en 1962, avec un homme qui lui a fait deux enfants et qui est parti assez vite.
Elle a élevé ces deux enfants puis au début des années 1980, elle a rencontré un homme qui se disait le "fils spirituel de Mgr C*", le fondateur de l'égise Ste Marie. Ils se sont alors mariés (c'était des secondes noces pour elle), dans cette église et ont eu une fille (celle qui a aujourd'hui le cancer). Mais ce type (Christian) était louche. Violent, "bisexuel" (elle range tout ça dans la même catégorie apparemment). Monique a dû très vite le quitter et la fille n'a pratiquement pas connu son père.
Quelques années plus tard, Monique a appris en lisant le journal local que son Christian était mort assassiné au révolver par sa maîtresse, la secrétaire d'un avocat, qui finalement allait être acquittée (le mobile passionnel a été retenu, la meurtrière était enceinte et ne supportait pas d'être trompée). Triste fin pour un protégé de Mgr C*.
Depuis lors Monique vit seule. Elle a un peu peur des hommes qui l'ont beaucoup trahie, et puis elle pense aussi que quelque chose en elle les fait un peu fuir.
Mais son histoire avec les églises parallèles ne s'arrête pas là.
Il y a quelque temps (on ne sait pas quand), elle a commencé à fréquenter une autre église, près de B* où habite une de ses petites filles, au L* . C'est une chapelle mieux entretenue que celle du P. Mathieu tenue par un certain M. M* qui se vante d'avoir beaucoup de charismes.
Monique a beaucoup cru en lui et lui a fait un don. Et cependant ça n'a pas empêché un de ses fils de mourir il y a peu alors qu'il était censé devoir être guéri par ce M*. En outre "cerise sur le gâteau", ledit Q lui a donné un rendez-vous galant sur un parking !
C'est depuis cette série de cruelles déconvenues que la fille de Monique ne veut plus entendre parler de ce genre de "prêtre"... On comprend pourquoi...
Monique en a parlé au Père Mathieu qui connaît M* et celui-ci a dit : "On ne s'est pas vraiment rencontrés mais je sais qu'il ne m'aime pas. Il pense que je lui fais du tort. C'est un manipulateur".
Ce M* affiche dans son église des plaques d'ex-voto de gens qui le remercient pour ses bienfaits. Ce n'est pas un signe d'humilité. Monique soupçonne que, peut-être, il les fait fabriquer lui-même...