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Articles avec #christianisme tag

Véronique Lévi et Sainte Véronique

21 Août 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme

Véronique Lévi (la petite sœur de Bernard-Henri) dans ce témoignage de sa conversion en 2012 qu'elle livre à Paray Le Monial, en commençant à parler de la Sainte Face, rend un hommage éclatant (quoiqu'elle ne développe pas ce thème) à Sainte Véronique dont elle porte le nom. Si seulement je pouvais rendre le même à Saint-Christophe dont c'est la fête aujourd'hui...

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Joyce Meyer

15 Août 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme

Cette femme est un vrai Jourdain à elle seule (même si certains aspects de son enseignement, un peu trop "américains" car trop fondés sur l'autosuggestion ou sur certains bénéfices matériels que la foi peut apporter, doivent être nuancés comme ici). La seule chose qui manque à cet enseignement est le renoncement complet aux choses du monde matériel, qui est la forme la plus pure du christianisme.

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"Constance de Rabastens, mystique de Dieu ou de Gaston Fébus ?"

14 Août 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire secrète, #Médiums, #Notes de lecture, #Ishtar

"Constance de Rabastens, mystique de Dieu ou de Gaston Fébus ?"

Il y a près d'un an je vous ai parlé de la visionnaire Jacqueline-Aimée Brohon (1731-1178) voir le billet ici que j'ai transformé ensuite en article pour la revue "Connaissance de l’Eure" n° 178 (4e trimestre 2015). Changeons de siècle, et intéressons nous à une autre visionnaire fascinante : Constance de Rabastens, et à son approche du chevalier Gaston Phébus (1331-1391). Je me suis demandé si cette visionnaire pouvait nous aider à saisir la signification occulte, ésotérique, de cette époque-là (et l'on a vu avec mon précédent billet sur le général Butt Naked combien cette dimension de l'histoire était incontournable, aujourd'hui comme au Moyen-Age).

Comme l'indique l'historienne Régine Pernoud dans sa préface au livre de référence à son sujet est paru en 1984 aux éditions Privat (Toulouse), Constance de Rabastens (née en 1340 ?) fut la visionnaire par excellence sur Gaston Phébus, comme un siècle plus tôt Sainte Douceline de Digne (1214-1274) le fut sur Charles d'Anjou (frère de Saint Louis et roi de Naples, le père du découvreur des reliques de Ste Baume). L'historienne les qualifie de "mystères" et les compare toutes deux à la voyante Sainte Hildegarde de Bingen (déclarée docteur de l'Eglise par Benoît XVI en 2012) dont le Livre des œuvres divines ne fut traduit en français par Bernard Gorceix que deux ans avant la publication du livre sur Constance de Rabastens (on notera d'ailleurs que Régine Pernoud se demande si Constance ne mérite pas le titre de sainte, un débat qui valut aussi pour d'autres visionnaires comme l'espagnole Marie d'Agreda au XVIIe siècle et l'allemande Anne-Catherine Emmerich au XIXe et qui, en effet, mérite de rester ouvert).

Avant Hiver-Bérenguer, Constance de Rabastens n'était pas inconnue de l'historiographie. Noël Valois (185-1915), dans La France et le grand schisme d'Occident. 1896 T. 2 écrit (p. 327) "Le puissant Gaston Phoebus passait pour urbaniste (partisan du pape Urbain) : une voyante albigeoise, Constance de Rabastens, le désignait même comme le sauveur appelé à restaurer l'autorité du pape italien". P. 368 il développe à propos de cette Constance : "Trois ans durant (1384-1386), cette femme se figura entendre des voix célestes prononcer la condamnation du pape et des cardinaux d'Avignon ou annoncer le triomphe définitif du pape de Rome, celui qu'elle appelait « l'homme juste. » Elle crut apercevoir en enfer trois cardinaux, et parmi eux Pierre de Barrière, dit le cardinal d'Autun : c'était celui que les démons persécutaient le plus. Clément VII lui apparut tantôt sous les traits d'un lépreux qui communiquait sa lèpre aux gens de son entourage, tantôt sous ceux d'un navigateur qui s'abîmait dans les flots avec le vaisseau sur lequel il venait de s'embarquer, ou bien encore environné de fumée et de ténèbres, tandis qu'au dessus de sa tête un ange brandissait une épée nue sanguinolente. Le comte de Foix Gaston Phoebus jouait dans ces visions le rôle d'un sauveur appelé à rétablir l'autorité d'Urbain, comme aussi à prendre sur Charles VI un ascendant heureux. Par contre, il n'était pas d'anathème que la voyante ne lançât contre les Armagnacs, traîtres au roi et vendus au démon. Telles sont les prétendues révélations que Constance ne se lassait pas de communiquer à son fils, religieux du couvent de la Daurade, à son confesseur, voire même à l'inquisiteur de Toulouse. Sans se faire illusion sur les suites probables de sa témérité, elle allait bravement au-devant de l'épreuve, se croyant appelée à restaurer la foi. Longtemps elle paraît avoir vécu en paix, jouissant même dans la contrée d'une certaine considération. Mais un mot d'un témoin de ses hallucinations nous renseigne sur son sort : certains détails, dit-il, furent donnés par son fils, quant ella fo encarcerada. Rien ne permet, d'ailleurs, d'évaluer la durée de l'emprisonnement qui, s'il ne termina pas, interrompit du moins la mission de la voyante urbaniste de Rabastens". Valois dit tenir cela d'Amédée Pagès (1865-1952) qui, lorsque le premier écrit son livre sur le schisme, s'apprête dit-il en note de bas de page à publier "un curieux mémoire en langue catalane" à son sujet. Pagès le lui a fait lire (il s'agit du texte publié dans les Annales du Midi 8, 1896, p. 241-27 sur lequel Hiver-Bérenguier allait travailler). Le moins que l'on puisse dire à la lecture de ces lignes est que Valois n'a pas une très haute opinion de la visionnaire (ce qui explique peut-être qu'Hiver-Bérenguier n'y fît pas référence en 1984).

L'histoire du livre d'Hiver-Bérenguier de 1984 mérite un petit développement à titre préalable, car, comme c'est souvent le cas des grandes découvertes, Constance de Rabastens n'a été redécouverte que du fait du "hasard" (qui n'existe pas), et non dans le cadre de programmes de recherches universitaires bien établis. Dans son édition du 6 janvier 1980 (deux ans après la diffusion de la série à succès "Gaston Fébus ou le Lion des Pyrénées" sur Antenne 2), le journal Le Monde publie une longue étude de l'historien de l'université de Rouen André Vauchez intitulée "Les sœurs de Jeanne", résumé de sa conférence d'octobre 1979 au colloque d'histoire médiévale d'Orléans (c'était du temps où Le Monde, d'un plus haut niveau qu'aujourd'hui, diffusait des résumés de conférences universitaires), qui cite des visionnaires : Jeanne-Marie de Maillé, Marie Robine (Marie de Gascogne) et Constance de Rabastens du Tarn. Jean-Pierre Hiver-Bérenguier, docteur en chirurgie dentaire (mais oui !), enseignant à l'université Paris VII mais originaire de ce village se rend compte qu'il n'a jamais entendu parler de cette mystique et écrit au professeur Vauchez pour lui proposer de défricher le sujet. Vauchez lui transmet sa source : les Annales du Midi de la fin du XIXe sècle où se trouvait le transcrit en catalan des Révélations de Constance de Rabastens. Pendant deux ans, avec le soutien de Vauchez, de Régine Pernoud, de Dom Grammont, père de l'abbaye Notre-Dame du Bec Hellouin, et du médiéviste Philippe Wolff, Jean-Pierre Hiver-Bérenguier avale "plus d'une centaine de livres" et pond en deux ans ce livre que la préfacière couvre d'éloges. Voilà une histoire peu commune pour un livre, mais celle de la visionnaire l'est encore moins.

Le dimanche 29 juin 1386, fête de la Saint-Paul, en l'église Notre Dame à la messe de l'aurore dans la chapelle Saint Jean, la très pieuse dame Constance, 45 ans, s'est remise à prophétiser, ce qu'elle fait déjà depuis cinq ans. Au début il y avait les visions la nuit, puis à n'importe quel moment de la journée et surtout quand elle prie aux offices de l'église ou du couvent des Cordeliers. Elle prophétisait sur les papes d'Avignon et de Rome, sur les malheurs du jeune roi de France en guerre contre les Anglais. Elle annonce la fin du monde, la victoire des Sarrasins disciples de l'Antéchrist, mais aussi une victoire de Gaston Phébus, comte de Foix et vicomte de Béarn, qui ramènera la paix. Au moment de la lecture de la deuxième Epître à Timothée "fais œuvre de prédicateur..." Constance entre en transe, les yeux fixés sur le Christ en Majesté sur la voûte, le corps raide insensible et répète "Des signes, oui, des signes..." et puis : "Le soleil... la lune... les étoiles sur toutes les terres !" (p. 17).

Le soir même son confesseur Raimond de Sabanac consigna ce qu'elle dit avoir vu, au paragraphe 55 des Révélations (sur 63). Tout le livre des Révélations est ainsi composé. En l'occurrence, lors de cette extase elle entendra Jésus lui dire que le vrai pape de Rome est le soleil, la lune les cardinaux qui ne veulent pas recevoir sa lumière du soleil, les étoiles les théologiens qui se taisent, les princes sont la Terre, Constance est sa flêche, le soleil s'imposera. Hiver-Bérenguier en s'appuyant sur un livre de Salembier de 1902 sur le grand schisme rapprochera (p. 95) cette vision de celle de Pierre d'Ailly, disciple de Joachim de Flore, qui, en s'aidant de l'astrologie, prédit dès 1414 la Révolution de 1789. D'Ailly en 1385 aurait annoncé l'Anté-Christ en ces termes : "Il y aura des signes dans le ciel, dans le soleil, la lune et les étoiles. Le soleil, ce sont les prélats ; la lune, ce sont les princes : le rayon de leur justice s'obscurcit ; les étoiles ce sont leurs membres inférieurs : la grâce disparaît en eux tous." (Sermo III, De advetu domini).

Clémence a des visions importantes sur les partisans de Clément VII pape d'Avignon et leur mort. Le 6 novembre 1384, alors qu'elle pense à la cruelle reine Jeanne Ière de Sicile assassinée en 1382, la Voix lui dit que "la mesure avec laquelle la reine avait mesuré a servi de mesure pour elle-même". La visionnaire annonça même en 1384 à un seigneur venu la consulter la mort de Louis d'Anjou, roi de Naples qui, après qu'il eut manqué le trône de France, avait mené une expédition militaire contre Rome à la demande de Clément VII : "Tu diras que mort est celui qui portait le signe de la Bête, c'est à dire le duc d'Anjou." Elle lui révèlera aussi en mars 1384 la trahison du comte d'Armagnac à l'égard du roi de France Charles VI, qui n'allait être connue que deux mois plus tard. La Voix lui parle aussi de Ninive alors qu'elle n'en a jamais entendu parler.

En 1384 ou 1385, la Voix qui lui a parlé des Flandres lui dit 20 fois que dans 7 ans le royaume de France "viendra à grand bouleversement, c'est-à-dire abattement" du fait du soutien aux papes d'Avignon et en effet en 1392 le roi sombra dans la folie.

Ses prédictions d'Apocalypse rejoignent celles de St Vincent Ferrier peu de temps après, l'image des ailes qui la libèreront sera aussi donnée à Jeanne d'Arc et se trouve dans l'Apocalypse ch 22 (la Vierge s'envole au désert pour échapper au Dragon).

Gaston Fébus est un personnage central des visions de dame Constance. Né sous le signe du taureau en 1331 (signe de la terre, il a le taureau et la vache sur son blason), il a un côté paysan têtu ombrageux mais aussi vénus en dominante, un côté artiste, séducteur. Il est entouré d'une légende à cause de ses victoires militaires, de sa richesse, et on lui prête un don de devin pour connaître ce qu'il se passe sur ses terres. Il a tué son fils en 1382.

Selon le notaire Michel du Bernis, archiviste de Fébus (dont la version selon Cabié en 1879 serai la plus fiable), le dimanche avant la Madeleine de 1381, à Rabastens Fébus livra bataille à des hommes de son rival duc de Berry, comte d'Armagnac qui venaient de piller le Lauragais et en emprisonna certains, massacra les autres. Cette victoire chevaleresque marque les Rabastinois qui en ont été témoins sous leurs remparts.

On ne sait rien de Constance, sauf qu'elle est veuve, qu'elle a une fille et un fils moine. Elle assistait à tous les offices, un baron bordelais et un seigneur clerc l'ont consultée. Elle a été jugée par l'Inquisition sur un faux témoignage et innocentée.

Son confesseur et secrétaire (comme pour Hildegarde) dont Hiver-Bérenguier dit qu'il pourrait être un homme de Fébus a introduit le livre par une mise en garde contre les visions, comme Gerson 30 ans plus tard. Il les a notées dans le désordre. Il les a écrites de 1384 à 1386, et à propos d'une vision du 4 octobre 1384 dit que Constance en avait depuis plus de deux ans.

Vers 1881 donc (peut-être après la bataille de Rabastens, mais Cabié lui situera l'événement fondateur des visions en 1374, cf Madeleine Jeay) elle voit une montagne de cadavres et une voix lui dit qu'il y aura des cadavres mais que ce qu'elle entendra sera a vérité. Elle pense que cela vient de Jésus. A la mort de son mari peu après, la voix lui annonce qu'elle quittera le monde comme une moniale. Elle se rendra souvent au couvent des cordeliers. Jésus lui apparut une fois comme un homme habillé de satin, une autre comme un seigneur sur son trône, puis nu couvert d'un manteau blanc portant une grande croix à la main et en colère, une autre dans sa vision Jésus dans l'église se détache de sa croix puis, après qu'elle lui ait baisé les mains, frappe des gens avec un bâton et demande qu'on le remette en croix (p. 87). Elle vit aussi la Trinité. Beaucoup de ses visions sont aussi des paraboles : arbre vert, cygnes, brebis remparts, navires qui sont des métaphores de villes, de la papauté etc.

A propos de Fébus, le mardi 9 mais 1384, la Voix lui dit "Alors se dressera la Grue à la tête vermeille, c'est à dire le comte de Foix, qui redressera l'Homme juste, c'est-à-dire le pape de Rome et le replacera sur son Siège. Et de la même façon que vint Vespasien pour détruire Pilate, viendra le comte de Foix pour détruire Armagnac. Alors il dominera le royaume tellement, et il y aura telle grande union entre le Roi de France et le comte de Foix, que le Roi en de nombreuses choses obéira au comte. Et après, le comte prendra le commandement du Saint Passage !" (§26).

Un petit cousin de Fébus en 1445, Gaston IV, nomma son cheval de parade la Grue. Fébus dans un de ses poèmes se décrit comme "prince illustre à la tête couronnée de flammes". Pline parle de la grue symbole de vigilance qui dans l'eau tient dans sa patte une pierre pour qu'elle l'entende tomber si elle s'assoupit. La mère de Constance le lui avait enseigné. Hiver-Bérenguier renvoie aussi au conte persan de Faride Ouddin Attar, sur le voyage initiatique des oiseaux. "La Vache sera à l'ombre de la Fleur". Vache du Béarn, Fleur de Lys de France, le Saint Passage c'est la Croisade. Catherine de Sienne, elle, tenta de pousser un condottiere à la Croisade.

Le thème du dernier monarque avant la fin des temps qui sauvera la France remonte à St Césaire, évêque d'Arles au VIe siècle (révélées en 1524 par Jean de Vatiguero). Merlin le Gallois annonça le schisme, le rôle d'une jeune Lorraine et du grand monarque, ce que révéla Jeoffroy de Monmouth en 1152. Nostradamus le développa aussi. Eric Muraire dans son Histoire et Légende du Grand Monarque (Albin Michel, 1975) le retrouve chez 76 voyants (dont 30 femmes) dont 44 français, jusqu'à Garabandal.

Constance se plaignit que cette prophétie lui incombât (elle fut souvent passive à l'égard des messages qu'elle recevait, n'était pas une mystique souffrante ou stigmatisée comme le furent tat d'autres), mais la Voix (§ 53) lui rappela le rôle de la femme dans la révélation des derniers sceaux de l'Apocalypse. Hiver-Bérenguier note que Fabre d'Olivet dans Histoire Philosophique du genre humain insiste sur le rôle prophétique des femmes du fait de leur sensibilité nerveuse depuis la Protohistoire. Naturellement le fait que beaucoup ne se soient pas réalisées (notamment celle sur l'Apocalypse prochaine) ne compte guère, les prophéties étant le plus souvent conditionnelles.

Pour avoir une approche un peu plus complète de ce que les visions de Constance de Rabastens peuvent nous dire de leur époque, il faudrait peut-être les comparer à celles de sa contemporaine Marie Robine (Marie de Gascogne) qui, elle, défendait Clément VII d'Avignon. Pour savoir si les visions de cette Constance venaient de Dieu ou du diable, il faudrait une analyse aussi limpide que celle d'Augustin Viatte à propos de celles de Jacqueline-Aimée Brohon (qu'il reliait intelligemment aux hérésies de Rousseau et du romantisme)

Hiver-Bérenguier détaille la mystique de Constance de Rabastens, note par exemple l'absence des Saints, notamment de Marie, et le peu d'importance qu'elle accorde au péché (elle estime, comme Fébus dans ses Oraisons, que Dieu ne peut pas condamner sa propre créature). Le dernier point a des relents d'hérésie qui donne une couleur un peu démoniaque aux visions (de même aussi son utilisation de Ninive oubliant que dans Jonas Dieu a pardonné à cette ville d'Assyrie) quoique l'Inquisition ait innocenté la mystique (mais certains sousentendent qu'elle ait pu agir sous la pression de Fébus). Un théologien serait mieux à même que nous d'en juger ...

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Voir aussi

R. CABIÉ, Une mystique? Réflexions sur Constance de Rabastens, in Cahiers de Fanjeaux, 23 (1988), pp. Cahiers de Fanjeaux, 23 (1988),37-55;

R. Cabié, Révélations de Constance de Rabastens. Édition, traduction et commentaire, Barcelone, facultat de theologia de Catalunya-Institut catholique de Toulouse, 1995, p. 40.

H. CHARPENTIER, La fin des temps dans le Livre
des Oraisons de Gaston Fébus et les Révélations de Constance de Rabastens, in Fin des temps et temps
de la fin dans l’univers médiéval, in Cahiers de Senefiance, 33 (1993), pp. 147-62

Renate Blumenfeld-Kosinski, « Constance de Rabastens: politics and visionary experience in the time of the Great Schism », Mystics Quarterly, 25, 1999, p. 147-168.

M. Jeay, « Marie Robine et Constance de Rabastens : humbles femmes du peuple, guides de princes et de papes», Le petit peuple dans l’Occident médiéval, éd. P. Boglioni et C.Gauvard, Paris, Presses de l’Université de la Sorbonne, 2002, p. 579-594.

Madeleine Jeay, La transmission du savoir théologique, Le cas des femmes mystiques illettrées, CRMH p. 223-241

Celle-ci travaille surtout sur la comparaison entre les visions de Constance et le discours ou les images théologiques dans lesquelles elle baignait, ses interactions avec son entourage, une approche en vogue dans les sciences humaines actuelles mais qui ne m'intéresse guère, exemple :

"Le troisième canal par lequel les fidèles ont eu accès à ce savoir, comme nous l’a indiqué l’exemple de Constance de Rabastens, est celui de l’image, en conjonction avec les pratiques dévotionnelles et liturgiques, par l’intermédiaire du livre et de la lecture ou bien des programmes iconographiques des églises. Ses révélations illustrent clairement le lien étroit entre le contenu de ses visions et celui des chapitres du Livre des Révélations dont on lui fait la lecture. On sait la part qu’occupe l’illustration dans les apocalypses pour accompagner le texte, notamment celles en français, ce qui en faisait de remarquables outils pédagogiques.

Parallèlement aux scènes de l’Apocalypse, Constance a été marquée par les peintures qui recouvraient l’église Notre-Dame du Bourg, en particulier par celle qui figurait dans la chapelle Saint-Martin. L’apparition qu’elle reçoit aux environs de 1374, d’un arbre chargé de fruits surmonté d’un nuage où siègent vingt-quatre vieillards, combine les chapitres 2 et 22 de l’Apocalypse avec la peinture de l’Arbre de Vie de la chapelle. Le lignum vitae et l’image de l’arbre évoquent saint Bonaventure et l’ouvrage par lequel il a diffusé sa doctrine théologique, où elle lui sert d’outil pédagogique pour favoriser la compréhension et la mémorisation."

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Le "général cul-nu" (butt naked) Joshua Blahyi, devenu pasteur (Liberia)

11 Août 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Nudité-Pudeur en Afrique, #Histoire secrète, #Christianisme, #Médiums, #Notes de lecture

Vous vous souvenez que, dans mon livre la Nudité Pratiques et significations, j'ai parlé du général Butt naked (Joshua Blahyi)), qui, se battant nu au Libéria au cours de la guerre civile des années 1990, a fait périr au moins 20 000 personnes . Devenu pasteur protestant, il raconte sa conversion dans "The redemption of an African Warlord" (editions Destiny Image, 2013), une expérience que son préfacier Bojan Jancic qualifie de d'histoire de conversion "la plus radicalement fascinante depuis Saint Paul".

J'avais classé le combat nu de ce général comme celui des Celtes, dans la rubrique la "nudité-affirmation". Mais selon Blahyi il s'agissait d'une nudité humiliante : "Je devais me battre 'cul nul', écrit-il dès la page 19, parce que c'était l'exigence de la force spirituelle qui me donnait le pouvoir. C'est juste un exemple de jusqu'où Satan peut aller pour humilier un être humain au nom de son intention de lui donner un pouvoir".

Il explique que la tribu guerrière dont il est issu croyait beaucoup au pouvoir immanent et exigeait des vaincus un renoncement par traités rituels à leur souveraineté pour ne pas être ensorcelée par eux. Ces guerriers professionnels avaient pour chef non le plus âgé comme d'ordinaire en Afrique mais le plus fort. Une branche, les Sarpo-Krahn, renonça à la guerre et s'établit à Greenville sur les bords de l'Atlantique, mais ils furent massacrés par leurs frères guerriers Krahn après avoir rencontré des missionnaires et tenté à leur tour de les évangéliser. Un survivant, Saydee fut "empowered", doté d'un pouvoir, ainsi que ses compagnons, par l'esprit Nya-Ghe-a-weh pour venger les siens grâce à un talisman (qui envoûtait avec un éternuement cf p 28, j'ai aussi vu cela avec des mediums), avec notamment un pouvoir de voler et disparaître à volonté. Sa vengeance réalisée, Saydee devint grand prêtre de Nya-Ghe-a-weh que lui et ses descendants seraient les seuls à voir et Nya-Ghe-a-weh choisirait à loisir ses prêtres dans cette ethnie qui sont en fait désormais "ses guerriers".

Alors que l'ethnie avait perdu Greenville face aux Kru, l'oncle du grand père paternel de Blahyi, séduit par l'éducation occidentale du gouverneur proposa à sa tribu d'abandonner ses traditions. En raison du refus de Nya-Ghe-a-weh il fut banni du clan, mais poussa l'arrière grand père de Blahyi à baptiser son fils (le grand père de l'auteur qui allait être un bienfaiteur de la tribu) et poursuivit clandestinement l'éducation de sa tribu.Tous ces éléments sont importants pour comprendre les malédictions sur plusieurs générations dont parle la Bible.

Le frère préféré du père de l'auteur mourut assassiné dans des circonstances assez mystérieuses le jour de la fête de l'obtention de son baccalauréat (p. 48) par des gens qui voulurent lui montrer que l'éducation ne sert à rien. Cet oncle mourant fit jurer au père que leur nom de famille serait placé parmi les lettrés. Ainsi engagé dans le combat pour l'éducation, le père de l'auteur devint comptable spécial du ministre des finances Steven A.Tolbert, le frère de William qui fut un président progressiste de 1970 à son assassinat en 1980, mais il dut devenir grand prêtre de sa tribu selon les lois coutumières. Nya-Ghe-a-weh exigea que son fils ainé fut éduqué dans la tradition pour pouvoir le seconder utilement et lui succéder le moment venu.

La première femme du père de l'auteur, Ma Saybah, une Lorma du comté de Lofa, faisait partie de la société secrète des Sande. Le fils ainé Benedict-Nnawyieee fut initié par la société secrète des Poro de l'ethnie maternelle. Il en résulta qu'au village l'oracle de Nya-Ghe-a-weh le rejeta comme prêtre et lui lança une malédiction "d'instabilité". La mère de l'auteur, déjà mariée et mère, mais qui était une personnalité importante, fut choisie par les vieux du village pour enfanter le prêtre enfin digne qu'exigeait Nya-Ghe-a-weh. Un sortilège fut fait pour que le père de l'auteur couchât avec elle à Monrovia, et de cet accouplement naquit l'auteur. Mais la première femme fut furieuse. Elle tenta de retrouver sa rivale par des devins mais n'y parvint pas pendant la grossesse car celle-ci à Monrovia était protégée par Nya-Ghe-a-weh. A la naissance de l'auteur, Ma Saybah envoya une prophétesse auprès de sa mère qui lui offrit une pièce de 25 cents comme cadeau. L'enfant joua avec mais elle disparut par miracle. Une sorcière dit à la mère de l'auteur que son fils était un enfant bizarre à surveiller avec prudence.Après l'échec de la malédiction de la pièce, Ma Saybah convainquit le père de ramener le fils au village auprès du demi-frère Benedict mais échoua aussi à le détruire. Comme l'auteur était doué pour l'école, le père refusa de le nommer grand prêtre et même enfanta un autre bébé pour qu'il occupe cette charge. Nya-Ghe-a-weh le punit d'abord en accablant le fils d'une maladie puis au bureau du père à Monrovia en provocant chez celui-ci des tremblements terribles alors que son staff était endormi et le menaça de tuer son fils s'il continuait de désobéir.

Le père fit admettre par Nya-Ghe-a-weh que son fils devînt prêtre à sa place, bien que fort jeune, ce que le dieu accepta dans un rêve. L'auteur lors de son initiation comme prêtre vit Nya-Ghe-a-weh. Pendant plusieurs jours le dieu lui montre les actions de sa belle-mère contre lui, le poids d'une ombre sur sa vie, les trahisons et lâchetés des ancêtres. L'enfant promet d'être fidèle à Nya-Ghe-a-weh qui lui assure qu'il lui réserve un destin exceptionnel.

Joshua Blahyi raconte le détail de son initiation (il affirme que Jésus aujourd'hui l'incite à le faire sans crainte pour démystifier son ancienne idole), et notamment comment son dieu le fait sauter de son rocher sacré, lui fait manger de la chair humaine, lui donne ses pouvoirs surnaturels d'invulnérabilité etc. Le récit rappelle exactement les récits européens antiques et les légendes africaines, sauf que là ça ne se donne pas du tout comme des légendes mais bien comme une histoire réelle survenue il y a une quarantaine d'années.

Après cela c'est comme le mécanisme d'une machine infernale qui se déclenche.Blahyi raconte comment il recrute des prêtres et des sorciers à son service et au service de Nya-Ghe-a-weh, et s'assure la fidélité des gens par des envoûtements, des sorts jetés sur la nourriture, sur l'eau etc. Blahyi doit effectuer des sacrifices d'enfants pour Nya-Ghe-a-weh aux nouvelles lunes. Il explique comment il pénètre par le sommeil dans l'esprit des gens qu'il veut tuer, capture cet esprit de sorte que le corps reste en état de mort clinique au petit matin, disponible ensuite pour le rituel anthropophage.

Une fois il a peiné à avoir le corps d'une petite fille parce que sa mère était chrétienne (il ne pouvait acheter la confiance de la fille même en lui faisant un cadeau car elle le refusait) mais Nya-Ghe-a-weh tenait à ce qu'il réussisse. Il a alors abusé d'une faiblesse de sa mère. Comme il n'était encore qu'un enfant - quoique déjà grand prêtre - il lui offrit un pièce de 25 cents, comme sa belle mère l'avait fait à sa mère par le truchement d'une "prophétesse". La mère accepta, les gens du voisinage s'amusèrent en disant que c'était une "dot". Et en effet, ce fut une dot car ensuite la mère avait sans le savoir ainsi conclu un pacte et ne put défendre sa fille qui mourut la nuit suivante.

Lorsque le président Samuel Doe (qui allait être un grand allié de Ronald Reagan dans la région), membre de l'ethnie Krahn prend le pouvoir en 1980, Blahyi en tant que grand prêtre du plus grand dieu de l'ethnie devient de fait son tuteur spirituel : Doe fut un des milliers de prêtres - placé au rang 7 - de Nya-Ghe-a-weh. Et ce fut à l'échelle du pays tout entier, et même de la sous-région qu ele culte de Nya-Ghe-a-weh, avec son système d'embrigadement et de sacrifices d'enfants fonctionna.

Toutefois à la fin des années 1980, le système de Doe s'affaiblit. Celui-ci, trop ambitieux spirituellement, se fait aussi initier dans les rites d'autres cultes comme les Poro et la franc-maçonnerie. Par le biais des Poro, à un moment en 1990, Prince Y. Johnson allié de Charles Tayor arrive à couper la protection de Nya-Ghe-a-weh et la canalisation entre Blahyi et le président. Celui-ci est assassiné. Avec la guerre civile les Krahn risquent d'être massacrés en représailles, et Blahyi alors donne libre cours à sa fonction de guerrier que lui a conférée Nya-Ghe-a-weh. Il arme ses hommes, constitue une armée, et raconte les pouvoirs exceptionnels dont il bénéficie grâce à son dieu (celui de terroriser, celui de faire en sorte que les balles passent toutes très loin de son corps).

Cette partie de sa vie est aussi spirituellement instructive, notamment lorsqu'il évoque une guérilla musulmane. Il explique qu'il a toujours senti que, pour pouvoir travailler avec elle, il devait entamer une négociation avec leur dieu, alors qu'avec les chrétiens aucune négociation avec leur Dieu n'avait jamais été possible et il n'avait l'esprit des chrétiens que lorsque ceux-ci d'une manière ou d'une autre brisaient le pacte avec leur Dieu, comme la mère de la fillette dans les années 70. Il y a aussi des remarques importantes sur les dieux qui contrôlent les autres pays africains, les alliances qui ont pu être passées avec eux etc. (cela rejoint le propos de Derek Prince dans cette vidéo sur le démon roi de Perse en 41ème minute ici).

La conversion au christianisme du général "Butt naked" est tout aussi surnaturelle. Il y a d'abord la voix de Jésus qui lui dit qu'il n'est pas roi et qu'il est esclave de lui-même, mais bien sûr cela ne suffit pas, cela l'ébranle juste un peu, puis il y a cette association protestante pour la paix qui se constitue, et dont certains membres, avec un courage inouï et dans le plus grand calme, alors qu'il fait régner la terreur à Monrovia, vont frapper à sa porte et prient chez lui. Et petit à petit cela fonctionne. Le cœur de Blahyi s'attendrit, une balle touche son tibia, Nya-Ghe-a-weh qui lui rendait visite toutes les nuits pour lui faire faire des voyages astraux s'absente une fois - et c'est un prodige chrétien étrange qui remplace cette visite - et, quand Blayi se rend au groupe de prière des protestants pacifistes, Nya-Ghe-a-weh n'est plus qu'une idole affaiblie et terrorisée. Blahyi avait peur des représailles de son dieu après la trahison, mais il comprend bien vite que ce démon ne peut rien contre le Dieu des chrétiens quand la foi est assez ferme. Il voit aussi que les idoles n'ont aucun pouvoir sur la Terre si le cœur des hommes ne leur sert pas de relais - car, explique-t-il, au commencement des temps Dieu a confié la Terre à l'homme, et non aux esprits qui, sans l'aide de l'homme, n'auraient aucun pouvoir sur elle.

Depuis lors Blahyi est devenu pasteur, il s'est marié, a fondé une famille et œuvre à la réconciliation des Libériens. Il dit qu'il était prêt à subir la peine de mort à cause de ses péchés commis du temps de ses pratiques idolâtres et pour mourir en martyr du Christ, mais la justice des hommes l'a acquitté. Satan cependant ne cesse de le mettre à l'épreuve : il a notamment survécu par miracle à un accident automobile il y a peu.

L'expérience et la conversion de Joshua Blahyi m'ont fait penser au témoignage d'un autre converti protestant, le pasteur Allan Rich que l'on peut voir ici - https://www.dailymotion.com/video/x1kbdh_dieu-m-a-delivre-de-l-occultisme-al_webcam - la vidéo et qui lui aussi était allé très loin dans l'occultisme.

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Les prophètes et l'Egypte

10 Août 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire des idées

Les prophètes et l'Egypte

Dans un livre qui commence à dater, "Le monde de la Bible" (dirigé par André Lemaire, Gallimard 1998), Jesus Asurmendi de l'Institut catholique de Paris examinait la question intéressante du rapport de prophètes d'Israël à l'Egypte face aux conquêtes assyriennes et babyloniennes.

Trois aspects me semblaient dignes d'être retenus de cette contribution

1) L'engagement de ces hommes dans la politique étrangère de leur pays (ils doivent se prononcer sur l'opportunité de l'alliance avec l'Egypte)

2) Le caractère conditionnel de leurs prophéties (Ezéchiel en 26-7 annonce la prise de Tyr par Nabuchodonosor, mais la ville résiste à un siège de treize ans et Ezéchiel annonce alors en 29-17 que c'est l'Egypte qui tombera)

3) La question du "retour en arrière" que leur posait l'éventuelle alliance avec l'Egypte : l'Egypte pays de l'idolâtrie a asservi Israël, peut-on y retourner ?

On notera qu'il y a ce retour en arrière, vers le delta du Nil, aussi, au début de la vie de Jésus. Et aussi que l'Egypte qui asservit par sa sorcellerie est également celle qui éleva spirituellement Israël, l'instruisit, au temps de Joseph...

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Lourdes s'éveille...

5 Août 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme

Lourdes s'éveille...

Les guerres de religion ont tant ravagé notre pays, des formes hypocrites de catholicisme ont tant étouffé les consciences, le progressisme a promis tant d'intelligence et tant de bienfaits à nos sociétés qu'on ne peut pas chanter "Il est 6 h Lourdes" s'éveille" comme le faisait Dutronc avec Paris. Et d'ailleurs la chansonnette serait bien dérisoire à côté de la grandeur de ce lieu.

Car oui, Lourdes est un site merveilleux, entre le chateau fort et le Gave,entre les rêves des hommes, et l'eau toujours pure, toujours mobile, renouvelée, insaisissable, musicale, du torrent. Beauté buccolique façon JJ Rousseau et George Sand sa fille trouvée ? Pas seulement. Rappelez vous Augustin Viatte reprochant à Chateaubriand de ne voir que ça dans le christianisme. Beauté éthique du geste qui a fondé ce lieu : la parole toute simple de la bergère, de la petite idiote du village, asthmatique, qui a simplement accepté de porter les mots de "celle-là" ("aquerra") et qui les porta avec simplicité - "mais si je vous assure qu'elle qu'elle a dit 'soy era immaculada conceptiou' ", avec honnêteté et dignité jusqu'au bout. Acte d'honnêteté et d'abandon ("fais ce que dois") qui faisait écho à un autre geste d'honnêteté et d'abandon, un geste qui l'associerait à un calvaire et quel calvaire, un fiat : "Je suis la servante de Dieu", 1860 ans plus tôt. Beauté éthique : le "oui" sans retour sur soi, le "oui" gratuit. Beauté eschatologique : la beauté de la fin dernière de tout acte humain, et de ce qui prévaudra sur tout le reste à la fin des temps.

C'est cela qui brille sur le sanctuaire de Lourdes qui s'éveille, sous les nuages colorés de rose, tandis que le reste du village dort encore. Ce n'est pas le plus bel endroit du monde : c'est le seul endroit du monde où toute l'humanité devrait être, ne serait-ce que par la pensée, si elle voulait être dans le vrai. L'endroit où la veille toute la puissance et la pureté de la mater dei éclatait dans la ferveur des "ave maria" de la procession des flambeaux. Ici la terre tremble tous les jours, les cœurs se fissurent, le sublime souffle de la sainte galiléenne les envahit. Cela compte bien plus que les miracles des guérisons, même s'il importe aussi, bien sûr de savoir qu'une religion est aussi faite pour guérir, même pour guérir un membre, car rien dans le corps n'est trivial.

Alors bien sûr, chacun a son "omphalos" du monde : Delphes, Bénarès, Jérusalem, La Mecque. Pour moi c'est Lourdes. Je suis à l'école de ce que Lourdes a à me dire, de la manière dont Lourdes veut me nettoyer, toutes les fois que l'Au-delà, que Dieu, me fait comprendre que je dois y être. Pas besoin d'y être une semaine. Parfois quelques minutes suffisent. Quelques images, quelques larmes versées, un rayon de lumière au bon endroit au bon moment, un son de cloche, l'image d'un solitaire qui prie, des bonnes sœurs dévouées poussant les chariots des malades. Le lieu donne dans les formes qu'il choisit. Pas besoin de discours fleuves.

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Le cantique à Notre Dame de Betharram "Boune may dou boun diu"

6 Juin 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire secrète, #Histoire des idées

Que l'on croie que la Vierge Marie est en fait un artéfact des extraterrestres qui a manifesté notamment toute sa puissance à Fatima dans l'attente d'une révélation plus complète dans quelques décennies, ou que l'on pense qu'elle est vraiment l'être parfait née en Galilée il y a deux mille ans, couronnée au Ciel après son assomption, médiatrice auprès de son fils et même "co-rédemptrice" du genre humain, force est de constater que son culte reste très vivace, au grand dam des rationalistes et des protestants (qui y voient un artéfact démoniaque, une sorte de nouvelle Isis, avec d'ailleurs beaucoup d'attributs communs). Il se décline suivant diverses modalités, souvent métissées comme à Guadalupe ou à Kibeho.

Voici un cantique en Gascon qui lui est dédié du Béarn au Comminges, chanté à Laruns dans la Vallée d'Ossau lors de la clôture de la messe du 15 août 2013, à une date où moi je me battais avec divers démons.

Ci-dessous les paroles et leur traduction en béarnais (gascon) et en français

L'air est celui de Estelle de la mar des Landais.

Les paroles font référence à ce miracle qui fut un grand motif de dévotion à Betharram à compter du Moyen-Age : une jeune fille tombée dans le torrent (le gave de Pau), fut sauvée de la mort par la Vierge, la Bonne Mère, qui lui tendit un rameau fleuri ; en reconnaissance, elle offrira un rameau tout doré, un beau rameau, “ beth-arram ” à la statue de la vierge dans la chapelle. Mais une autre légende avait précédé la fondation de la chapelle en ce village en 1475 : celle d'une image de la sainte Vierge qui aurait été découverte, penchée sur les bords du gave, à l'endroit même de l'autel actuel (d'où les paroles "Allons donc tous ensemble / Vers l'autel de la grâce"), grâce à une flamme resplendissante (d'où le nom de Notre Dame de l'étoile - estelle). Dans la Bible, la vallée fertile de Bétharram dans la Palestine (ou le comte béarnais Gaston IV se bâtit au XIIe s avant de prendre à son retour Saragosse dont il restaura la cathédrale avant de fonder l'abbaye de Sauvelade), fut donnée par Josué à la tribu de Gad, lors du passage en Terre-Sainte (Josué 13,27)

A Notre Dame du Calvaire à Betharram, lieu de pèlerinage, eurent lieu de nombreux miracles. Le docteur Gassion, médecin protestant qui voulait démystifier ce lieu fut converti. Pierre de Marca, président du parlement de Navarre, en atteste en 1648 dans son Traité des Merveilles opérées à Betharram chapitre 9, peu après sa destruction par les calvinistes et la grande procession (5 000 personnes) qui couronna la réhabilitation du monastère par Léonard de Trappes archévêque d'Auch . Il y avait notamment une croyance très répandue , que Notre-Dame de Bétharram aidait les femmes en couches, et que les offrandes faites à cette occasion sur son autel, les sauvaient de tout péril. Le 9 mai 1623 une mère de famille attestait sous serment que treize ans plus tôt la chapelle encore en ruine où elle avait passé la nuit avait guéri ses enfants (on dit que la lumière avait continué de baigner le lieu, même en ruines, pendant tout le temps de la persécution calviniste). Le 14 août 1622 veille de l'Assomption, l'ancienne source qui y coulait, presque tarie malgré les efforts pour réunir les canaux, retrouve d'un coup sa vigueur.

Google Books met à disposition des lecteurs l'exemplaire de la Triple couronne de la Bienheureuse Vierge Mère de Dieu du RP jésuite François Paré (version augmentée, privilège royal de l'année 1638), un inventaire extraordinaire en 800 pages de tous les aspects du culte marial (y compris à l'époque pré-chrétienne !). En son traité 1 chapitre 12, après avoir parlé de ND de Sarrance (p. 264) il consacre plus d'une page à Betharram (en comparaison il traite l'ensemble des sanctuaires d'Espagne en moins de quatre pages) et explique : "Au diocèse de Lescar, audit pays de Béarn, il y a une chapelle appelée ND du Calvaire de Betharram, beaucoup plus considérable par la vénération du lieu, où elle est située, et les grandes merveilles, que Dieu y a opéré que par la grandeur de son édifice. Elle fut bâtie il y a environ cent quarante ans par sujet et occasion fort remarquable qui est telle, selon qu'on le tien par une commune tradition des plus anciens du village voisin appelé Etelle, qui l'ont ouï dire de leurs pères" (il raconte le miracle de la lumière au bord du Gave). Il précise que "Plusieurs étaient arrivés, à la vue de la chapelle, achevaient leur pèlerinage à genoux, tenant une torche ardente à la main pour faire hommage à la Reine du ciel et de la terre, jusques au temps que le Comte Mongommery comme un Satan déchainé avec ses troupes impies, entrât dans le Béarn et renversât tous les lieux saints". "Je dois à Monsieur de la Vie, premier président au parlement de Pau, deux belles remarques sur ce lieu, que j'ai apprises de sa propre bouche. La première est que ladite rivière du Gave, laquelle depuis sa source jusques à ce qu'elle entre dans la rivière de l'Adour, qui font pour le moins trois journées, est si rapide qu'on n'y a jamais pu nager : mais dès qu'elle approche de la Chapelle, et tout autant qu'elle dure, elle va d'un cours fort calme et posé, comme s'arrêtant par honneur devant le lieu où la Reine du monde est adorée. L'autre est que la paroisse de l'Etoile, où elle est assise, a été l'unique qui s'est maintenue en la Religion Catholique pendant tous les troubles et divisions du Béarn, sans que jamais aucun s'y soit fait Huguenot, nonobstant les persécutions qu'ils ont souffertes en bon nombre à cet effet, l'espace de cinquante ans et plus : la Sainte Vierge tenant la main à la conservation de ses dévôts paroissiens." (voir sur ces sujets notre billet ici)

Le célèbre chanteur des années 1730 Pierre de Jéliotte de Lasseube fut formé pendant trois ans par les missionnaires de Betharram où vivait son oncle, avant de faire carrière à Paris. En septembre 1820 90 "pénitents blancs" se rendaient de Monléon-Magnoac à Betharam derrière un drapeau blanc à fleurs de lys pour obtenir la "délivrance de la duchesse de Berry". La comtesse de Chambord y consacra à la Vierge sa robe de noces, ce qui laisse entendre que le sanctuaire au XIXe siècle avait pris des couleurs royalistes légitimistes.

Le cantique fut probablement très tôt celui des pèlerins de Betharram. Bernadette Soubirous fut souvent l'une d'entre eux. Elle en ramena le chapelet qu'elle détenait lors de l'apparition de la Vierge à Lourdes, qui allait surclasser en notoriété Betharram, et même au delà de toute espérance.

Boune may dou boun diu (graphie fébusienne) fut chanté le 13 janvier 1952 à l'initiative de l'association "Le Réveil basco-béarnais" à la chapelle des filles de la charité rue du Bac à Paris, haut lieu d'apparition mariale (revue Pyrénées p. 83).

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Boune may dou boun Diu,

Sente Bièrye Marie Qu'eb boulem ayma, Toustem, toustem. (bis)

Eslou merabilhouse, Hilhe de Diu, lou Pay, De Bous, ô May piouse, Diu Jésus qu'ey l'array. O Bièrye sacrade, qu'et l'Immaculade, La Bièrye May !.

Sus lou gabe qui brame, dou pount debat l'arcèu, Si cau tene ue arrame, que deberat dou cèu. Bièrye, en la capère, au qui desespère, Dat lou rameu !

De la Bièrye Marie, qui nou sab la bertut, Que prègue cade die, en t'a nouste salut. Anem doun touts amasse, ta l'aouta de la grace Préga, ayma !.

O Bièreye Immaculade, ayat pieytat de nous, Baillat se a tous l'entrade, aou Cèu auprès de bous De la boste tendresse qu'eb laouderam chens cesse. Aou Cèu, aou Cèu !.

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Bonne Mère du bon Dieu, sainte vierge Marie

Nous voulons vous aimer, toujours, toujours

Fleur Merveilleuse Fille de Dieu le Pére De Vous, ô Mère pieuse Dieu Jésus est le frère O Vierge sacrée Vous êtes l'Immaculée La Vierge-Mère

Sur le Gave qui gronde Du pont sous l'arceau S'il faut tenir un rameau Vous descendrez du Ciel Vierge, à la capuche Pour celui qui désespère Avec le rameau

De la Vierge Marie Qui nous apprend la vertu Qui prie chaque jour Pour notre salut Allons donc tous ensemble Vers l'autel de la grâce Prier et aimer

O Vierge Immaculée Ayez pitié de nous Donnez-nous à tous l'entrée Au Ciel auprès de vous De votre tendresse Que nous louerons sans cesse Au Ciel, au Ciel

L'autregrand cantique à Marie en gascon dans la région est Nouste dame deu cap deu poun. Il a été avancé (hypothèse de D-S Lacolor dans "Pèlerinages des Pyrénées" appuyée sur "Histoire des troubles du Béarn" de l'abbée Poëydabant) que ce dernier cantique n'était pas forcément attribué à ND du bout du pont de Jurançon, mais lui-daussi à ND de Betharram puisque dans toute la Gascogne il y avait un oratoire à la Vierge au bout de chaque pont, ce qui explique que la reine Jeanne d'Albret malgré son calvinisme l'ait chanté en donnant naissance à Henri IV (puisque ND de Betharram aidait les parturientes).

Le pasteur Wentworth Webster (1828-1907) s'est demandé si avec ND de Betharram on n'avait pas affaire à l'origine à une déesse-mère celtique ou euskarienne (proto-basque) commune à Sarrance et Betharram, qu'on retrouverait aussi dans la Madeleine de Tardets (Bulletin de la Société Ramond : explorations pyrénéennes, Bagnères de Bigorre, 1874 p. 101)...

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Deus absconditus

2 Juin 2016 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Médiums

Pourquoi est-ce que le divin se cache, se révèle seulement dans les rêves, les synchronicités, les expériences limites (guérisons, expériences de mort imminente, initiations sexuelles extrêmes, pratiques magiques, apparitions surnaturelles etc) et souvent dans des formes codées, obscures etc ? L'Eglise catholique contemporaine a théorisé l'idée que Dieu se cache pour respecter notre liberté, cela fait partie de ce vaste mouvement d'abaissement du grand qu'on appelle la kénose. La tradition ésotérique, mais aussi l'ufologie, qui, à bien des égards est un ésotérisme, et même une démonologie, aux couleurs scientistes, ce qui ne veut pas nécessairement dire que ce soit une doctrine fausse (je pense ici à Daniel Robin par exemple, quand il dit que les extraterrestres déguisent leur discours en révélations mariales pour ménager notre ignorance), estiment que Dieu, les "entités de l'au-delà" ou les "entités spatiales" cryptent leurs messages parce que nous sommes trop stupides ou trop impurs pour pouvoir les supporter, ce qui laisse entendre qu'avec des efforts d'intelligence et de purification du corps, de l'esprit, et de notre rapport aux gens et au cosmos nous pourrions finir par en savoir un peu plus. La thèse du "on n'est pas encore capable de" est présente dans les Evangiles eux-mêmes, et donc ne peut, même du point de vue de l'Eglise catholique, être écartée d'un revers de main. Dans l'évangile de Jean Jésus dit à ses apôtres : "J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant." (Jn 16, 12). Voilà qui met sur les rails de l'ésotérisme (d'ailleurs n'a t on pas dit que depuis 2000 ans il y a une église de Pierre exotérique et une église de Jean ésotérique. Et c'est comme lorsqu'un daimon fait voir à Mme Blavatsky que le roi David dans la Bible dansait à moitié nu devant l'Arche d'alliance, même si le daimon cherche à l'égarer complètement par les conséquences qu'il en tire, on ne peut oublier que ce détail troublant, peu compatible avec l'enseignement exotérique, est vraiment présent dans les textes sacrés. Et, sauf à considérer que des morceaux démoniaques sont présents dans le corpus sacré lui-même, il semble que la religion officielle doit bien prendre en compte ce genre de "bizarrerie" et les chemins sur lesquels elles ouvrent...

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