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La malédiction de Tamerlan
Selon la légende, une malédiction pèse sur le tombeau de Tamerlan ; une inscription gravée avertit « Lorsque je reviendrai à la lumière du jour, le monde tremblera ». Il se trouve que la nuit du 22 juin 1941 où l'anthropologue Mikhail Guerassimov (1907-1970) exhuma le corps de Tamerlan, Hitler lança l'opération Barbarossa contre l'URSS. Mikhail Guerassimov est ainsi considéré, dans les anciennes républiques soviétiques, comme le responsable du déclenchement de la Grande Guerre patriotique pour avoir ouvert le tombeau du chef mongol. Il a été redéposé dans sa tombe au Gour Emir, en suivant les rites islamiques, en novembre 1942, juste avant la victoire soviétique à la bataille de Stalingrad. La Croix du 23 février 1942 en p. 3 précise en effet qu'une commission venue de Leningrad a commencé les investigations historiques "il y a un an" contre l'avis des populations locales et continuait son travail protégé par un cordon d'hommes du Guépéou.
Selon Jacques Boudet dans Les Mots de l'histoire (eds R. Laffont 1990) p. 225 Malraux aimait à raconter cette histoire. La même année Tatiana de Metternoch dans "Ma vraie Russie" p. 315 confirme que c'est bien le 22 juin 1941 que Guerassimov put ouvrir le tombeau.
Les malheurs occasionnés par les profanations de tombeaux n'étaient pas rares en Ouzbékistan. P. Chuvin et P. Gentele en 1998 notaient dans "Asie centrale : l'indépendance, le pétrole et l'islam" p. 65 qu'un écrivain militant comme Hamza (qui avait donné son nom à une station de métro à Tachkent) qui s'attaqua au sanctuaire vénéré de Châh-é Mardan, tombeau supposé du calife Ali, et laissa la vie dans cette entreprise impie.
Joseph Glanvill, défenseur de Descartes, et des témoignages sur la sorcellerie
Le protestant Balthasar Bekker (1634-1698), docteur en théologie et pasteur, partisan de Descartes, publie en français à Amsterdam (eds Pierre Rotterdam) en 1694 "Le monde enchanté" A propos d'un ensorcellement de 1670 il y expose tome 4 p. 576 et suiv (chap XIX) :
"L'on a fait grand bruit depuis vingt deux ou vingt trois ans, d'un ensorcellement inouï, qui fut en Suède , au village de Mohra , dans la Province d'Elfdalen, où les sorcières transportaient plusieurs enfants dans un lieu inconnu, qu'ils appelaient Blocula. Le bruit et les plaintes que l'on en fit, allèrent si loin » que le Roi fut obligé d'y envoyer des Commissaires, pour, avec les juges & les prêtres du lieu, établir un Tribunal- lesquels condamnèrent plus de septante personnes comme Sorcières , & quinze enfants qui s'y trouvèrent enveloppés, sans compter cinquante six autres. que l'on punit plus doucement, & quarante sept, que l'on laissa jusques à un nouvel examen. Le fameux Anglais, Joseph Glanvill, fait bien du bruit de cette affaire, jusques là, qu'il en a fait un extrait du Protocole du Roi, qu'il a mis à la fin de son Sadducismus triumphatus comme une preuve incontestable, à son avis, de la véritable Magie Diabolique. Mais je m'en vais en faire voir la vanité, & la fausseté notoire des confessions sur lesquelles ces pauvres malheureux ont été brûlés. L'on imprima dans la même année à la Haye, une pareille relation en Flamand, sur laquelle je m'arrêterai. Mais comme je serais trop long, si je voulais la mettre ici toute entière & y ajouter mes remarques, je n'en tirerai que le principal, & je ferai voir par les mêmes termes de la relation, tirés de différents endroits, que toute cette affaire n'était que pure imposture , & que les Dénonciateurs, les Sorciers, & les Juges mêmes, étaient ensorcelés.
§••2. L'abrégé de cette relation est donc qu'il y a un certain lieu appelé Blokula, qui n'est connu que des Sorciers & qui est le lieu où le Diable les emporte lequel après qu'ils l'ont invoqué par trois fois à l'entrée d'un antre, en disant 'Antesser, viens & nous porte à Blocula, leur apparait sous différentes formes , mais la plupart du temps en juste-au-corps, gris, en chausses rouges & en bas bleus , avec une barbe rousse, un chapeau pointu , des rubans bigarrés tout autour, & de longs rubans à ses chausses'. Il les porte donc à travers de l'air, mais il faut qu'ils aient quelques enfants soit des leurs, ou de quelqu'autre qu'ils aient dérobés & cette heure beaucoup plus qu'autrefois ,car il en faut jusques à quinze ou seize , & cela toutes les nuits qu'ils vont au Sabbat. Ils montent sur toutes sortes de bestiaux, mais particulièrement sur des chèvres, Ils se servent même pour cet usage d'hommes, de bâtons & de piques , seIon que cela leur échet Quand ils sont,arrivés à Blocula, l'on fait un festin. Les Sorciers se mettent à table, mais les enfants se tiennent debout contre la muraille.
§ 3. Voici les propres termes de la relation. 'La première chose qu'il faut qu'ils fassent à Blocula, c'est, qu'ils renient tout ce qu'ils ont de plus saint , qu'ils le donnent au Diable en corps en âme , & qu'ils ratifient ce don par serment', (je ne sais par quel Dieu ils jurent) (...) § 7 Que si ces échantillons ne suffisent pas, pour faire voir que toute cette affaire de Blocula n'est qu'une méchante sottise, considérez, je vous prie, ce qui s'ensuit." Et il continue de détailler les absurdités du récit de Glanvill (Glanvill dont on a évoqué précédemment la mémoire et le livre de 1681 à propos de Wesley).
Glanvill, on le voit dans cet exemple, a donné du fil à retordre à ses contemporains. Il a assez d'autorité intellectuelle pour susciter les controverses, et cependant (Wesley lui-même le lui reprochera), il accorde trop de crédit aux témoignages des gens simples (quoique sur les sorciers le témoignage en rejoigne beaucoup de remarques de Carlo Ginzburg dans "Le sabbat des sorcières").
"Le mysticisme, la théurgie, l'hermétique, la magie, la kabale se sont dans plus d'un esprit supérieur confondus avec la sagesse. Depuis les Alexandrins, ces illusions ne se sont jamais peut-être emparées d'un esprit plus sain et plus vigoureux que celui de Joseph Glanvill" allait dire de lui Charles de Rémusat au XIXe siècle (Histoire de la philosophie en Angleterre t2 : p. 187 et suiv) "c'était un écrivain plein de verve et d'esprit, continue-t-il, et il promettait à la vérité un utile et brillant athlète. Malheureusement, il ne tarda pas à compromettre sa cause; son premier ouvrage avait paru depuis peu, que dans sa Scepsis scientifica qui n'en est guère que la paraphrase, il donnait déjà le scandale d'un scepticisme qui admet la possibilité de la sorcellerie, et il confirmait aussitôt celte rêverie avec un grand appareil de preuves dans un traité spécial.C'est un point dont il n'a jamais douté". Il s'agit du traité "A Blow at modern Saduccesims in Some philosophical considerations touching the beings of Witches and Witchcraft" de 1666. "Il n'est pas le seul de ses contemporains que le spiritualisme entraînât au spiritisme" ajoute Rémusat qui précise que Glanvill était un admirateur et disciple de Descartes comme Bekker : il voyait en lui un chantre du pouvoir de l'esprit, du scepticisme et du spiritualisme. Glanvill était une illustration grandiose de la possibilité de concilier défense de la science et de la philosophie et adhésion aux témoignages sur la sorcellerie.
Edgar Poe allait citer Glanvill dans "Les plus beaux contes" traduit par Baudelaire.
En Amérique Cotton Mather, savant théologien né à Boston en 1663 allait suivre les pas de Glanvill dans un traité "Wonders of the Invisible World" ("Les Merveilles du monde invisible, tirées de l'analyse des procès de différents sorciers, exécutés récemment dans la Nouvelle Angleterre), sur la chasse aux sorcières de Salem, publié par ordre du gouverneur du Massachussetts et réimprimé à Londres en 1693. Sur le "champ" de discussion dans lequel s'insère le débat sur les sorciers, voir la page Wikipedia ici.
Ce que personnellement je trouve très intéressant chez Glanvill comme chez Wesley, c'est qu'il voit dans l'adhésion au témoignage des personnes victimes de sorcellerie un argument décisif contre l'athéisme. Dans sa préface au "A blow to modern saducceism" il écrit "I appear thus much concerned for the justification of the belief of Witches, it suggesting palpable, en current evidence of our Immortality, which I am exceedingly solicitous to have made good".
Kant et Swedenborg
Kant commença sa carrière philosophique en écrivant en 1755 un livre "Histoire générale de la nature et théorie du ciel" puis y renonce, non pas, comme l'a prétendu Jules Vuillemin ("Physique et métaphysique kantiennes", PUF, 1955) parce qu'il lui manquait des éléments scientifiques sur la chaleur, mais parce que, comme il l'écrit en 1766 dans son "Rêves d'un voyeur d'esprits expliqués par des rêves de la métaphysique", parce que cette théorie lui semble aussi délirante que celles du médium Swedenborg (1688- 1772) dont les thèses parurent entre 1749 et 1756 "Arcana caelestia". Swedenborg y exposait le caractère uniquement apparent de la nature (Monique David-Ménard, "La Folie dans la raison pure", Vrin, 1990 - un livre qui ne rend pas complètement justice à l'ampleur du revirement du philosophe sur les prodiges du médium). Kant ne se contente pas de récuser l'occultisme. Dans "Rêves d'un voyeur" il admet que la pathologie des occultiste pourrait avoir pour cause des esprits réels, puis fait volte-face et revient à une causalité physiologique" de l'occultisme, puis, conscient du caractère dogmatique et indémontrable de la seconde hypothèse conclut sur la philosophie comme critique (de sorte que c'est à la confrontation avec Swedenborg et non à Hume que Kant doit l'invention de son criticisme). Impressionné par le fait que l'homme ignore les esprits et le visionnaire ignore la nature, Kant s'était penché de près sur le livre de Swedenborg au point de ne pouvoir signer son "Rêves d'un voyeur" malgré le ton railleur à l'égard de l'occultisme qu'il emploie. Dans une lettre à Moïse Mendelssohn (8.4.1776) il reconnaît sa fascination pour Swedenborg, mais il y a des éléments encore plus percutants sur l'adhésion de Kant aux prodiges du mage suédois, éléments que tous les livres de la seconde moitié du XXe siècle ont passé sous silence.
En décembre 1911 dans la revue "La Femme" p. 179, on pouvait lire sous la plume de Mme Marie d'Abbadie d'Arrast (membre du comité de l'Oeuvre protestante des prisons et du Conseil national des femmes françaises) :
Svedenborg a eu des songes et des visions plus dignes d'attirer notre attention que les rêves enfantins et bizarres des pauvres filles dont nous saluons la mémoire. Svedenborg n'était ni un simulateur, ni un homme d'intelligence ordinaire. Sa clairvoyance paraît avoir été surprenante et indéniable. Le philosophe Kant (1) rapporte de lui le fait suivant, je cite la page : « M. de Svedenborg, revenant d'Angleterre, prit terre à Gothembourg. M. William Gastel l'invita chez lui le samedi soir en même temps qu'une société de quinze personnes. Ce soir-là, à six heures, M. de Svedenborg, qui était sorti, rentra pâle et consterné au salon, il dit qu'un grave incendie venait d'éclater à Stockholm et que le feu s'étendait rapidement. Or, Gothembourg est situé à 400 kilomètres environ de Stockhom. Il était inquiet et sortit plusieurs fois, indiquant la marche du désastre. A 8 heures, après être sorti de nouveau, il s'écria tout joyeux : « Dieu soit loué ! L'incendie s'est éteint à trois portes de ma maison. » Mandé devant le gouverneur de la ville, Svedenborg décrivit exactement l'incendie de telle sorte que toute la ville en fut informée. Le surlendemain, c'est à dire le lundi soir, un estafette arriva à Gothembourg, confirma de point en point le fait de seconde vue de Svedenborg. » Kant a admis ce fait extraordinaire comme certain. M. Edouard Schuré (2) répond : "On peut discuter sur la réalité objective des visions de Svedenborg, mais on ne peut douter de sa seconde vue attestée par une multitude de faits." ».
(1) "Svedenborg" par le pasteur Charles Byse, p. 115. Lausanne, eds Georges Bridel, 1911. Il s'agit de l'incendie du 19 juillet 1759 que Kant situe à tort en 1756 "Le fait suivant me paraît avoir entre tous la plus grande force démonstrative, et certainement il coupe court à tous les doutes imaginables" aurait écrit Kant. Byse se réfère à deux correspondances de Kant dont une qu'il dit traduire mot à mot mais dont il ne mentionne pas la date et une seconde quatre ans plus tard à Mlle Charlott de Knobloch devenue en 1763 ou 1764 baronne de Klingshorn, dont une serait reproduite partiellement dans la "Children's encyclopedia" (Byse p. 17). Il estime que c'est ensuite sous la pression de ses pairs que Kant aurait mis en doute dans une "brochure brumeuse" (le "Rêves d'un voyeur d'esprits expliqués par des rêves de la métaphysique" de 1766) les dons du médium. Il semble que Kant ait aussi fait allusion à un deuxième prodige de Swedenborg arrivé à Mme de Marteville à propos d'une quittance de son défunt premier mari (racontée par courrier de son second époux d'Eiben) et d'un troisième à propos de la reine Louise-Ulrique, soeur de Frédéric le Grand de Prusse, en 1761 (mais Byse cite Kant mot en mot sans préciser la source, on peut supposer que c'est dans le "Rêves d'un visionnaire").
(2) Les grands initiés de M. Edouard Schuré (1841-1929) cité par Ch. Byse.Schuré dans la version de poche du livre (édition 2015) p. 352, qui compare ce fait avec la vision qu'Apollonios de Tyane eut à Ephèse de l'assassinat de l'empereur Domitien, précise que Kant demanda à un ami d'enquêter sur l'incendie de Stockholm et que Kant évoque cela dans une lettre à Charlotte de Knobloch citée par Jacques Matter dans Swedenborg, sa Vie et sa doctrine (eds Didier et Compagnie, Paris 1863). Effectivement Matter, conseiller honoraire de l'université dont le livre se trouve ici cite effectivement en page 148 de la deuxième édition du livre l'incendie de Stockholm, et fait précisément référence à une lettre du 10 août 1768 (deux ans après la publication du Rêves d'un visionnaire) à Charlotte de Knobloch. Dans cette lettre il évoque la quittance de Mme de Marteville et l'incendie de Stockholm qu'il situe en 1756 dans cette lettre (et non plus en 1759 comme dans le "Reves d'un visionnaire"), et Matter cite mot-à-mot la partie de la lettre qui concerne l'incendie.
"La seule ville de Manchester compte 7 000 disciples de Svedenborg ; et l'on estime qu'il y en a près de 20 000 en Angleterre" précisera (p. LXVIII) l'auteur anonyme de l'Abrégé des ouvrages d'Em. Swedemborg, publié à Strasbourg en 1788 tandis que des magnétiseurs utilisaient les pouvoirs de somniloquespour démentir les thèses de Svedenborg (ibid p. LVII)
Sur l'importance du swedenborgisme dans la mouvance protestante, on lit encore p. 181 de la revue précitée "La Femme" : "A Paris même, dans le quartier des Invalides s'élevait un lieu de réunion où les Svedenborgiens célébraient un culte spiritualiste, sans faste, sans cérémonies pompeuses. Il y a une vingtaine d'années, on pouvait encore croiser quelquesuns de ces chrétiens paisibles, hommes de bien, membres de cette petite communauté de la nouvelle Jérusalem ; car c'est ainsi que se désigne elle-même i'Eglise.de l'apôtre suédois. Les premiers disciples, d'après les biographes de Swedenborg (1), auraient cru qu'une Eglise de la nouvelle Jérusalem existait parfaitement organisée au centre de l'Afrique. Entrainés par la force de leurs convictions, ils s'embarquèrent pour la visiter. Grâce au dévouement de ces missionnaires, l'Evangile fut répandu dans quelques districts du continent noir: ils contribuèrent à la fondation de colonies libres ; ils firent de courageux efforts en faveur de l'affranchissement des nègres et de la suppression de la traite; ils coopérèrent à l'établissement de Sierra Leone, où Ulric Nordenskioeld a fondé, avec son compatriote Azélius une communauté svedenborgienne qu'a visitée plus tard Walstrôm et Sparmann. Les trafiquants de chair humaine et les marchands d'alcool ont été les adversaires résolus et redoutables de la petite colonie de ces paisibles chrétiens."
(1) M. M. Gatteau Galleville et de Gluny, Biographie universelle.
Le succès de Swedenborg (qui eut Goethe et Balzac pour admirateurs) dans les cercles protestants est étrange. Jonathan Black dans son Histoire secrète (p. 191) décrit ce découvreur du cortex cérébral et des glandes endocrines comme franc-maçon et il me semble avoir lu des choses assez horribles sur ses moeurs... sous réserve de vérification...
A noter que Wesley dont nous parlions récemment ne prit jamais Swedenborg au sérieur :
Selon le Dr Gilbert Ballet ("Swedenborg, Histoire d'un visionnaire au XVIIIe siècle" -1899), il appréciait de la façon suivante les écrits de Swedenborg dans son journal, en 1770 : "Je me suis mis à lire les écrits du baron de Swedenborg et à y réfléchir sérieusement. J'ai commencé cette lecture avec beaucoup e prévention en sa faveur, sachant que c'était un homme pieux, d'un grand entendement, de beaucoup d'instruction et d'une foi vive. Je fus pourtant bien détrompé. Il suffit de connaître une seule de ses visions pour se mettre hors de doute sur son vrai caractère. C'est un des fous les plus ingénieux, les plus agréables, les plus amusants qui aient jamais mis la main à la plume. Ce sont des rêves à dormir debout, mais si extravagants, faisant si complètement divorce avec l'écriture et le bon sens, que l'on pourrait avaler aussi franchement les contes du Petit Poucet ou de Jack le destructeur de géants." (18)
(18) Matter, Notes, p. 429
John Wesley et la sorcellerie
Je travaille sur John Wesley (1703-1791), fondateur du méthodisme, qui était une des grandes références de feu le pasteur Derek Prince. Je lisais il y a peu un article de l'artiste canadienne Lorette C. Luzajic qui accusait Wesley de sorcellerie parce qu'il aurait guéri des gens et même ressuscité un mort selon Stephen Tomkins. Mais Lorette C. Luzajic ayant dit du bien de Michael Jackson dans un de ses livres, on n'est pas obligé de la croire (voir ce que moi-même j'écrivais à propos de ce chanteur il y a un an ici)...
Mais il est vrai que l'accusation de sorcellerie existe dans le méthodisme comme dans d'autres cultes chrétiens. A preuve cette accusation de connotation wiccane des United Methodist Women (UMW) à Orlando (Floride) en mai 1998 dans un article de Tom Graffagnino .
Wesley eut une attitude intéressante. A la fois il combattait la sorcellerie, et il insistait pour qu'on la prenne au sérieux pour pouvoir mieux la combattre et parce qu'elle était une sorte de preuve négative de l'existence de l'au-delà.
“Most of the men of learning in Europe have given up all account of witches and apparitions as old wives’ fables…. The giving up of witchcraft is the giving up of the Bible. With my last breath I will bear testimony against giving up to infidels one great proof of the invisible world, witchcraft … confirmed by the testimony of the ages,” a-t-il écrit dans son Journal de 1768.
A une époque où le rationalisme anglais préparait la dépénalisation de la sorcellerie (qui allait entraîner l'explosion de la Wicca) parce que beaucoup de gens n'y croyaient plus, Wesley, du haut de l'autorité de sa solide formation à Oxford, décrit précisément la sorcellerie, par exemple dans ses notes sur la Bible ici :
" 10. Useth divination - Foretelleth things secret or to come, by unlawful arts and practices. An observer of times - Superstitiously pronouncing some days lucky, and others unlucky. Or, an observer of the clouds or heavens, one that divineth by the motions of the clouds, by the stars, or by the flying or chattering of birds, all which Heathens used to observe. An inchanter - Or, a conjecturer, that discovers hidden things by a superstitious use of words or ceremonies, by observation of water or smoke or any contingencies. A witch - One that is in covenant with the devil. 11. A charmer - One that charmeth serpents or other cattle. Or, a fortune-teller, that foretelleth the events of men's lives by the conjunctions of the stars. Spirits - Whom they call upon by certain words or rites. A wizard - Hebrew. a knowing man, who by any forbidden way's undertakes the Revelation of secret things. A necromancer - One that calleth up and inquireth of the dead."
Comme l'écrit Pavel Rutkowski, de l'université de Varsovie : "Wesley’s Journal – written and published with the purpose of communicating his views and opinions to fellow Methodists – contained numerous extraordinary accounts of prophetic dreams, appearances of Christ and angels, instances of spontaneous combustion of corpses, treasure troves revealed by spirits, use of second sight, etc. Most space, however, was devoted to people’s contacts with the souls of the dead, demonic possession, and the way such phenomena were related to witchcraft".
L'intérêt de Wesley pour la sorcellerie serait venu du fait qu'après avoir échappé de justesse d'un incendie pendant son enfance, il avait été à 13 ans témoin du Poltergeist (manifestation d'esprits) d'Epworth (dans le Lincolnshire) dans sa propre maison en décembre 1716 qui dura jusqu'en février (voir The life and Times of the Rev. Samuel Wesley par L. Tyerman, London, Simpkin, Marshal & Co, 1866 p. 350).
Les partisans de Wesley suivaient le sillage du chapelain du roi Charles II, Joseph Glanvill, qui avait publié Sadduccismus Triumphatus en 1681 et tenait la négation de l'existence des démons pour un sadduccéisme moderne. Le magazine du mouvement méthodiste Arminian Magazine,reprit même l'épisode du "frappeur de Tedworth" (Drummer of Tedworth) cité par Glanvill. Mais Wesley savait faire preuve de discernement à l'égard de certains excès des croyances aux esprits.
Wesley, explique Rutkowski, à la différence de la plupart des protestants, ne croyait pas que les morts aillent au Ciel ou en Enfer, et que les apparitions spirites étaient de simples démons. Il croyait que les morts revenaient réellement livrer des informations aux vivants. Cela lui fit adhérer sans réserve au témoignage d'Elizabeth Hobson une jeune fille de Sunderland qui disait avoir des apparitions de gens morts depuis son enfance (tout comme il prenait au sérieux les cas de possession...). Mais dire que le spiritisme n'est pas d'essence démoniaque, n'est-ce pas une manière de le légitimer d'un point de vue théologique ?
Encore un mot sur Hermas
Un précision à la suite de notre précédent article sur Hermas. En 1900, Daniel Voelter (1855-1942), professeur de théologie à Amsterdam, publiait à Berlin une brochure de 54 pages expliquant que les visions I et II du Pasteur, selon lui, étaient des visions de la sibylle de Cumes et non de l'Eglise. Il s'agissait seulement de révélations sibyllines à un particulier, écrites pour cela en prose, qui n'ont été christianisées que tardivement. Et Hermas serait un prosélyte juif, d'où le fait qu'il cite dans sa IIe vision un Clément, Clément de Rome dont la tradition a fait un pape, qu'un fragment des Homélies clémentines (IV, 7-IV, 26) présente comme un converti au judaïsme et non au christianisme (revue L'Université catholique 15 janvier 1901 p. 303). Mais dans un rapport annuel à l'Ecole pratique des hautes études évoqué dans la revue archéologique de 1902 (p. 140), Jean Réville (1854-1908), lui aussi théologien protestant, démentait l'idée qu'il pût s'agir d'une adaptation d'un original juif.
Aimé Puech (1860-1940) dans son Histoire de la littérature grecque va dans le même sens et conteste qu'Hermas fût juif d'origine. Il estime (tome II 1928 eds les Belles lettres p. 92) que le nom d'Hermas est grec "et le rattache même à cette Arcadie où il a placé la scène de la neuvième Similitude". Pour lui Hermas pourrait venir de là, et il note que sa maîtresse à Rome a un nom grec. Il note que la liste des vertus d'Hermas fait songer au tableaux de Cébès, qu'elles ont des noms grecs (Synesis, Aletheia, Homonoia) En suivant Richard August Reitzenstein, Puech suppose, à cause de similitudes sur sa liste des vices, qu'Hermas a pu connaître une rédaction primitive du livre hermétique intitulé Poimandrès, mais estime que l'influence hermétique porte sur le style mais non sur le fond. Il trouve ce style populaire, simple, avec quelques incorrections, mais parfois élégants et ne traduisant pas une origine étrangère (par exemple sémitique). Il souligne que son texte ne porte à ucune référence à Jésus, et que sa référence aux anges l'a fait traiter d'idiot par St Jérôme.
Jusqu'au concile de Rome de 497 sous le pape Gélase on n'a pas su si Le Pasteur avait sa place dans le canon des Ecritures. Irénée de Lyon (Contra hoereses,1,IV,c,xx), Clément d'Alexandrie, Origène (comme le faisait déjà remarquer Leibniz dans ses Opera theologica p. 632) et Cassien ont traité le Pasteur sur le même plan que les saintes écritures et lui trouvaient une inspiration divine.
La religion des Yézidis

La religion Yazidi (yézidie, on adoptera les deux orthographes) professe la croyance en un dieu singulier «suprême» [semblable au dieu biblique] qui se manifeste sous la forme de «Sept Grands Anges", dont le chef est un paon nommé Tawsi Melek. Le paon roi Tawsi Melek est descendu sur terre pour donner vie à l'Adam biblique dans le jardin d'Eden. Par la suite, Eve a été créé. Les Yézidis croient que Adam a réussi à produire une descendance spontanément sans Eve. Adam avait un fils par génération spontanée nommée Shehid bin Jer qui est devenu l'ancêtre de la race Yazidi. Tous les autres peuples sont soupçonnés d'être les descendants de l'accouplement d'Adam et Eve, tandis que les Yézidis sont les descendants d'Adam seul. Selon la légende, l'ange-paon Tawsi Melek (qui est un mélange de Jésus et de Lucifer) a transmis ses connaissances au fils d'Adam Shehid bin Jer qui est devenu le fondement de la religion Yazidi de sa progéniture.
Les Yézidis croient que le jardin biblique de l' Eden était un âge d' or de la sagesse et de la prospérité. Selon eux, le déclin moral a commencé il y a 6000 ans quand le dieu Yazidi a envoyé un déluge pour nettoyer la terre. Ce point est presque identique à l'inondation de l' histoire de Noé dans la Bible. Après le déluge, les Yazidis ont été dispersés en Inde, en Afghanistan et en Afrique du Nord. Il y a 4000 ans, selon la légende, les Yazidis ont commencé à revenir dans le Nord de l' Irak. Dans le XI ème siècle, la culture Yazidi a été réformée par un sage soufi nommé Cheikh Adi. Le cheik Adi a également mis en forme le système moderne des castes yézidies.
Ce système est strictement héréditaire (à la différence des Hindous) et certains disent qu'il a été emprunté à l'Inde. Il existe trois principales castes des Yézidis. Les Cheiks sont la plus haute caste, c'est un mot arabe qui signifie «chef ». Les cheiks sont en outre divisés en sous-castes: Faqirs, Qewels et Kochecks (on mentionne aussi les noms de Samsani, Adani et Qatani défenseurs de la foi). Les Faqirs ou Fakirs (un mot pour soufi) sont les plus élevés des cheiks, ce sont prêtres qui sont souvent pris en charge par les autres castes à travers un système de dîme. Les Qewels sont des bardes ou chanteurs qui assistent à des cérémonies. Kochecks (au féminin Fagras) sont les voyants et médiums qui servent dans les lieux saints de Lalish (dans la province de Dohuk, tout au nord de l'Irak), ils peuvent venir de toute caste. La deuxième plus haute caste sont les Pir, un groupe héréditaire qui prétend descendre d'un saint homme nommé Peer Alae. Les Pir sont soupçonnés d'avoir des pouvoirs mystiques. Les Pir sont présents à toutes les cérémonies de mariage, d'enterrement et de naissance et aident les Sheik. Ils sont également des conseillers. Chaque Yazidi de chaque caste est tenu de prendre un Pir et un Sheik comme guide pour la vie. Enfin, il y a la caste Murid héréditaire qui sont les «roturiers» qui sont les «roturiers» ou les "disciples" .
Les Yézidis ont également deux positions officielles fondées sur la caste et l'hérédité. Le «Mir» est le prince des Yézidis. Il est le chef temporel et religieux du peuple Yazidi et parle en leur nom au niveau national et international. C'est aussi le chef de l'Etat théocratique Yazidi, il occupe une position héréditaire et les membres sont issus de familles Sheikh spécifiques appelées «familles Col». Après le Mir vient le Baba Cheikh, appelé le «pape» de Yazdinism. Baba signifie «père» et le Baba Cheikh est le chef spirituel de la communauté Yazidi, mais ce Cheikh est subordonné au Mir dans tous les domaines temporel et spirituel.
Les fêtes des Yézidis.
La nouvelle année Yazidi ressemble à Pâques. Elle est célébrée le mercredi et commémore le moment où Tawsi Melek est descendu sur terre pour apaiser un tremblement de terre et de répandre ses couleurs de paon. Ce jour-là, les Yézidis peignent des oeufs (tout comme certains chrétiens orthodoxes le jour de Pâques). Il y a aussi un banquet tenu dans les cimetières pour honorer les morts. La Parade des Sanjaks est marquée par la procession du paon sacré à travers les villages (il est normalement logé dans la résidence du Mir). Le paon est dit avoir été amené de l' Inde par la diaspora yézidie. Le jeûne du Sacrifice est de 40 jours de jeûne. Il est observé par les hommes saints de Lalish à la mi-Février. Il commémore le jour où l'Abraham biblique a tenté de sacrifier son fils Ismaël (c'est le nom musulman qui est retenu). La fête des sept jours fête a lieu au début Octobre et est un moment où Yazidi faire un pèlerinage à leur saint sanctuaire de Lalish. Durant cette fête un boeuf est chassé et lorsqu'il a été capturé, il est abattu et cuit. La viande est distribuée parmi les participants au sacrifice, ce que certains rapprochent de la fête juive de Korban. Le jeûne de trois jours du lever au coucher du soleil de Décembre ressemble à la fête islamique du Ramadan. Les Yézidis doivent prier 5 fois par jour (comme pour les musulmans). Les Yézidis ne doivent pas effectuer leurs prières en présence d'étrangers. Le samedi est considéré comme un jour de repos (comme le sabbat juif).
Les Yézidis croient en la réincarnation comme les hindous, mais ils ne sont pas incinérés comme eux. Ils disent qu'à leur mort, leur âme rencontre dans l'au-delà le soufi Sheik Adi qui les interroge sur leurs pratiques sexuelles passées. Les rapports sexuels avec des non-yézidis ou des personnes d'autres castes pourrait interdire à un Yézidi d'entrer dans le paradis. Certains Yazidi croient en enfer, d'autres croient que les flammes de l'enfer ont été éteintes par les larmes de Tawsi Melek. Les Yézidis croient qu'ils se réincarnent jusqu'à ce qu'ils atteignent un niveau de pureté qui leur permet de monter au ciel pour l'éternité. Les Yézidis impurs sont punis en se réincarnant dans le corps d'un non-Yazidi, ce qui est la pire punition possible.
Jésus joue un rôle important dans cette religion.
Ils considèrent les chrétiens comme leurs amis les plus proches. Les Yézidis ont hébergé chrétiens pendant le génocide arménien et des chrétiens ont aidé des Yézidis à fuir vers l' Europe et l' Amérique sous la dictature de Saddam Hussein en Irag. Jésus est reconnu comme un grand prophète de Tawsi Melek et son nom est invoqué dans les prières des Yazidis. Ils prétend que le charpentier yézidi nommé Yosef Nagar (comme Joseph dans l'Evangile) habitait à Jérusalem lorsque Jésus était un jeune garçon et a enseigné au futur «prophète» les pratiques et l' art de la guérison par les herbes. Les livres saints des Yézidis affirment que Tawsi Melek était un guide et qu'il aidait Jésus. Le dieu Yazidi est dit avoir envoyé Tawsi Melek pour déplacer la pierre qui bloquait la tombe de Jésus et qu'il était un ange protecteur qui est resté à proximité. Le réformateur Sheike Adi est réputé avoir été un sectateur de Jésus. Son maître sufi al-Hasan al-Barsi avait proclamé qu'il n'y a pas de messie "madhi" mais que Jésus était ce madhi.
Il existe aujourd'hui des tentatives d' "inculturation", c'est à dire d'introduction du catholicisme dans le yézidisme. Selon le site hindou Hindugeopolitics, le chrétien templier basé en Arizona Mark Pinkham (Mark "Amaru" Pinkham) essaie de fusionner catholicisme, yézidisme et hindouisme, dans le concept de hidzianité à travers le dieu de la guerre hindou au paon Murugan, Melek Taus et Jésus. Il dirige un Ordre International des Templiers Gnostiques (International Order of Gnostic Templars ™ - IOGT) et son dernier livre “Guardians of the Holy Grail: The Knights Templar, John the Baptist and the Water of Life" tente de placer le Jardin d'Eden et la lignée des prophètes du «Saint Graal» tels que Jésus et Jean-Baptiste dans le prolongement de l'hindouisme du Sri Lanka. Ce gnosticisme est aussi très tourné vers la déesse mère comme le Da Vinci Code. La revue en ligne Covertwires en septembre 2014, juste après le génocide de Sinjar, a interviewé ce gourou de secte sur son livre de 2002 The Truth Behind the Christ Myth: The Redemption of the Peacock Angel. En 2007 sur Vancouver Coop radio il expliquait que les yézidis auraient fondé leur religion en Inde il y a 6 000 ans...Ce personnage est présenté comme le gourou d'une secte sexuelle crowleysienne dans le livre "Confession of an Illuminati" de Leo Lyon Zagami en 2015.
Mark Amaru Pinkham dirige aussi le site YazidiTruth.org . Déjà en 2007 il faisait campagne contre le "génocide" des yézidis en soutenant le témoignage du fakir Kawwal Khoudeida Hasan qui dirigeait une communauté d'une cinquantaine de familles yézidies dans le Nebraska.
Psychiatrie et possession
On trouvera dans la vidéo ci-dessous un témoignage intéressant d'un fils de pasteur. Intéressant pour moi parce qu'il me rappelle des situations auxquelles j'ai été confrontées, quoiqu'à un niveau bien moindre, fort heureusement, que cette famille du pasteur Peterschmitt.
J'estime que le pasteur et la psychiatre se trompent quand ils déclarent que la maladie psychiatrique est différente de la possession. Ils affirment au vu de leur expérience de la délivrance que la maladie a sa logique propre. C'est vrai, mais cette logique a bien une origine métaphysique. Je l'ai observé dans le cadre de mon enquête auprès des médiums, et j'espère pouvoir évoquer cela prochainement dans un livre.
Une voyante tourangelle vers 570
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Voici mon passage préféré dans "L'Histoire des rois francs" de Grégoire de Tours car il nous montre à la fois une voyante à l'époque des mérovingiens, le jugement des hommes d'Eglise sur son compte et le fait que les clercs lisaient au hasard la Bible (ce qu'on trouve en d'autres passages de l'ouvrage y compris pour prédire l'avenir).
Comme Constance de Rabastens, la voyante en cause a prédit avec succès certains événements antérieurs, mais là elle se trompe (je lisais il y a peu qu'au même moment à Byzance des possédés donnaient oracle dans les églises car le démon leur révélait des aspects de l'avenir).
Il s'agit ici de Histoire des Francs. 1 / par Grégoire de Tours dans sa version de 1823 - J.-L.-L. Brière (Paris) - établie par Guizot (p. 238) légèrement différente de la version traduite du latin par JJE Roy accessible en Folio Gallimard de nos jours (p. 114).
" Un jour que j'avais été invité à la table [de Mérovée], comme nous étions assis l'un près de l'autre, il me demanda avec instance de lui lire quelque chose pour l'instruction de son âme, et ayant ouvert le livre de Salomon je pris le premier verset qui me tomba sons les yeux contenant ces paroles « Que l'œil de celui qui insulte son père soit arraché « par les corbeaux des torrens et dévoré par les enfans de l'aigle » II ne le comprit pas et je regardai ces paroles comme une prédiction du Seigneur à son sujet.
Gontran (Boson) envoya alors un de ses serviteurs vers une femme qu'il avait connue dès le temps du roi Charibert, et qui avait un esprit de Python afin qu'elle lui apprît ce qui devait arriver. Il soutenait qu'elle lui avait annoncé d'avance non seulement l'année, mais le jour et l'heure où devait mourir le roi Charibert ; elle lui fit dire par ses serviteurs « Il arrivera que le roi Chilpéric mourra cette année et que le roi Mérovée régnera sur tout le royaume à l'exclusion de ses frères. Tu auras pendant cinq ans le commandement de tout le royaume mais la sixième année, par la faveur du peuple tu obtiendras la faveur de l'épiscopat dans une des cités situées sur la Loire à la droite de son cours, et tu sortiras de ce monde vieux et plein de jours. » Lorsque ses serviteurs lui eurent, en arrivant, annoncé cette nouvelle, transporté de vanité comme s'il eût déjà siégé dans la cathédrale de Tours, Gontran vint aussitôt me rapporter ces paroles. A quoi, riant de sa sottise, je lui dis « C'est à Dieu qu'il faut demander ces choses il ne faut pas croire ce que promet le diable car il est menteur et père du mensonge" 'ev Jean 8,44' » Lui donc s'en étant allé confus, je riais beaucoup de cet homme qui pensait qu'on devait croire de telles choses."
La version de JJE Roy précis au début du second paragraphe "Il y avait alors à Tours une femme qui faisait profession de prédire l'avenir" et ne dit rien de "l'esprit de Python". Et le "elle lui fit dire par ses serviteurs" est traduit par "la réponse de la prétendue prophétesse ne se fit pas attendre" sans mention de ses serviteurs.
Les malédictions dans les bains romains
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Voici un sujet qui touche à la fois à mon livre sur les massages chinois et à mon projet de livre sur les médiums. Dans une contribution au livre "From Polites to Magos" qui a été dédiée au chercheur hongrois György Németh en juin dernier et publiées sous l'ISBN 978-963-284-796-2. Sylvia Alfayé de l'université de Saragosse sous le titre "Mind the Bath, magic at the Roman bath-houses" ("Attention aux bains, la magie dans les thermes romains) attire l'attention sur les malédictions dans les bains romains.
En Grande-Bretagne ont été trouvés, explique l'article, des tablettes de malédiction dont la plus grande partie proviennent du sanctuaire thermal de Bath, consacré à la déesse Sulis Minerva. Mais l'article se concentre sur d'autres sites britanniques moins connus comme Chesterton-on-Fosse, Leintwardine, Leicester, Eccles. Il relève que la découverte de tablettes de malédiction dans des établissements de bain n'était peut-être pas fortuite. Les bains peuvent être en effet être des "fearscapes" (un néologisme lié aux pratiques magiques) habitées par des Daemones (des entités) et des fantômes, dont la manipulation était très pratique pour l'action magique.
En effet, "en plus d'être utilisés comme espaces pour le divertissement et le plaisir -baiarum grata voluptas-, les thermes romains ont également été perçus et expérimentés à l'âge classique
comme des espaces d'anxiété - ou «des lieux effrayant» - où toutes sortes de dangers
rôdaient: vols professionnellement effectués par le «voleur de bains", "un personnage de la vie réelle qui a sévi thermes romains à travers l'Empire "; le risque de glisser ou de tomber sur un sol mouillé, ou de voir les murs ou les plafonds s'effondrer", les viols, les transmissions de maladies etc. Alfayé renvoie à un livre de Dundabin, de 1989 1989, 35 (Dunbabin 1989 = Dunbabin, K.M.D.: Baiarum grata voluptas – Pleasures and Dangers of the Baths. Papers of the British School at Rome 57, 6-46.), qui précise que «derrière les histoires de démons des bains se trouvait une croyance populaire répandue commune aux païens, chrétiens et juifs " et cite l'exemple de la rencontre de Grégoire le Thaumaturge en 5ème de notre ère avec un démon meurtrier qui contrôlait la maison de bain, tel que décrit par Grégoire de Nysse (331-394). "L'existence de l'eau dans ces espaces les a sans aucun doute fait percevoir et utiliser comme des membranes perméables qui ont permis le contact entre la surface et ce qui est en dessous et, par là même, le transfert d'objets et des gens du monde des ténèbres". Cela fait penser aux médiums actuels comme Géraldine Garance qui insistent sur le côté "conducteur" de l'eau.
Le principe du similia similibus opérait aussi pour placer des tablettes dans les endroit les plus chauds des lieux de bains pour faire brûler d'amour ou mourir les victimes. " Charme d'amour d'attraction. Il attire les hommes vers les femmes et les femmes vers les hommes et
fait les vierges se précipiter hors de leurs maisons. Prenez un papyrus pur et avec le sang
d'un âne écrivez les noms et les chiffres suivants, et mettez à l'intérieur du tissu de la femme que vous désirez. Étalez la bande de papyrus humectée de vinaigre de gomme et collez le dans la salle de vapeur voûtée sèche d'un bain et vous serez émerveillé". La formule magique à écrire suggérait que "les victimes éprouvaient alors, dans leur propre corps, la chaleur étouffante de l'espace où la defixio (déviation magique) a été déposé (presque) pour toujours". La source est dans les Latin Papyri Graecae Magicae (PGM) - pour le dépôt dans le caldarium (PGM II, 1-64; PGM VII, 467-477)29; et dans la “salle voûtée sèche" (PGM XXXVI, 69-101).
Voilà qui nous fera considérer les bains romains autrement que sous l'angle purement ludique que retiennent nos musées.
"Constance de Rabastens, mystique de Dieu ou de Gaston Fébus ?"
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Il y a près d'un an je vous ai parlé de la visionnaire Jacqueline-Aimée Brohon (1731-1178) voir le billet ici que j'ai transformé ensuite en article pour la revue "Connaissance de l’Eure" n° 178 (4e trimestre 2015). Changeons de siècle, et intéressons nous à une autre visionnaire fascinante : Constance de Rabastens, et à son approche du chevalier Gaston Phébus (1331-1391). Je me suis demandé si cette visionnaire pouvait nous aider à saisir la signification occulte, ésotérique, de cette époque-là (et l'on a vu avec mon précédent billet sur le général Butt Naked combien cette dimension de l'histoire était incontournable, aujourd'hui comme au Moyen-Age).
Comme l'indique l'historienne Régine Pernoud dans sa préface au livre de référence à son sujet est paru en 1984 aux éditions Privat (Toulouse), Constance de Rabastens (née en 1340 ?) fut la visionnaire par excellence sur Gaston Phébus, comme un siècle plus tôt Sainte Douceline de Digne (1214-1274) le fut sur Charles d'Anjou (frère de Saint Louis et roi de Naples, le père du découvreur des reliques de Ste Baume). L'historienne les qualifie de "mystères" et les compare toutes deux à la voyante Sainte Hildegarde de Bingen (déclarée docteur de l'Eglise par Benoît XVI en 2012) dont le Livre des œuvres divines ne fut traduit en français par Bernard Gorceix que deux ans avant la publication du livre sur Constance de Rabastens (on notera d'ailleurs que Régine Pernoud se demande si Constance ne mérite pas le titre de sainte, un débat qui valut aussi pour d'autres visionnaires comme l'espagnole Marie d'Agreda au XVIIe siècle et l'allemande Anne-Catherine Emmerich au XIXe et qui, en effet, mérite de rester ouvert).
Avant Hiver-Bérenguer, Constance de Rabastens n'était pas inconnue de l'historiographie. Noël Valois (185-1915), dans La France et le grand schisme d'Occident. 1896 T. 2 écrit (p. 327) "Le puissant Gaston Phoebus passait pour urbaniste (partisan du pape Urbain) : une voyante albigeoise, Constance de Rabastens, le désignait même comme le sauveur appelé à restaurer l'autorité du pape italien". P. 368 il développe à propos de cette Constance : "Trois ans durant (1384-1386), cette femme se figura entendre des voix célestes prononcer la condamnation du pape et des cardinaux d'Avignon ou annoncer le triomphe définitif du pape de Rome, celui qu'elle appelait « l'homme juste. » Elle crut apercevoir en enfer trois cardinaux, et parmi eux Pierre de Barrière, dit le cardinal d'Autun : c'était celui que les démons persécutaient le plus. Clément VII lui apparut tantôt sous les traits d'un lépreux qui communiquait sa lèpre aux gens de son entourage, tantôt sous ceux d'un navigateur qui s'abîmait dans les flots avec le vaisseau sur lequel il venait de s'embarquer, ou bien encore environné de fumée et de ténèbres, tandis qu'au dessus de sa tête un ange brandissait une épée nue sanguinolente. Le comte de Foix Gaston Phoebus jouait dans ces visions le rôle d'un sauveur appelé à rétablir l'autorité d'Urbain, comme aussi à prendre sur Charles VI un ascendant heureux. Par contre, il n'était pas d'anathème que la voyante ne lançât contre les Armagnacs, traîtres au roi et vendus au démon. Telles sont les prétendues révélations que Constance ne se lassait pas de communiquer à son fils, religieux du couvent de la Daurade, à son confesseur, voire même à l'inquisiteur de Toulouse. Sans se faire illusion sur les suites probables de sa témérité, elle allait bravement au-devant de l'épreuve, se croyant appelée à restaurer la foi. Longtemps elle paraît avoir vécu en paix, jouissant même dans la contrée d'une certaine considération. Mais un mot d'un témoin de ses hallucinations nous renseigne sur son sort : certains détails, dit-il, furent donnés par son fils, quant ella fo encarcerada. Rien ne permet, d'ailleurs, d'évaluer la durée de l'emprisonnement qui, s'il ne termina pas, interrompit du moins la mission de la voyante urbaniste de Rabastens". Valois dit tenir cela d'Amédée Pagès (1865-1952) qui, lorsque le premier écrit son livre sur le schisme, s'apprête dit-il en note de bas de page à publier "un curieux mémoire en langue catalane" à son sujet. Pagès le lui a fait lire (il s'agit du texte publié dans les Annales du Midi 8, 1896, p. 241-27 sur lequel Hiver-Bérenguier allait travailler). Le moins que l'on puisse dire à la lecture de ces lignes est que Valois n'a pas une très haute opinion de la visionnaire (ce qui explique peut-être qu'Hiver-Bérenguier n'y fît pas référence en 1984).
L'histoire du livre d'Hiver-Bérenguier de 1984 mérite un petit développement à titre préalable, car, comme c'est souvent le cas des grandes découvertes, Constance de Rabastens n'a été redécouverte que du fait du "hasard" (qui n'existe pas), et non dans le cadre de programmes de recherches universitaires bien établis. Dans son édition du 6 janvier 1980 (deux ans après la diffusion de la série à succès "Gaston Fébus ou le Lion des Pyrénées" sur Antenne 2), le journal Le Monde publie une longue étude de l'historien de l'université de Rouen André Vauchez intitulée "Les sœurs de Jeanne", résumé de sa conférence d'octobre 1979 au colloque d'histoire médiévale d'Orléans (c'était du temps où Le Monde, d'un plus haut niveau qu'aujourd'hui, diffusait des résumés de conférences universitaires), qui cite des visionnaires : Jeanne-Marie de Maillé, Marie Robine (Marie de Gascogne) et Constance de Rabastens du Tarn. Jean-Pierre Hiver-Bérenguier, docteur en chirurgie dentaire (mais oui !), enseignant à l'université Paris VII mais originaire de ce village se rend compte qu'il n'a jamais entendu parler de cette mystique et écrit au professeur Vauchez pour lui proposer de défricher le sujet. Vauchez lui transmet sa source : les Annales du Midi de la fin du XIXe sècle où se trouvait le transcrit en catalan des Révélations de Constance de Rabastens. Pendant deux ans, avec le soutien de Vauchez, de Régine Pernoud, de Dom Grammont, père de l'abbaye Notre-Dame du Bec Hellouin, et du médiéviste Philippe Wolff, Jean-Pierre Hiver-Bérenguier avale "plus d'une centaine de livres" et pond en deux ans ce livre que la préfacière couvre d'éloges. Voilà une histoire peu commune pour un livre, mais celle de la visionnaire l'est encore moins.
Le dimanche 29 juin 1386, fête de la Saint-Paul, en l'église Notre Dame à la messe de l'aurore dans la chapelle Saint Jean, la très pieuse dame Constance, 45 ans, s'est remise à prophétiser, ce qu'elle fait déjà depuis cinq ans. Au début il y avait les visions la nuit, puis à n'importe quel moment de la journée et surtout quand elle prie aux offices de l'église ou du couvent des Cordeliers. Elle prophétisait sur les papes d'Avignon et de Rome, sur les malheurs du jeune roi de France en guerre contre les Anglais. Elle annonce la fin du monde, la victoire des Sarrasins disciples de l'Antéchrist, mais aussi une victoire de Gaston Phébus, comte de Foix et vicomte de Béarn, qui ramènera la paix. Au moment de la lecture de la deuxième Epître à Timothée "fais œuvre de prédicateur..." Constance entre en transe, les yeux fixés sur le Christ en Majesté sur la voûte, le corps raide insensible et répète "Des signes, oui, des signes..." et puis : "Le soleil... la lune... les étoiles sur toutes les terres !" (p. 17).
Le soir même son confesseur Raimond de Sabanac consigna ce qu'elle dit avoir vu, au paragraphe 55 des Révélations (sur 63). Tout le livre des Révélations est ainsi composé. En l'occurrence, lors de cette extase elle entendra Jésus lui dire que le vrai pape de Rome est le soleil, la lune les cardinaux qui ne veulent pas recevoir sa lumière du soleil, les étoiles les théologiens qui se taisent, les princes sont la Terre, Constance est sa flêche, le soleil s'imposera. Hiver-Bérenguier en s'appuyant sur un livre de Salembier de 1902 sur le grand schisme rapprochera (p. 95) cette vision de celle de Pierre d'Ailly, disciple de Joachim de Flore, qui, en s'aidant de l'astrologie, prédit dès 1414 la Révolution de 1789. D'Ailly en 1385 aurait annoncé l'Anté-Christ en ces termes : "Il y aura des signes dans le ciel, dans le soleil, la lune et les étoiles. Le soleil, ce sont les prélats ; la lune, ce sont les princes : le rayon de leur justice s'obscurcit ; les étoiles ce sont leurs membres inférieurs : la grâce disparaît en eux tous." (Sermo III, De advetu domini).
Clémence a des visions importantes sur les partisans de Clément VII pape d'Avignon et leur mort. Le 6 novembre 1384, alors qu'elle pense à la cruelle reine Jeanne Ière de Sicile assassinée en 1382, la Voix lui dit que "la mesure avec laquelle la reine avait mesuré a servi de mesure pour elle-même". La visionnaire annonça même en 1384 à un seigneur venu la consulter la mort de Louis d'Anjou, roi de Naples qui, après qu'il eut manqué le trône de France, avait mené une expédition militaire contre Rome à la demande de Clément VII : "Tu diras que mort est celui qui portait le signe de la Bête, c'est à dire le duc d'Anjou." Elle lui révèlera aussi en mars 1384 la trahison du comte d'Armagnac à l'égard du roi de France Charles VI, qui n'allait être connue que deux mois plus tard. La Voix lui parle aussi de Ninive alors qu'elle n'en a jamais entendu parler.
En 1384 ou 1385, la Voix qui lui a parlé des Flandres lui dit 20 fois que dans 7 ans le royaume de France "viendra à grand bouleversement, c'est-à-dire abattement" du fait du soutien aux papes d'Avignon et en effet en 1392 le roi sombra dans la folie.
Ses prédictions d'Apocalypse rejoignent celles de St Vincent Ferrier peu de temps après, l'image des ailes qui la libèreront sera aussi donnée à Jeanne d'Arc et se trouve dans l'Apocalypse ch 22 (la Vierge s'envole au désert pour échapper au Dragon).
Gaston Fébus est un personnage central des visions de dame Constance. Né sous le signe du taureau en 1331 (signe de la terre, il a le taureau et la vache sur son blason), il a un côté paysan têtu ombrageux mais aussi vénus en dominante, un côté artiste, séducteur. Il est entouré d'une légende à cause de ses victoires militaires, de sa richesse, et on lui prête un don de devin pour connaître ce qu'il se passe sur ses terres. Il a tué son fils en 1382.
Selon le notaire Michel du Bernis, archiviste de Fébus (dont la version selon Cabié en 1879 serai la plus fiable), le dimanche avant la Madeleine de 1381, à Rabastens Fébus livra bataille à des hommes de son rival duc de Berry, comte d'Armagnac qui venaient de piller le Lauragais et en emprisonna certains, massacra les autres. Cette victoire chevaleresque marque les Rabastinois qui en ont été témoins sous leurs remparts.
On ne sait rien de Constance, sauf qu'elle est veuve, qu'elle a une fille et un fils moine. Elle assistait à tous les offices, un baron bordelais et un seigneur clerc l'ont consultée. Elle a été jugée par l'Inquisition sur un faux témoignage et innocentée.
Son confesseur et secrétaire (comme pour Hildegarde) dont Hiver-Bérenguier dit qu'il pourrait être un homme de Fébus a introduit le livre par une mise en garde contre les visions, comme Gerson 30 ans plus tard. Il les a notées dans le désordre. Il les a écrites de 1384 à 1386, et à propos d'une vision du 4 octobre 1384 dit que Constance en avait depuis plus de deux ans.
Vers 1881 donc (peut-être après la bataille de Rabastens, mais Cabié lui situera l'événement fondateur des visions en 1374, cf Madeleine Jeay) elle voit une montagne de cadavres et une voix lui dit qu'il y aura des cadavres mais que ce qu'elle entendra sera a vérité. Elle pense que cela vient de Jésus. A la mort de son mari peu après, la voix lui annonce qu'elle quittera le monde comme une moniale. Elle se rendra souvent au couvent des cordeliers. Jésus lui apparut une fois comme un homme habillé de satin, une autre comme un seigneur sur son trône, puis nu couvert d'un manteau blanc portant une grande croix à la main et en colère, une autre dans sa vision Jésus dans l'église se détache de sa croix puis, après qu'elle lui ait baisé les mains, frappe des gens avec un bâton et demande qu'on le remette en croix (p. 87). Elle vit aussi la Trinité. Beaucoup de ses visions sont aussi des paraboles : arbre vert, cygnes, brebis remparts, navires qui sont des métaphores de villes, de la papauté etc.
A propos de Fébus, le mardi 9 mais 1384, la Voix lui dit "Alors se dressera la Grue à la tête vermeille, c'est à dire le comte de Foix, qui redressera l'Homme juste, c'est-à-dire le pape de Rome et le replacera sur son Siège. Et de la même façon que vint Vespasien pour détruire Pilate, viendra le comte de Foix pour détruire Armagnac. Alors il dominera le royaume tellement, et il y aura telle grande union entre le Roi de France et le comte de Foix, que le Roi en de nombreuses choses obéira au comte. Et après, le comte prendra le commandement du Saint Passage !" (§26).
Un petit cousin de Fébus en 1445, Gaston IV, nomma son cheval de parade la Grue. Fébus dans un de ses poèmes se décrit comme "prince illustre à la tête couronnée de flammes". Pline parle de la grue symbole de vigilance qui dans l'eau tient dans sa patte une pierre pour qu'elle l'entende tomber si elle s'assoupit. La mère de Constance le lui avait enseigné. Hiver-Bérenguier renvoie aussi au conte persan de Faride Ouddin Attar, sur le voyage initiatique des oiseaux. "La Vache sera à l'ombre de la Fleur". Vache du Béarn, Fleur de Lys de France, le Saint Passage c'est la Croisade. Catherine de Sienne, elle, tenta de pousser un condottiere à la Croisade.
Le thème du dernier monarque avant la fin des temps qui sauvera la France remonte à St Césaire, évêque d'Arles au VIe siècle (révélées en 1524 par Jean de Vatiguero). Merlin le Gallois annonça le schisme, le rôle d'une jeune Lorraine et du grand monarque, ce que révéla Jeoffroy de Monmouth en 1152. Nostradamus le développa aussi. Eric Muraire dans son Histoire et Légende du Grand Monarque (Albin Michel, 1975) le retrouve chez 76 voyants (dont 30 femmes) dont 44 français, jusqu'à Garabandal.
Constance se plaignit que cette prophétie lui incombât (elle fut souvent passive à l'égard des messages qu'elle recevait, n'était pas une mystique souffrante ou stigmatisée comme le furent tat d'autres), mais la Voix (§ 53) lui rappela le rôle de la femme dans la révélation des derniers sceaux de l'Apocalypse. Hiver-Bérenguier note que Fabre d'Olivet dans Histoire Philosophique du genre humain insiste sur le rôle prophétique des femmes du fait de leur sensibilité nerveuse depuis la Protohistoire. Naturellement le fait que beaucoup ne se soient pas réalisées (notamment celle sur l'Apocalypse prochaine) ne compte guère, les prophéties étant le plus souvent conditionnelles.
Pour avoir une approche un peu plus complète de ce que les visions de Constance de Rabastens peuvent nous dire de leur époque, il faudrait peut-être les comparer à celles de sa contemporaine Marie Robine (Marie de Gascogne) qui, elle, défendait Clément VII d'Avignon. Pour savoir si les visions de cette Constance venaient de Dieu ou du diable, il faudrait une analyse aussi limpide que celle d'Augustin Viatte à propos de celles de Jacqueline-Aimée Brohon (qu'il reliait intelligemment aux hérésies de Rousseau et du romantisme)
Hiver-Bérenguier détaille la mystique de Constance de Rabastens, note par exemple l'absence des Saints, notamment de Marie, et le peu d'importance qu'elle accorde au péché (elle estime, comme Fébus dans ses Oraisons, que Dieu ne peut pas condamner sa propre créature). Le dernier point a des relents d'hérésie qui donne une couleur un peu démoniaque aux visions (de même aussi son utilisation de Ninive oubliant que dans Jonas Dieu a pardonné à cette ville d'Assyrie) quoique l'Inquisition ait innocenté la mystique (mais certains sousentendent qu'elle ait pu agir sous la pression de Fébus). Un théologien serait mieux à même que nous d'en juger ...
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Voir aussi
R. CABIÉ, Une mystique? Réflexions sur Constance de Rabastens, in Cahiers de Fanjeaux, 23 (1988), pp. Cahiers de Fanjeaux, 23 (1988),37-55;
R. Cabié, Révélations de Constance de Rabastens. Édition, traduction et commentaire, Barcelone, facultat de theologia de Catalunya-Institut catholique de Toulouse, 1995, p. 40.
H. CHARPENTIER, La fin des temps dans le Livre
des Oraisons de Gaston Fébus et les Révélations de Constance de Rabastens, in Fin des temps et temps
de la fin dans l’univers médiéval, in Cahiers de Senefiance, 33 (1993), pp. 147-62
Renate Blumenfeld-Kosinski, « Constance de Rabastens: politics and visionary experience in the time of the Great Schism », Mystics Quarterly, 25, 1999, p. 147-168.
M. Jeay, « Marie Robine et Constance de Rabastens : humbles femmes du peuple, guides de princes et de papes», Le petit peuple dans l’Occident médiéval, éd. P. Boglioni et C.Gauvard, Paris, Presses de l’Université de la Sorbonne, 2002, p. 579-594.
Madeleine Jeay, La transmission du savoir théologique, Le cas des femmes mystiques illettrées, CRMH p. 223-241
Celle-ci travaille surtout sur la comparaison entre les visions de Constance et le discours ou les images théologiques dans lesquelles elle baignait, ses interactions avec son entourage, une approche en vogue dans les sciences humaines actuelles mais qui ne m'intéresse guère, exemple :
"Le troisième canal par lequel les fidèles ont eu accès à ce savoir, comme nous l’a indiqué l’exemple de Constance de Rabastens, est celui de l’image, en conjonction avec les pratiques dévotionnelles et liturgiques, par l’intermédiaire du livre et de la lecture ou bien des programmes iconographiques des églises. Ses révélations illustrent clairement le lien étroit entre le contenu de ses visions et celui des chapitres du Livre des Révélations dont on lui fait la lecture. On sait la part qu’occupe l’illustration dans les apocalypses pour accompagner le texte, notamment celles en français, ce qui en faisait de remarquables outils pédagogiques.
Parallèlement aux scènes de l’Apocalypse, Constance a été marquée par les peintures qui recouvraient l’église Notre-Dame du Bourg, en particulier par celle qui figurait dans la chapelle Saint-Martin. L’apparition qu’elle reçoit aux environs de 1374, d’un arbre chargé de fruits surmonté d’un nuage où siègent vingt-quatre vieillards, combine les chapitres 2 et 22 de l’Apocalypse avec la peinture de l’Arbre de Vie de la chapelle. Le lignum vitae et l’image de l’arbre évoquent saint Bonaventure et l’ouvrage par lequel il a diffusé sa doctrine théologique, où elle lui sert d’outil pédagogique pour favoriser la compréhension et la mémorisation."
Le "général cul-nu" (butt naked) Joshua Blahyi, devenu pasteur (Liberia)
Vous vous souvenez que, dans mon livre la Nudité Pratiques et significations, j'ai parlé du général Butt naked (Joshua Blahyi)), qui, se battant nu au Libéria au cours de la guerre civile des années 1990, a fait périr au moins 20 000 personnes . Devenu pasteur protestant, il raconte sa conversion dans "The redemption of an African Warlord" (editions Destiny Image, 2013), une expérience que son préfacier Bojan Jancic qualifie de d'histoire de conversion "la plus radicalement fascinante depuis Saint Paul".
J'avais classé le combat nu de ce général comme celui des Celtes, dans la rubrique la "nudité-affirmation". Mais selon Blahyi il s'agissait d'une nudité humiliante : "Je devais me battre 'cul nul', écrit-il dès la page 19, parce que c'était l'exigence de la force spirituelle qui me donnait le pouvoir. C'est juste un exemple de jusqu'où Satan peut aller pour humilier un être humain au nom de son intention de lui donner un pouvoir".
Il explique que la tribu guerrière dont il est issu croyait beaucoup au pouvoir immanent et exigeait des vaincus un renoncement par traités rituels à leur souveraineté pour ne pas être ensorcelée par eux. Ces guerriers professionnels avaient pour chef non le plus âgé comme d'ordinaire en Afrique mais le plus fort. Une branche, les Sarpo-Krahn, renonça à la guerre et s'établit à Greenville sur les bords de l'Atlantique, mais ils furent massacrés par leurs frères guerriers Krahn après avoir rencontré des missionnaires et tenté à leur tour de les évangéliser. Un survivant, Saydee fut "empowered", doté d'un pouvoir, ainsi que ses compagnons, par l'esprit Nya-Ghe-a-weh pour venger les siens grâce à un talisman (qui envoûtait avec un éternuement cf p 28, j'ai aussi vu cela avec des mediums), avec notamment un pouvoir de voler et disparaître à volonté. Sa vengeance réalisée, Saydee devint grand prêtre de Nya-Ghe-a-weh que lui et ses descendants seraient les seuls à voir et Nya-Ghe-a-weh choisirait à loisir ses prêtres dans cette ethnie qui sont en fait désormais "ses guerriers".
Alors que l'ethnie avait perdu Greenville face aux Kru, l'oncle du grand père paternel de Blahyi, séduit par l'éducation occidentale du gouverneur proposa à sa tribu d'abandonner ses traditions. En raison du refus de Nya-Ghe-a-weh il fut banni du clan, mais poussa l'arrière grand père de Blahyi à baptiser son fils (le grand père de l'auteur qui allait être un bienfaiteur de la tribu) et poursuivit clandestinement l'éducation de sa tribu.Tous ces éléments sont importants pour comprendre les malédictions sur plusieurs générations dont parle la Bible.
Le frère préféré du père de l'auteur mourut assassiné dans des circonstances assez mystérieuses le jour de la fête de l'obtention de son baccalauréat (p. 48) par des gens qui voulurent lui montrer que l'éducation ne sert à rien. Cet oncle mourant fit jurer au père que leur nom de famille serait placé parmi les lettrés. Ainsi engagé dans le combat pour l'éducation, le père de l'auteur devint comptable spécial du ministre des finances Steven A.Tolbert, le frère de William qui fut un président progressiste de 1970 à son assassinat en 1980, mais il dut devenir grand prêtre de sa tribu selon les lois coutumières. Nya-Ghe-a-weh exigea que son fils ainé fut éduqué dans la tradition pour pouvoir le seconder utilement et lui succéder le moment venu.
La première femme du père de l'auteur, Ma Saybah, une Lorma du comté de Lofa, faisait partie de la société secrète des Sande. Le fils ainé Benedict-Nnawyieee fut initié par la société secrète des Poro de l'ethnie maternelle. Il en résulta qu'au village l'oracle de Nya-Ghe-a-weh le rejeta comme prêtre et lui lança une malédiction "d'instabilité". La mère de l'auteur, déjà mariée et mère, mais qui était une personnalité importante, fut choisie par les vieux du village pour enfanter le prêtre enfin digne qu'exigeait Nya-Ghe-a-weh. Un sortilège fut fait pour que le père de l'auteur couchât avec elle à Monrovia, et de cet accouplement naquit l'auteur. Mais la première femme fut furieuse. Elle tenta de retrouver sa rivale par des devins mais n'y parvint pas pendant la grossesse car celle-ci à Monrovia était protégée par Nya-Ghe-a-weh. A la naissance de l'auteur, Ma Saybah envoya une prophétesse auprès de sa mère qui lui offrit une pièce de 25 cents comme cadeau. L'enfant joua avec mais elle disparut par miracle. Une sorcière dit à la mère de l'auteur que son fils était un enfant bizarre à surveiller avec prudence.Après l'échec de la malédiction de la pièce, Ma Saybah convainquit le père de ramener le fils au village auprès du demi-frère Benedict mais échoua aussi à le détruire. Comme l'auteur était doué pour l'école, le père refusa de le nommer grand prêtre et même enfanta un autre bébé pour qu'il occupe cette charge. Nya-Ghe-a-weh le punit d'abord en accablant le fils d'une maladie puis au bureau du père à Monrovia en provocant chez celui-ci des tremblements terribles alors que son staff était endormi et le menaça de tuer son fils s'il continuait de désobéir.
Le père fit admettre par Nya-Ghe-a-weh que son fils devînt prêtre à sa place, bien que fort jeune, ce que le dieu accepta dans un rêve. L'auteur lors de son initiation comme prêtre vit Nya-Ghe-a-weh. Pendant plusieurs jours le dieu lui montre les actions de sa belle-mère contre lui, le poids d'une ombre sur sa vie, les trahisons et lâchetés des ancêtres. L'enfant promet d'être fidèle à Nya-Ghe-a-weh qui lui assure qu'il lui réserve un destin exceptionnel.
Joshua Blahyi raconte le détail de son initiation (il affirme que Jésus aujourd'hui l'incite à le faire sans crainte pour démystifier son ancienne idole), et notamment comment son dieu le fait sauter de son rocher sacré, lui fait manger de la chair humaine, lui donne ses pouvoirs surnaturels d'invulnérabilité etc. Le récit rappelle exactement les récits européens antiques et les légendes africaines, sauf que là ça ne se donne pas du tout comme des légendes mais bien comme une histoire réelle survenue il y a une quarantaine d'années.
Après cela c'est comme le mécanisme d'une machine infernale qui se déclenche.Blahyi raconte comment il recrute des prêtres et des sorciers à son service et au service de Nya-Ghe-a-weh, et s'assure la fidélité des gens par des envoûtements, des sorts jetés sur la nourriture, sur l'eau etc. Blahyi doit effectuer des sacrifices d'enfants pour Nya-Ghe-a-weh aux nouvelles lunes. Il explique comment il pénètre par le sommeil dans l'esprit des gens qu'il veut tuer, capture cet esprit de sorte que le corps reste en état de mort clinique au petit matin, disponible ensuite pour le rituel anthropophage.
Une fois il a peiné à avoir le corps d'une petite fille parce que sa mère était chrétienne (il ne pouvait acheter la confiance de la fille même en lui faisant un cadeau car elle le refusait) mais Nya-Ghe-a-weh tenait à ce qu'il réussisse. Il a alors abusé d'une faiblesse de sa mère. Comme il n'était encore qu'un enfant - quoique déjà grand prêtre - il lui offrit un pièce de 25 cents, comme sa belle mère l'avait fait à sa mère par le truchement d'une "prophétesse". La mère accepta, les gens du voisinage s'amusèrent en disant que c'était une "dot". Et en effet, ce fut une dot car ensuite la mère avait sans le savoir ainsi conclu un pacte et ne put défendre sa fille qui mourut la nuit suivante.
Lorsque le président Samuel Doe (qui allait être un grand allié de Ronald Reagan dans la région), membre de l'ethnie Krahn prend le pouvoir en 1980, Blahyi en tant que grand prêtre du plus grand dieu de l'ethnie devient de fait son tuteur spirituel : Doe fut un des milliers de prêtres - placé au rang 7 - de Nya-Ghe-a-weh. Et ce fut à l'échelle du pays tout entier, et même de la sous-région qu ele culte de Nya-Ghe-a-weh, avec son système d'embrigadement et de sacrifices d'enfants fonctionna.
Toutefois à la fin des années 1980, le système de Doe s'affaiblit. Celui-ci, trop ambitieux spirituellement, se fait aussi initier dans les rites d'autres cultes comme les Poro et la franc-maçonnerie. Par le biais des Poro, à un moment en 1990, Prince Y. Johnson allié de Charles Tayor arrive à couper la protection de Nya-Ghe-a-weh et la canalisation entre Blahyi et le président. Celui-ci est assassiné. Avec la guerre civile les Krahn risquent d'être massacrés en représailles, et Blahyi alors donne libre cours à sa fonction de guerrier que lui a conférée Nya-Ghe-a-weh. Il arme ses hommes, constitue une armée, et raconte les pouvoirs exceptionnels dont il bénéficie grâce à son dieu (celui de terroriser, celui de faire en sorte que les balles passent toutes très loin de son corps).
Cette partie de sa vie est aussi spirituellement instructive, notamment lorsqu'il évoque une guérilla musulmane. Il explique qu'il a toujours senti que, pour pouvoir travailler avec elle, il devait entamer une négociation avec leur dieu, alors qu'avec les chrétiens aucune négociation avec leur Dieu n'avait jamais été possible et il n'avait l'esprit des chrétiens que lorsque ceux-ci d'une manière ou d'une autre brisaient le pacte avec leur Dieu, comme la mère de la fillette dans les années 70. Il y a aussi des remarques importantes sur les dieux qui contrôlent les autres pays africains, les alliances qui ont pu être passées avec eux etc. (cela rejoint le propos de Derek Prince dans cette vidéo sur le démon roi de Perse en 41ème minute ici).
La conversion au christianisme du général "Butt naked" est tout aussi surnaturelle. Il y a d'abord la voix de Jésus qui lui dit qu'il n'est pas roi et qu'il est esclave de lui-même, mais bien sûr cela ne suffit pas, cela l'ébranle juste un peu, puis il y a cette association protestante pour la paix qui se constitue, et dont certains membres, avec un courage inouï et dans le plus grand calme, alors qu'il fait régner la terreur à Monrovia, vont frapper à sa porte et prient chez lui. Et petit à petit cela fonctionne. Le cœur de Blahyi s'attendrit, une balle touche son tibia, Nya-Ghe-a-weh qui lui rendait visite toutes les nuits pour lui faire faire des voyages astraux s'absente une fois - et c'est un prodige chrétien étrange qui remplace cette visite - et, quand Blayi se rend au groupe de prière des protestants pacifistes, Nya-Ghe-a-weh n'est plus qu'une idole affaiblie et terrorisée. Blahyi avait peur des représailles de son dieu après la trahison, mais il comprend bien vite que ce démon ne peut rien contre le Dieu des chrétiens quand la foi est assez ferme. Il voit aussi que les idoles n'ont aucun pouvoir sur la Terre si le cœur des hommes ne leur sert pas de relais - car, explique-t-il, au commencement des temps Dieu a confié la Terre à l'homme, et non aux esprits qui, sans l'aide de l'homme, n'auraient aucun pouvoir sur elle.
Depuis lors Blahyi est devenu pasteur, il s'est marié, a fondé une famille et œuvre à la réconciliation des Libériens. Il dit qu'il était prêt à subir la peine de mort à cause de ses péchés commis du temps de ses pratiques idolâtres et pour mourir en martyr du Christ, mais la justice des hommes l'a acquitté. Satan cependant ne cesse de le mettre à l'épreuve : il a notamment survécu par miracle à un accident automobile il y a peu.
L'expérience et la conversion de Joshua Blahyi m'ont fait penser au témoignage d'un autre converti protestant, le pasteur Allan Rich que l'on peut voir ici - https://www.dailymotion.com/video/x1kbdh_dieu-m-a-delivre-de-l-occultisme-al_webcam - la vidéo et qui lui aussi était allé très loin dans l'occultisme.
La médium Patricia Darré
Toujours accaparé par mon projet d'écrire un essai sur la médiumnité, je découvre la journaliste Patricia Darré, ses échanges avec Alexandre Adler, avec un archéologue etc publiés récemment dans "L'invisible et la science". Pas de véritable nouveauté par rapport aux autres témoignages du même genre, mais des éléments de confirmation qui m'aideront dans la rédaction de mon livre. Je suis assez perplexe devant l'agnosticisme affiché par cette médium-journaliste. Il est de la même espèce que celui de la voyante Maud Kristen : il s'agit de rassurer les gens ("Mais non, l'Invisible n'est pas terrifiant, c'est aussi simple que la vie quotidienne, et les médiums ne sont pas ds surhommes qui mettront le grappin sur vous"), et d'ouvrir la voie à un dialogue avec les science pour éventuellement doter la profession d'un statut dans la société. Mais on voit bien sur le plan stratégique les impasses de cette démarche : la science classique de par ses postulats (l'objectivation, la reproductibilité de l'expérience) ne peut pas s'ouvrir à la médiumnité, sauf sur un mode marginal, et le statut des médiums est impossible parce qu'il n'y aura jamais de possibilité de trier le bon grain de l'ivraie (même un bon médium peut choir de son piédestal un jour en versant dans le délire et dans le bas astral, tandis qu'un charlatan peut un jour aussi - qui sait ? - accéder à des vérités). Problème aussi de l'agnosticisme appliqué à un art du dialogue avec l'Au-delà car cet Au-delà ne se laisse pas appréhender par le doute. Jacques Mandorla dans son ABC du Magnétisme il y a près de 30 ans notait déjà que la circulation des énergies (celles du magnétiseur, mais c'est de même nature que celles du médium) suppose une disposition du patient, et quand Patricia Darré affirme qu'on est appelé par les défunts, que cela doit correspondre à un stade de leur évolution comme de celui du médium qui les reçoit, on est bien dans une notion de Kairos, de moment opportun, qui n'est pas objectivable et qui est liée à une économie spirituelle, donc religieuse.
L'excès d'agnosticisme peut même s'avérer contreproductif car il prive le médium d'une faculté d'interroger l'arrière plan de son propos. En disant qu'on a la preuve que l'entité qui vous parle est celle de Napoléon, comme l'affirme Patricia Darré dans "L'invisible et la science" parce que l'entité a nommé un bijou transmis à la descendance que personne ne connaissait, on sous-estime complètement l'enjeu du propos. Quand bien même vous n’adhéreriez pas aux condamnations radicales émanant des auteurs catholiques du XIXe siècle comme Gougenot des Mousseaux, ou de contemporains actifs sur le Net comme le père Verlinde, Fabienne Guerrero ou Soeur Emmanuel Maillard pour qui tout cela relève de la pure manipulation diabolique (le diable, ange déchu mais puissant, pouvant fabriquer toutes les preuves qu'il veut et tromper à loisir les esprits crédules avec elle), vous devez quand même admettre que le monde qui dépasse les lois "ordinaires" de la nature (pour employer des mots qui évitent le piège du débat immanence/transcendance) a une capacité de fabrication de "preuves" qui va bien au delà de celle d'un faussaire de chair et d'os... Et même vous souvenez vous de ce manipulateur professionnel qui à l'époque de Staline avait réussi à déjouer tous les dispositifs de sécurité du Kremlin en faisant croire aux gardiens qu'il était Beria. Si cet homme peut le faire que ne pourrait une entité ? Alors bon je sais bien qu'il peut paraître paradoxal de se réclamer de la religion pour inciter les médiums agnostiques à pratiquer davantage le doute dans leur activité, puisque la religion est d'habitude l'antidote au scepticisme, et qu'au jeu du doute on peut nier l'existence de tout, même de ce qu'il y a en apparence de plus rationnel, ainsi que le montra Descartes. Bien sûr notre for intérieur justement parce qu'il est issu de l'Invisible garde à son égard une capacité de discernement qui fait qu'on ne peut pas tout révoquer en doute, notamment dans ce que les médiums nous disent dans des expériences très personnelles avec eux, mais l'exercice du discernement passe par une réflexion attentive sur l'ensemble du dispositif des rapports à l'au delà, et par une écoute attentive et humble des messages intérieurs et des synchronicités. Autrement dit, c'est par une attitude spirituelle et religieuse qu'on peut aborder avec pertinence l'apport des médiums à nos vies. L'agnosticime prétendument chargé de bon sens et très "terre à terre" devient, faute d'une réflexion sur la tradition religieuse (celle des chrétiens, des musulmans, des bouddhistes, des pythagoriciens etc, et les techniques particulières que ces mondes religieux ont mis en oeuvre pour faire la part entre la bonne divination et la mauvaise, la bonne invocation des ancêtres et la mauvaise etc), sur les questions qu'elle nous pose etc, la porte ouverte à toutes les manipulations par le "bas-astral"...
Pauvreté du débat intellectuel
J'échangeais hier avec un camarade maître de conférences. Il soutenait la thèse selon laquelle Jésus "reprenait tous les acquis du judaïsme et, à ma connaissance, il n'en a condamné aucun" (sic). Selon lui Saint Paul était le seul à l'origine de la prise de distance entre les disciples de Jésus et le judaïsme.
Je lui ai opposé trois points démontrant le contraire 1) Dans l'Evangile Jésus est souvent accusé de guérir les jours de sabbat, 2) il y a un passage de l'Evangile où il dit de ne pas se préoccuper des interdits alimentaires, 3) Jésus fait souvent l'éloge des Samaritains.
Mon interlocuteur répondit alors (par mail) que les Samaritains avaient toujours respecté le Sabbat. Il croyait en invalidant en partie mon 3ème point, dynamiter les deux autres et pouvoir ainsi continuer à dormir tranquillement sur ses certitudes.
Beaucoup de gens fonctionnent ainsi et sur tous les sujets. Notamment dans le débat sur la voyance. Quand un voyant cite correctement trois faits précis qui vont se produire, impossible à déduire de l'apparence de leur client ou de ses propos, et qui effectivement se réalisent, mais se trompe sur un quatrième fait (suivant une constante vérifiée par de nombreux observateurs selon laquelle le faux se mêle souvent au vrai dans la voyance), alors l'interlocuteur de mauvaise foi se précipitera sur le quatrième point au détriment des trois autres pour claironner que la voyance est une imposture.
Ajoutez à cela que la plupart des intellectuels (comme la plupart des autres personnes d'ailleurs) évitent de répondre aux mails de gens qu'ils n'ont jamais rencontrés physiquement (au mépris des règles de politesse), ce qui fait qu'ils limitent l'horizon de leurs discussion à un cercle familier d'interlocuteurs qu'ils connaissent bien et ne dérangent pas leurs dogmes, et vous comprendrez pourquoi l'intelligence ne progresse que très lentement voire régresse avec le temps chez ceux qui font profession de penser.
Enigme du rapport entre une visionnaire et Gaston Fébus
Un personnage qu m'intéresse... Je vous en dirai plus quand j'aurai lu le livre, en attendant, juste une banale recension universitaire de 1984.
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Revue Société des études du Comminges 1984/01 (T97,A1984)-1984/03 p. 589
Un livre de prophéties inédites sur Gaston Febus.
1384, au cœur de la Guerre de Cent Ans : les rois de France et d'Angleterre se disputent le trône de notre pays ravagé, tandis que le pape de Rome et le pape d'Avignon règnent sur une Chrétienté déchirée ; les esprits ne savent plus que penser.
Soudain, il y a tout juste six cents ans, une femme du Sud-Ouest, une mère de famille, se lève, bouscule toutes les vérités, toutes les traditions, tous les ordres établis et s'attaque même violemment à l'Inquisition au péril de sa vie. On ne connaît d'elle que son prénom, Constance, le village où elle habitait, Rabastens-en-Albigeois, et un manuscrit explosif qui dormait à la Bibliothèque Nationale.
Quels rapports pouvait-il y avoir entre cette villageoise du Tarn et le légendaire comte de Foix-Béarn, Gaston Febus ? Ce prince possédait en héritage de sa mère, Alienor de Comminges, les terres basses de l'Albigeois qui se prolongeaient par la vicomte de Lautrec, formant donc un fief important très proche de Toulouse. L héritage venu des Comminges lui était d'autant plus cher que, toute sa vie, Gaston Febus tentera d'étendre sa prépondérance dans le Sud-Ouest en réunissant le comté de Foix et la vicomté de Béarn par l'annexion du comté de Comminges qui les séparait. En vain ! Toutes ses batailles contre les Armagnac n'ont pas eu d'autre but caché. La victoire de Febus a Rabastens en 1381 contre le duc de Berri signe encore la suprématie qu'il voulait obtenir dans tout le Languedoc.
C'est cette bataille sanglante de Rabastens (il y eut. trois mille morts) qui impressionna tant Constance, et semble avoir déclenché cette crise mystique qui, durant cinq années, bouleversera sa vie : plus de cent apparitions, extases et révélations, presque essentiellement politiques, fait unique dans l'Histoire.
Ces prophéties concernaient les plus hauts dignitaires de son temps : le jeune roi Charles VI, les princes, les comtes d'Armagnac qui trahissaient la France au profit de l'Anglais, les évêques, les deux papes, le Grand Inquisiteur et surtout Gaston Febus, dont la présence occulte imprègne toute cette aventure, jusqu'à cet étrange procès d'inquisition à Toulouse.
Constance voyait en lui le véritable sauveur de la France qui serait Premier Ministre du roi, rendrait son pouvoir au pape de Rome, et commanderait la prochaine Croisade vers Jérusalem. L'entrevue historique de Gaston Febus avec Charles VI en 1390 où toute la France eut les yeux tournés vers Toulouse, sembla lui donner raison ainsi que la réception triomphale que fit au roi le comte en son château de Mazères.
L'auteur a traduit pour la première fois en Français le manuscrit inédit des Révélations de Constance de Rabastens et étudié son contenu avec autant de rigueur que de passion. Par exemple, les rapports étonnants entre ce texte et le livre des Oraisons de Gaston Febus ainsi que le portrait original du comte de Foix-Béarn, n'ont pas fini de surprendre.
Une fois de plus, une page de l'Histoire de France s'écrit sur des documents inédits de notre région.
C'est la grande historienne Régine Pernoud qui a préfacé cet ouvrage, édité chez Privat à Toulouse.
Jean-Pierre HIVER-BERENGUIER, «Constance de Rabastens, Mystique de Dieu ou de Gaston Febus?» (Ed. Privât, collection « Le Midi et son histoire ».)
Deus absconditus
Pourquoi est-ce que le divin se cache, se révèle seulement dans les rêves, les synchronicités, les expériences limites (guérisons, expériences de mort imminente, initiations sexuelles extrêmes, pratiques magiques, apparitions surnaturelles etc) et souvent dans des formes codées, obscures etc ? L'Eglise catholique contemporaine a théorisé l'idée que Dieu se cache pour respecter notre liberté, cela fait partie de ce vaste mouvement d'abaissement du grand qu'on appelle la kénose. La tradition ésotérique, mais aussi l'ufologie, qui, à bien des égards est un ésotérisme, et même une démonologie, aux couleurs scientistes, ce qui ne veut pas nécessairement dire que ce soit une doctrine fausse (je pense ici à Daniel Robin par exemple, quand il dit que les extraterrestres déguisent leur discours en révélations mariales pour ménager notre ignorance), estiment que Dieu, les "entités de l'au-delà" ou les "entités spatiales" cryptent leurs messages parce que nous sommes trop stupides ou trop impurs pour pouvoir les supporter, ce qui laisse entendre qu'avec des efforts d'intelligence et de purification du corps, de l'esprit, et de notre rapport aux gens et au cosmos nous pourrions finir par en savoir un peu plus. La thèse du "on n'est pas encore capable de" est présente dans les Evangiles eux-mêmes, et donc ne peut, même du point de vue de l'Eglise catholique, être écartée d'un revers de main. Dans l'évangile de Jean Jésus dit à ses apôtres : "J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant." (Jn 16, 12). Voilà qui met sur les rails de l'ésotérisme (d'ailleurs n'a t on pas dit que depuis 2000 ans il y a une église de Pierre exotérique et une église de Jean ésotérique. Et c'est comme lorsqu'un daimon fait voir à Mme Blavatsky que le roi David dans la Bible dansait à moitié nu devant l'Arche d'alliance, même si le daimon cherche à l'égarer complètement par les conséquences qu'il en tire, on ne peut oublier que ce détail troublant, peu compatible avec l'enseignement exotérique, est vraiment présent dans les textes sacrés. Et, sauf à considérer que des morceaux démoniaques sont présents dans le corpus sacré lui-même, il semble que la religion officielle doit bien prendre en compte ce genre de "bizarrerie" et les chemins sur lesquels elles ouvrent...