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Articles avec #christianisme tag

Erreurs de la Bible

3 Novembre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire des idées

Aldo Schiavone, l'auteur du célèbre livre sur l'invention du droit romain, qui analyse - dans son "Ponce Pilate" de 2016 -  le face à face entre Pilate et Jésus (il refuse le mot "procès") dans les quatre évangiles canoniques, tout en menant le plus loin possible l'hypothèse de la fidélité du récit des apôtres, relève cependant quelques contradictions, et quelques absurdités du point de vue du droit juif et du droit romain de l'époque. Pour autant ces détails n'invalident pas à ses yeux la plausibilité de la trame psychologique du rapport du préfet romain au messie telle qu'elle nous est restituée par la mémoire chrétienne.

Ces petites lacunes du récit évangélique, comme les contradictions parfois relevées dans l'Ancien Testament (il en existe des listes sur Internet), interdisent que l'on s'appuie sur tous les détails de la Parole de Dieu, comme le recommandent les fondamentalistes, pour régler sa vie sur elle. J'en arrive à cette conclusion en dépit de beaucoup de lectures ingénieuses faites par les évangéliques pour montrer que les lacunes ou les contradictions parfois ne sont que des imperfections apparentes qui cachent des cohérences plus profondes, à d'autres niveaux de lecture.

On ne peut pas suivre tout à la lettre, à la virgule près, sans verser dans la naïveté ridicule et la mauvaise foi. Cela ne rend pas service à la vérité. Mais alors se pose la question terrible : dans les erreurs de la Bible qu'est-ce qui relève du détail et qu'est-ce qui est essentiel ? On voit bien dans cette question toutes les voies des hérésies s'engouffrent et qu'on peut ensuite se retrouver avec un pseudo-christianisme qui ne respecte plus une once des commandements divins. 90 % des versions du christianisme aujourd'hui prennent beaucoup de libertés avec le texte biblique. Sans doute beaucoup trop. 

Je ne pense pas qu'il soit dans le projet de Dieu d'encourager les gens à s'en remettre à l'autorité de prêtres pour l'interprétation des textes. Ca n'apparaît nulle part dans le Nouveau Testament. En revanche il est sans doute prévu dès le départ que le texte biblique serait imparfait et que les gens resteraient dans la confusion à son sujet, comme ils sont dans la confusion au sujet de tant d'aspects de leur vie et du monde dans lequel ils évoluent, afin que nul ne puisse s'enorgueillir. Cela fait partie de notre déchéance collective. L'important est sans doute de continuer à tenter honnêtement, au niveau de l'intention, de comprendre et de rester fidèle.

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Le catholicisme de Marie Laforêt

3 Novembre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme

A n'en pas douter, le catholicisme de l'actrice-chanteuse Marie Laforêt (dont on vient d'apprendre le décès), si l'on en juge par ce qu'elle dit dans cette interview de 1990 à la RTS, n'était pas celui (chargé de spiritisme et d'occultisme) d'Arielle Dombasle. Il suffit de l'entendre dire qu'elle sait gré à l'Eglise d'avoir "conservé la doctrine" malgré Vatican II, pour s'en convaincre, et c'est peut-être pour ça aussi (et pas seulement à cause de son enfance) qu'elle eut le courage de dénoncer l'ampleur des réseaux pédophiles en France. Pour autant la façon bien peu biblique dont elle "bricolait" l'interprétation du rôle d'Hérode à l'égard de la naissance de Jésus, ou sa vie privée, n'était pas très canonique non plus... Quant à son hommage aux Beatles "Il a  neigé sur yesterday" c'est  le genre de chanson à vous attirer des malédictions sur trois générations...

Amusant d'apprendre que Mauriac disait d'elle qu'elle était la "huitième merveille du monde". Mais Mauriac avait de ces coquetteries qui ne sont pas forcément à prendre au pied de la lettre...

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Saint Paul, les "stoicheia", l'astrologie et la Déesse-Mère

26 Octobre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire des idées, #Pythagore-Isis, #Anthropologie du corps

Il y a quelques mois, on avait parlé ici de l'astrologie "chrétienne"(à supposer que ce ne soit pas un oxymore...) médiévale et contemporaine à propos d'un livre de Denis Labouré. Il me faut maintenant vous parler d'un texte de 2008 d'un certain Kevin von Duuglas-Ittu, un publiciste qui se présente aujourd'hui sur les réseaux sociaux comme un "écrivain spinoziste". Ce texte, très dense, à la fois évoque la question de l'astrologie, mais aussi ouvre intelligemment des pistes de réflexions sur le rapport du message christique à la sorcellerie de l'époque romaine, et de notre époque (qui paraît très pressée de retourner aux ombres d'il y a 2000 ans...).

Le texte, publié ici en anglais, s'intitule "The Condensation of Specificity: Paul’s Use of “stoicheia”" (la condensation de la spécificité, l'usage par Paul de 'stoicheia'). Je vais vous en exposer le contenu en ajoutant mes remarques personnelles et quelques ponts avec d'autres lectures.

Commençons tout d'abord par préciser que ce monsieur von Duuglas-Ittu, "spinoziste" n'est pas chrétien, ou, en tout cas, ce n'est pas en tant que chrétien qu'il a écrit sur Paul. Tout comme l'historienne française Renée Koch-Pètre dont j'ai souvent cité l'article d'il y a quinze ans sur Paul devant les philosophes de l'aréopage, l'auteur admire Paul l'intellectuel pharisien (celui qui a connu les écoles philosophiques de Tarse), et ses "stratégies discursives". Evidemment nous autres chrétiens savons que tout don intellectuel vient de Dieu, il a été façonné par lui avant notre naissance, parfois lui-même nous a encouragé à la cultiver, ou le diable s'en est emparé à certains moments de nos vies, mais, dans le cas de Paul, après sa conversion sur le chemin de Damas et son abandon total à Dieu et à Jésus-Christ dont il persécutait les disciples, par son intelligence l'Esprit saint lui-même parle, du moins la plupart du temps (il est des moments précis dans les épîtres où il annonce que les intuitions qu'il formule ne viennent pas de Dieu mais de lui-même, mais ce sont des cas très rares), et donc les "belles réussites" rhétoriques de Paul sont autant des accomplissements de l'Esprit saint en lui, que le résultat de la mise en oeuvre de dispositions antérieures à ses conversion. Ce sont des réussites "inspirées", qui sont donc riches d'enseignements pour les situations que nous mêmes devons affronter (puisqu'elles sont en tant que telles intemporelles) autant que pour comprendre en quoi l'apôtre a pu rapidement convertir les masses dans le bassin méditerranéen en son temps.

En prenant les choses seulement sous l'angle humain (avec tout le décodage que nous mêmes devons appliquer sur le volet surnaturel), la démonstration de von Duuglas-Ittu s'attache surtout à montrer que sur un mot, l'apôtre parvient à cristalliser de nombreuses significations et couvrir un panel sémantique très large, qui touche plusieurs publics à la fois, et plusieurs plans existentiels dans la vie des gens (de son époque - et, ajouterons nous, de la nôtre). Les deux termes grecs qui l'intéressent ici sont Nomos (la Loi) et Stoicheia (les Eléments naturels).

Le texte où se déploie l'assimilation entre les deux termes est le chapitre 4 de la lettre aux Galates, qui fait immédiatement suite au passage "il n'y a ni Juif ni Grec", ce qui interdit de n'y voir qu'un texte destiné à des Juifs. Il commence comme ça :

"01 Je m’explique. Tant que l’héritier est un petit enfant, il ne diffère en rien d’un esclave, alors qu’il est le maître de toute la maison ;

02 mais il est soumis aux gérants et aux intendants jusqu’à la date fixée par le père.

03 De même nous aussi, quand nous étions des petits enfants, nous étions en situation d’esclaves, soumis aux forces qui régissent le monde (ou les principes élémentaires du monde - stoicheia).

04 Mais lorsqu’est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme et soumis à la loi (nomos) de Moïse,

05 afin de racheter ceux qui étaient soumis à la Loi (nomos) et pour que nous soyons adoptés comme fils.

06 Et voici la preuve que vous êtes des fils : Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie « Abba ! », c’est-à-dire : Père !

07 Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c’est l’œuvre de Dieu.

08 Jadis, quand vous ne connaissiez pas Dieu, vous étiez esclaves de ces dieux qui, en réalité, n’en sont pas.

09 Mais maintenant que vous avez connu Dieu – ou plutôt que vous avez été connus par lui – comment pouvez-vous de nouveau vous tourner vers ces forces inconsistantes et misérables, dont vous voulez de nouveau être esclaves comme autrefois ?

10 Vous vous pliez à des règles concernant les jours, les mois, les temps, les années !

11 J’ai bien peur de m’être donné, en vain, de la peine pour vous.

12 Frères, je vous en prie, devenez comme moi, car moi je suis devenu comme vous."

Ce texte fait suite à la tentation qu'ont eue certaines églises galates d'Asie mineure de rétablir en leur sein la circoncision. Comme le résume Kevin von Duuglas-Ittu, "en cherchant à se circoncire, les Galates risquent de retomber dans leur enfance sous le joug des stoicheia, des gardiens et domestiques du domaine"." Mais quels sont, ou qui sont les 'stoicheia' de Galatie ?" ajoute l'auteur qui ainsi va ouvrir une réponse assez vertigineuse.

Le terme a été controversé nous dit-il. Le théologien Eduard Schweizer (1913-2006), au vu de l'utilisation du vocable par la philosophie grecque et romaine, d'Empédocle à Plutarque en passant par Philon d'Alexandrie estime qu'il s'agit des éléments du monde naturel (par exemple, le feu, l'eau, la terre et l'air) et, ce ne seraient donc que des puissances «craintes mais non vénérées», bien distinctes d'un «groupe de démons» ou d'esprits susceptibles de gouverner le monde. Clinton Arnold, de l'université d'Aberdeen, a pour sa part repéré le sens très spécifique de stoicheia dans la magie et l'occultisme gréco-romains. Il se fonde notamment sur les Papirii magiques grecs (PGM IV .40-41), dans lesquels ce mot désigne les démons (mais oui !) qui régnaient sur chacun des 36 décans astraux du zodiaque et auxquels correspondaient une lettre (*)...  Cette signification technique du terme était répandue dans les textes occultes de l'empire romain et se retrouve même dans le texte de magie juive "Le Testament de Salomon.comme se référant aux mêmes «36 décans également appelés« démons »".

Personnellement je me suis déjà un peu arrêté à la lecture de ce passage, parce qu'il ne m'était même pas venu à l'esprit qu'on puisse appeler les décans du zodiaque des "démons", même si on laisse à ce terme le sens un peu neutre qu'il avait dans l'Antiquité (comme le démon de Socrate ou celui de Marc-Antoine). Même les prédicateurs les plus hostiles à l'astrologie sur You Tube se hasardent à assimiler les décans à des démons. Pour ma part j'ai découvert le mot stoicheia à travers une conférence du prédicateur suisse évangélique Pierre Amey, dans un contexte où il parlait d'astrologie (nombreux sont donc ceux qui rattachent les stoicheia au zodiaque), mais je ne l'avais pas du tout compris au sens de "démons".

Von Duuglas-Ittu propose de ne pas séparer ces deux niveaux de compréhension du terme. Pour un esprit antique, le feu peut être lié à un démon astrologique qui l'anime, et donc le terme stoicheia vaut pour l'élément naturel comme pour sa cause spirituelle.

Il encourage aussi à avoir une conception large de la Loi et des traditions auxquelles Paul rattache ces stoicheia. Comme on l'a souligné plus haut, le texte fait suite à une exhortation à ne plus distinguer Juifs et Grecs, il serait donc peu approprié de n'entendre la loi que comme celle de la Torah juive imposant la circoncision. En Galatie, observe von Duuglas-Ittu,  région peuplée de Celtes hellénisés, à l'époque de Paul le culte dominant est, depuis mille ans, celui d'Agdistis, que les Romains appellent Cybèle, la Grande Déesse Mère, qui inspira l'Artèmis d'Ephèse, et (voyez mon livre sur la Nudité) la première représentation d'une déesse nue par Praxitèle (dont on a reparlé ici en 2016), ce qui n'est pas sans importance pour notre compréhension de l'importance du nu féminin à la Renaissance et jusqu'à la pornographie contemporaine, bref, pour la compréhension de l'esthétique moderne : il faut remonter à Cybèle, et même à la nudité terrifiante d'Ishtar/Inanna qui régnait sur Israël à l'époque des prophètes. Comme l'écrivait en 1999 Susan Elliott (dans une étude biblique spécifique sur la Lettre aux Galates "Choose Your Mother, Choose Your Master: Galatians 4:21-5:1 in the Shadow of the Anatolian Mother of the Gods,"), «la région de Phrygie et de Galatie »(Actes 16: 6, 18:33) était dense en représentations locales de la Mère des Dieux. La liste des lieux de Phrygie qui attestent de la dévotion à la Mère des Dieux couvre de fait toute la carte »(673) (η). Toute référence à la loi, à la coutume et aux pouvoirs renvoie nécessairement, observe von Duuglas-Ittu, à cette divinité omniprésente : le public de Paul ne pouvait pas ne pas avoir cela à l'esprit.

Cybèle, la déesse mère, était très associée à la conservation de l'autorité civique. Elliott a expliqué que son temple (le Metroion - la "maison de la mère", je rappelle au passage qu'on nommait ainsi également la maison de Pythagore à Cortone, car tous ces aspects de l'occultisme se tiennent) était souvent le lieu de stockage des lois (et notamment les lois de propriété, les testaments, ce qui "colle" parfaitement au propos de Paul sur l'hériter, propriétaire de la ferme), notamment à Athènes...

Pour les Galates, un enfant esclave dans une maison dominée par la loi est forcément sous l'emprise de la Cybèle.

Or, dans le temple de la déesse mère à Pessinonte, le centre national du culte de la déesse où l'on vénérait une pierre de foudre de la déesse, écrit Elliott, des adorateurs, après avoir revêtu une robe qui les féminisait, sous l'empire de la possession de la déesse, se castraient, et devenaient hiérodules, c'est à dires esclaves de la divinité. 

Lorsque Paul écrit au chapitre 5 verset 12 de la même lettre" Quant aux agitateurs, qu'ils s'émasculent eux-mêmes" (c'est ainsi qu'Elliott traduit la version très édulcorée de nos Bibles), les lecteurs galates de la lettre de Paul comprennent parfaitement ce que signifie l'équivalence tracée entre loi de circoncision et castration, qui renvoient au domaine des esclaves de Cybèle émasculés, travaillant pour des Temples où l'on archive les lois.

A titre personnel, je verrais tout autant le lien entre cet univers circoncision-déesse mère-loi, et le monde de l'astrologie. "Vous vous pliez à des règles concernant les jours, les mois, les temps, les années !" Qui ne voit pas qu'il s'agit là d'une référence aux cycles cosmiques et à la lecture des astres qui règlent l'organisation quotidienne de la cité et le travail de chacun ? Vous savez ce que dans le monde romain notamment - voir le livre de Schiavone sur l'invention du droit romain, et nos remarques sur la voyance étrusque chez Lucain).

Très justement von Duuglas Ittu en conclut que le propos de Saint Paul n'est pas de dire si les stoicheia, ces démons qui gouvernent les décans du zodiaques, et les éléments naturels, sont réels ou pas. Ce n'est pas une question d'ontologie. C'est une question d'éthique. On choisit d'être l'esclave de la loi et des stoicheia (et donc du système démoniaque de la déesse mère) ou celui de Jésus-Christ, et il n'y a pas de troisième option possible. C'est un choix entre deux univers dont toutes les connotations sont remarquablement condensées par la rhétorique paulinienne mais à laquelle nous qui ne connaissons pas la Galatie du Ier siècle de notre ère ne comprenons que très partiellement.

J'avoue que je ne m'attendais pas à trouver à cet endroit de la Bible un texte qui parle d'astrologie (c'est davantage l'Ancien testament qui la condamne en des termes non équivoques). Il le fait dans une résonance étrange avec le culte de la déesse-mère, avec le dispositif des lois gréco-romaines, et... avec la circoncision et la Torah... Cela me fait un peu penser à ce livre rempli de coquilles mais intriguant "Le quatrième royaume de Daniel selon l'Evangile" de l'anonyme Fidelis Verax qui voit dans la prophétie de Daniel l'annonce de l'alliance entre le Sanhédrin juif et la puissance romaine. Voilà un autre lien étrange qui se joue ici entre circoncision et loi impériale. La thèse de Barbara Aho que j'évoque dans mon dernier livre sur la dette de la kabbale juive à l'égard de la déesse-mère (et Lilith...) trouve aussi dans ce texte de Paul "raffraîchi" par Susan Elliott et par Kevin von Duuglas-Ittu un écho intéressant.

Il y a quelque chose de très édifiant dans cette féminisation de la Loi, qui n'est pas le "Non dupe erre" façon Lacan (ici au contraire de la psychanalyse le père donne l'Esprit et non la loi), mais une férule féminine. On n'est qu'à moitié surpris par les liens symboliques qui unissent astrologie, occultisme féminin (j'ai parlé de ses prolongements dans le féminisme de "Je suis Cute" en 2018) et par l'andogynisme auquel l'esclavage de la loi conduit (à rapprocher  de l'agenda "transgenre", "gender neutral" de l'ordre antéchristique actuel). Tout l'enjeu est de devenir fils du père (et cela vaut aussi pour les femmes puisque Paul a dit plus haut qu'il n'y avait pas d'hommes et de femmes en Christ) pour pouvoir régner sur la ferme ou sur le "ranch", et non pas soumis à la loi maternelle : Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie « Abba ! », c’est-à-dire : Père !

Il faut crier au père et non à la mère, et c'est le plus dur pour ces "baby christians" galates saturés d'effigies de la déesse-mère (leurs voisins d'Ephèse bientôt dans un concile resté célèbre dans les anales catholiques allaient proclamer Marie "mère de Dieu"). Sortir du zodiaque et de ses petits démons ensorceleurs, de ces dames qui vous font votre horoscope, des temples de la loi dédiés à Mère nature, et à ses cycles saisonniers funestes (et pour notre époque de l'obsession écologique pessimiste), pour devenir fils de Dieu maître en sa demeure, c'est à dire futur administrateur du royaume céleste qui vient, de la "Jérusalem d'en haut qui est libre" comme Paul le dit un peu plus loin dans la même lettre aux Galates (Gal 4-26)...

Un peu plus loin Paul (Gal 4:21 et suiv) dira aux Galates que s'ils veulent vraiment une loi (sous-entendu une mère), ils n'ont qu'à se mettre dans la filiation de celle qui enfante pour la liberté, non pas l'esclave d'Abraham, Agar ("le mont Sinaï en Arabie, elle correspond à la Jérusalem actuelle" sic) mais la Jérusalem céleste promise à la liberté. Je ne développe pas davantage sur cette Jérusalem actuelle assimilée à Agar (comme les musulmans !... lesquels eux aussi vénèrent leur bétyle à la Mecque...). Cette lettre aux Galates est une mine de réflexion !

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(*) On comprend mieux l'application du mot "stoicheia" à la succession des lettres des décans du zodiaque quand on lit dans le Grand Dictionnaire Larousse du XIXe siècle à la rubrique "élément" :

" Le mot élément vient directement du latin elementum, dont la signification propre et primitive était probablement lettre de l'alphabet. On a supposé, mais nous doutons fort qu'on l'ait fait sérieusement, que ce mot a une origine purement alphabétique et qu'il était formé de trois lettres l.m.n, comme le mot alphabe,- o alphabêtos,– ou comme nous disons l'ABC. Dans tous les cas, ta signification étymologique d'elementum n'est rien moins que claire, et l'on n'a pas encore donné une explication satisfaisante du grec stoicheion, qui en latin est rendu par elementum. On nous dit que stoicheion est un diminutif de stoichos, petite verge ou tige dressée, spécialement le style du cadran solaire ou l'ombre qu'il projette. Sous stoichos, nous trouvons la signification de rangée, d'enceinte de toiles de chasseurs, et on nous dit que le mot est identique avec stichos, ligne, et avec stochos, but. Comment la voyelle radicale a pu se changer d'i en o et en oi, c'est ce qu'on n'explique pas. On peut se demander, du reste, pourquoi ce nom de stoicheia a été donné par es Grecs aux éléments ou parties primordiales et constitutives des choses. C'est un mot qui a eu une longue histoire. De la Grèce il a passé dans presque toutes les parties du monde civilisé, et il mérite, par conséquent, que l'étymologiste s'arrête pour en retracer la généalogie, d'autant plus que l'origine de ce mot pourra nous servir à retrouver plus facilement celle de son analogue elementum. Le grec stoichos d'où vient stoicheion, signifie une file ou rangée, comme stix et stichos dans Homère. Le suffixe eios est le même que le latin eius, et signifie ce qui appartient à quelque chose ou en a la qualité. Stoichos signifiant rangée, stoicheion signifierait donc ce qui appartient à une rangée ou constitue une rangée. Est-il possible de rattacher ces mots à stochos, but, soit pour -la forme, soit pour le sens? Assurément non. Les racines formées de i peuvent subir le changement régulier de cet i en oi ou ei, mais non pas en o. Ainsi, la racine lip, que nous voyons dans elipon, prend les formes leipô et leloipa, et la même échelle de changements de voyelles peut être observée dans liph, aleiphô, êloipha, et dans pith, peilhâ, pepoitha. Stoichos présuppose donc une racine stich, et cette racine expliquerait en grec les dérivés suivants stix, stichos, rangée, ligne de soldats; stichos, rangée, ligne, et distichon un distique steichô estichon marcher en ordre, pas à pas, monter; stoichos, rangée, file; stoichein, marcher en ligne. En allemand, cette même racine donne steigen marcher, monter, et en sanscrit nous trouvons stigh, monter. Tout autre doit être la racine de stochos. Comme tomos présuppose une racine tam,temno, etamon, ou bolos une racine bal, belos, ebalon, ainsi stochos présuppose une -racine stach. Cette racine n'existe pas en grec sous forme de verbe, et n'a laissé après elle, dans la langue classique, que ce seul dérivé stochos, marque, point, but que l'on vise; d'où sont venus stochadzomai je vise, et antres dérivés analogues. Une racine semblable se trouve dans le gothique stiggan, l'anglais to sting, piquer. Une troisième racine étroitement apparentée à stach, dont elle est cependant distincte, a été plus féconde dans les langues classiques, c'est stig, piquer. Elle a donné en grec slizô, estigmai je pique, et ses dérivés en latin in-stigare stimulus et stilus pour stiglus; en gothique stikan, piquer; l'allemand stechen; l'anglais to stick. Le résultat auquel nous arrivons de cette manière est que stoicheion n'a aucune connexion avec stochos, et par suite qu'il n'a jamais pu avoir, ainsi que le prétendent les dictionnaires, la signification primitive de petite verge ou tige dressée ou de style du cadran solaire. Quand stoicheion est employé en parlant du cadran solaire, comme dans l'expression dekapoun stoicheion, c'est-à-dire midi, il signifie les lignes de l'ombre qui se suivent en succession régulière, ou, pour nous exprimer autrement, les rayons qui composent la série complète des heures décrites par le mouvement diurne du soleil. Ceci nous explique comment stoicheion est venu à signifier élément. Stoicheia sont les degrés qui conduisent d'une extrémité à une autre les parties constitutives d'un tout qui forment une série complète, ces parties étant soit les heures, soit les lettres, soit les nombres, soit les parties du discours, soit les éléments physiques, pourvu toujours qu'un ordre systématique unisse ces éléments les uns aux autres. C'est là le seul sens dans lequel Aristote et ses prédécesseurs ont pu se servir de ce mot dans le langage ordinaire et dans le langage technique. Nous appelons élément, stoicheion, disait Aristote ce qui compose quelque chose et qui en est la première substance, cette substance étant indivisible quant à la forme; par exemple, les éléments du langage, les lettres, dont le langage se compose, et dans lesquelles, comme étant ses dernières parties constitutives, il est possible de le résoudre, tandis qu'on ne peut pas résoudre les lettres en sons qui diffèrent par la forme mais si on les résout, les parties que l'on obtient sont homogènes, comme une particule d'eau est de l'eau; il n'en est pas ainsi des parties d'une syllabe. Ce sens s'accorde bien, du reste, avec l'explication de stoicheion, qui nous est fournie par la respectable autorité de Denis le Thrace. Voici cette étymologie telle que nous la lisons dans l'auteur de la première grammaire grecque Ta de auta kai stoicheia kaleitai aia to echein stoichon tina kai taxin; ces mêmes caractères sont aussi appelés stoicheia, parce qu'ils ont un certain ordre et arrangement. Pour quel motif les Romains, à qui l'idée d'élément fut sans doute révélée pour la première fois par leur commerce avec les philosophes et les grammairiens de la Grèce, ont-ils traduit stoicheia par elementa? C'est ce qu'il est plus difficile de déterminer. "

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L'erreur tantrique

19 Octobre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Shivaïsme yoga tantrisme, #Spiritualités de l'amour, #Anthropologie du corps, #Christianisme, #Philosophie

J'écoutais tantôt sur mon téléphone portable, une émission très "grand public" du 6 septembre 2016 animée par la présentatrice Flavie Flamant (ici) sur le tantrisme. Cette présentation en faisait un "remède" pour grand malade (au sens où Nietzsche disait qu'un nihiliste prend toujours le remède entre guillemets qui va aggraver son état de santé). Cela semblait être destina aux gens inquiets (au sens où 90 % de nos contemporains le sont), intoxiqués par notre monde, incapables de vivre au jour le jour, aux mâles qui ne perçoivent le sexe qu'à travers le porno, aux femmes qui manquent de confiance en elles, aux gens qui ne sont pas ouverts à eux-mêmes et aux autres, aux âmes sans Dieu, desséchées.
 
Encore une fois cela fait beaucoup de monde, et cependant on se dit : certes ces gens peuvent gagner quelque chose sur le plan psychologique à expérimenter ce genre de pratique, mais combien ils risquent d'y perdre spirituellement aussi s'ils y voient l'alpha et l'omega de leur vie comme cette dame qui téléphonait pour dire que le tantra avait sauvé son couple. On se dit qu'il serait mieux pour tous ces gens, à la base, de ne pas se laisser intoxiquer, c'est à dire de laisser leurs téléphones portables, laisser de côté le bruit et les modes du monde, oublier leur Moi, leurs peurs, s'en remettre complètement avec confiance à Dieu. Ils n'auraient pas ensuite besoin de ce remède un peu... biaisé...
 
Car par delà cette présentation grand public, il y a aussi la version "savante" (par exemple ici la conférence de Véronique Kohn) qui est sans doute plus proche de l'essence profonde de cette pratique, et qui en dit encore plus les dangers. Dans cette version savante, le tantra, comme le yoga, a moins à voir avec l'acceptation de soi même et du corps de l'autre que la dissolution de l'âme dans l'Unité du monde. C'est l'opposé de ce que le christianisme a construit pour l'Occident depuis 2000 ans (mais il est vrai que nous sommes si conditionnés maintenant à haïr l'Occident et ce qu'ont fait nos aïeux...) c'est surtout l'opposé du message du Christ sur Terre, tel que la Bible l'a consigné, et qui n'est point de dissoudre l'âme dans l'Univers, mais de la restaurer dans sa pureté pour la préparer pour le Royaume qui vient, lequel n'aura pas de fin : la passer par le feu, lui enseigner l'obéissance et la confiance, mais pas la fondre dans un Tout indifférencié, dans une nuit où toutes les vaches sont grises, qu'on appelle à tort Lumière, Eveil, Illumination, et qui n'est qu'un autre nom pour le Chute.
 
On sent bien que pour enseigner à l'âme à prendre "joug" de son Créateur fait homme et mort pour elle, afin de labourer (humblement mais dans la joie) avec lui chaque arpent de terre que sa journée lui donnera, il faut que cette âme puisse être plus à l'aise avec son propre corps et le corps des autres, que ce que certaines théologies du passé, fondées sur la peur, lui ont enseigné. Mais, pour ma part, je serais prêt à parier qu'une voie chrétienne de la réconciliation avec les corps est possible. Une voie qui ne soit pas tantrique. Un ancien jésuite qui vit en Australie, Jean-Robert Dupuche, a récemment défendu un tantra catholique (voir ici). Je ne suis pas certain que la notion même de tantra mérite d'être conservée. On en reparlera.
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Quelle eucharistie ?

19 Octobre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme

J'ai déjà abordé ce thème dans un précédent billet, il y a un an, à propos d'Alfred Loisy : l'Evangile est clair sur le fait que ceux qui ne mangeront pas du corps de Jésus Christ n'auront pas accès à la vie éternelle, et rien, dans le dialogue entre les pharisiens et Jésus à ce sujet n'indique que le verbe "manger" soit ici symbolique (Jn 6-53).

Mais comment mange-t-on le corps de Jésus ? Au terme de quel rituel eucharistique ?

Beaucoup de miracles liés à l'eucharistie catholique romaine semblent cautionner celle-ci : ces possédés qui ne supportaient pas la consécration du pain, ceux qui au contraire ne parvenaient à manger que des hosties, et puis Garabandal, communion de l'ange devant des caméras (mais Garabandal est si suspect, comme Medjugorje, vu le profil des voyantes..).
 
L'excellent Frère Mark Goring, dans sa vidéo "The World #1 Most impressive eucharistic miracles" en met en exergue un très récent, digne des recherches du docteur Ricardo Castañon Gomez dont on a parlé sur ce blog il y a quelques années (sans doute d'ailleurs ce chercheur a-t-il fait partie de l'équipe d'experts qui l'a authentifié). L'histoire est extraite d'un livre publié en 2009 "The Eucharistic Miracles Of The World" hélas maintenant indisponible sur Amazon. A Sokółka en 2008, une hostie tombe, conformément au rituel on la met dans un calice rempli d'eau pour qu'elle s'y dissolve. Au bout d'un certain temps, on la retrouve non seulement intacte, mais encore exhalant une odeur de pain frais, et surtout avec en son sein une tache rouge. On fait expertiser la tache et l'on se rend compte qu'il s'agit d'un tout petit morceau de tissu humain, et plus précisément du tissu humain encore vivant, et, chose plus folle encore, l'analyse scientifique montre qu'il s'agit d'un morceau de cœur, et d'un cœur stressé comme s'il souffrait le martyr...
 
"Heureux ceux qui croient sans voir" (Jn 20,29 ), et il ne faut pas rechercher les signes, mais ceux qui affectionnent la preuve par le surnaturel seront là comblés : la présence réelle du corps du Christ dans le pain consacré est ici démontrée, et donc, c'est la consécration catholique qui se trouve validée contre toutes les autres (orthodoxes, protestantes, etc) parce que, à ce qu'on sache, on n'a jamais retrouvé du tissu humain vivant d'un cœur souffrant dans une hostie d'une autre confession...
 
Certes, cela impressionne, questionne, et je n'irai pas, connaissant le sérieux des experts du Vatican comme précisément le docteur Grinon dont j'ai déjà parlé, qui prennent toujours leur temps pour authentifier les miracles, suspecter là l'existence d'une supercherie, et encore moins celle d'une contrefaçon diabolique (car i est toujours très facile d'imputer un miracle au diable).
 
A titre personnel, j'ai tendance à trouver que ce miracle donne un point fort à l'Eglise catholique, et qu'on aurait tort d'en sousestimer la portée. Mais quelque chose me gène dans ce qu'il authentifie : il prouve que dans l'hostie romaine se trouve le corps souffrant de Jésus-Christ torturé. Or est-ce à cela que nous sommes censés, nous chrétiens, communier ?
 
Cela me rappelle cette remarque de Barbara Aho dans Mystery Babylon sur le film "La passion de Jésus-Christ" de Mel Gibson : si Gibson était un vrai chrétien il n'insisterait pas sur la passion mais sur la résurrection. Critique profonde des protestants contre l'Eglise romaine. Quand nous mangeons du pain de vie, communions-nous au Christ mourant ou au Christ ressuscité ? Que voulons nous avoir en nous ? Sa divinité à travers son supplice, ou sa divinité à travers son corps relevé des morts, son corps de l'Adam originel restauré, rempli de pouvoirs incroyables et immortel ?
 
Question grave. Il y a peu j'entendais le cardinal Sarah, que les catholiques conservateurs mettent en avant contre le Pape progressiste, spécialement en ces temps de "synode amazonien" néo-païen. Ce cardinal guinéen, interviewé dans une vidéo, disait que le Dieu que nous vénérons n'est pas un Dieu "tout puissant" mais un Dieu humble, humilié, qui meurt pour nous sur la croix ? Voilà une étrange façon de faire l'impasse sur le Dieu terrifiant de l'Ancien Testament  qui est aussi celui de l'Apocalypse de Jean : celui qui fera trembler les montagnes et s'éteindre les astres.
 
Quelque chose ne va pas dans le dolorisme catholique, et dans la focalisation sur la croix. Nous devons prendre part à la crucifixion de Jésus chaque jour, par notre souffrance, mais aussi à sa victoire sur les Ténèbres. Pourquoi l'eucharistie ne donnerait-elle "que" son cœur mourant ?
 
Question grave, disais-je, car je vois beaucoup de gens désorientés en ce moment, et qui ne savent sinon à quel saint, du moins à quelle église se vouer. Une dame catholique dangereusement "morte au monde" au point de maltraiter ses relations avec son prochain me disait il y a peu qu'elle suivait le conseil de feu l'évangélique pentecôtiste Derek Prince et communiait toute seule en trempant chez elle un morceau de pain dans un calice "en mémoire du dernier repas du Seigneur". Je doute que cette consécration qui n'est pas légitimée par une succession apostolique (ni celle de Pierre, ni celle d'aucun autre apôtre puisqu'elle se fait en dehors de toute prêtrise), ni même par un partage communautaire (ce qui était tout de même l'esprit de la Cène) aboutisse à quelque présence réelle que ce soit. Mais si le miracle de Sokółka n'atteste que de la présence d'un cœur martyrisé, c'est à peine mieux, ne trouvez-vous pas ? 
 
Mais je n'ignore pas la naïveté de ma question. Il y a à l'arrière plan de cette affaire toute la mystique à mes yeux compliquée (et pour l'instant pas très convaincante, mais bon je chemine...) du sacré coeur, récemment encore explorée par Roger Buck.
Je suis sensible à l'argument de gens comme Mark Goring ou E. Michael Jones selon lequel sans une vie sacramentelle on n'a pas la force spirituelle pour vraiment résister à Satan. La série de compromis passés  par les pays protestants avec le prêt à usure, la franc-maçonnerie, la contraception, l'avortement et la pornographie (qui se généralisa à l'Europe par les pays luthériens) et là pour montrer que sans l'eucharistie on peut avoir l'esprit saint (les assemblées évangéliques le prouvent), mais pas l'endurance suffisante pour résister à la sorcellerie qui gouverne le monde.
 
On peut ne pas aimer les papes, ni certains aspects idolâtres du culte marial, ou de la tradition parfois trop empreinte de philosophie grecque des pères de l'Eglise, et avoir malgré tout sa place dans le monde catholique puisque celui-ci - à la différence des églises protestantes - admet une certaine diversité dogmatique en son sein. Le coeur du coeur du catholicisme romain, par delà la multiplicité de ses tendances, ne tient-il pas dans cet arbre des sacrements dispensés par des prêtres qui ont reçu leur légitimité transgénérationnelle de l'intronisation de Pierre (Matth 16:18) ? N'est-ce pas principalement pour délivrer ces sacrements qu'existe cette Eglise, et notamment pour opérer le miracle eucharistique dont Sokółka fut la manifestation ultime ? Et si on était pragmatique ? Si l'on disait que cette Eglise est là surtout pour nous donner le coeur du Christ vivant, parce que ce coeur ne peut émerger dans le pain dans un geste solitaire du renonçant que décrivait Derek Prince, mais par les mains du prêtre dans la foule des disciples recueillis ? Si l'Eglise romaine ne tirait sa raison d'être que de cela, et si cette raison d'être n'était pas au fond ce qui la place, malgré tous ses défauts, au dessus de tous les autres ? Nous pouvons tout recevoir du Christ par la simple lecture de la Bible, tout sauf la présence de son corps que le prêtre romain lui seul peut nous donner. N'est ce pas ainsi qu'il faut voir les choses sur le chemin du salut ? Et n'est-ce pas pour cela que Rome, de toute façon, même dirigés par des jésuites apostats, restera incontournable ?
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L'Assemblée nationale de 1789 et l'Antéchrist

6 Octobre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Histoire secrète, #Médiums, #Christianisme

"La Révolution de l'Antéchrist, ses signes, ses faits et sa fin: ou identité de la Révolution française avec celle qui doit avoir lieu au temps de l'Antéchrist", est un ouvrage anonyme publié en 1796 par un exilé en Suisse à partir de notes qu'il avait écrites en 1793-94. Il s'y réfère, en préface, au cardinal astrologue Pierre d'Ailly auquel Denis Labouré consacre un livre cette année, et qui, selon Dom Calmet, avait annoncé l'arrivée de l'Antéchrist pour 1789 et au médium médecin, mathématicien, astrologue Jérôme Cardan - Girolamo Cardano ( 1501-1576) qui l'avait prévue pour 1800 (et dont le père avait parlé à des "habitants de la Lune", ce qui allait inspirer Cyrano de Bergerac).

Extrait (p. 39) :

"Si on rapporte le nombre de la Bête 666 aux faits et au nombre d'impies qui ont donné l'existence à son nom d'assemblée nationale, nous n'ignorons pas que lorsqu'il fut question de la fameuse fusion des trois ordres, en anéantissant les états généraux, fusion qui a été la cause de tous les maux et d'après laquelle l'assemblée prit ce nom, ce fut précisément le nombre de 666 méchants députés qui parvinrent à l'opérer, notamment aux séances du 19 juin 1789 ; savoir 142 du côté du Clergé, 33 du côté de la noblesse, et 491 du côté des communes : total 666. (Voyez les papiers publics de ce temps, gazettes de Berne etc)."

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Le Christ annoncé par la Sibylle

6 Octobre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Histoire des idées, #Histoire secrète, #Pythagore-Isis, #Alchimie

Il y a peu je vous parlais de ces ponts étranges entre paganisme et christianisme comme l'hommage de Saint Paul à Epiménide ou la mention des Dioscures dans les Actes des Apôtres.

Il en est un autre qui a fait couler de l'encre dans l'histoire. C'est l'idée que la Sybille de Cumes aurait annoncé la naissance de Jésus-Christ, comme en porte la trace l'Eglogue IV des Buccoliques de Virgile (les églogues sont des poêmes bucoliques) :

"Muses de Sicile, élevons un peu nos chants : tout le monde n'aime pas les arbrisseaux et les humbles bruyères ; si nous chantons les forêts, que les forêts soient dignes d'un consul.

II est venu ce dernier âge prédit par la sibylle de Cumes ; le grand ordre des siècles épuisés recommence : déjà revient Astrée, et avec elle le règne de Saturne ; déjà du haut des cieux descend une race nouvelle.

Cet enfant dont la naissance doit bannir le siècle de fer et ramener l'âge d'or dans le monde entier, daigne, chaste Lucine, le protéger ! déjà règne Apollon, ton frère. Ton consulat, Pollion, verra naître ce siècle glorieux, et les grands mois commencer leur cours. Sous tes lois, les dernières traces de nos crimes, s'il en reste encore, pour toujours effacées, affranchiront la terre d'une éternelle frayeur. Cet enfant vivra de la vie des dieux ; il verra les héros mêlés parmi les Immortels ; ils le verront lui-même partager leurs honneurs. Il gouvernera l'univers pacifié par les vertus de son père.

Bientôt, divin enfant, la terre, féconde sans culture, t'offrira pour prémices le lierre rampant avec le baccar, et la colocase mariée à la gracieuse acanthe. D'elles-mêmes, les chèvres rapporteront à l'étable leurs mamelles gonflées de lait ; les troupeaux ne craindront plus les lions terribles ; ton berceau, de lui-même, se couvrira des plus belles fleurs. Désormais, plus de serpents dangereux, plus de plantes aux perfides venins ; en tous lieux croîtra l'amome d'Assyrie.

Mais dès que tu pourras lire les exploits des héros et les hauts faits de ton père, et sentir le prix de la vertu, tu verras les champs se couvrir peu à peu de moissons jaunissantes, la grappe rougir, suspendue aux buissons sans culture, et la dure écorce du chêne distiller une rosée de miel.

Cependant quelques vestiges de l'ancienne perversité subsisteront encore : ils forceront les mortels à braver, sur une nef fragile, les fureurs de Thétis, à entourer les villes de remparts, à creuser dans la terre un pénible sillon : un autre Tiphys conduira, sur un autre Argo, l'élite des guerriers ; de nouvelles guerres éclateront, et aux rivages d'une nouvelle Troie descendra un nouvel Achille.

Mais lorsque l'âge, en te fortifiant, t'aura fait homme, le nautonier abandonnera les mers ; le pin navigateur n'échangera plus les marchandises ; toute terre produira tout. Le sol ne sentira plus la dent de la herse, ni la vigne le tranchant de la serpe. Le robuste laboureur affranchira du joug le front de ses taureaux. La laine n'apprendra plus à se farder de couleurs menteuses ; le bélier, couché dans la prairie, verra sa toison, d'elle-même, se changer en pourpre de la nuance la plus suave,tantôt en un safran doré ; un vermillon naturel teindra l'agneau des pâturages.

Tournez, fuseaux ; filez ces siècles fortunés, ont dit les Parques avec l'ordre immuable des destins.

Les temps approchent ; monte aux honneurs suprêmes, enfant des dieux, noble rejeton de Jupiter ! Vois, sur son axe ébranlé, se balancer le monde ; vois la terre, les mers dans leur immensité, le ciel et sa voûte profonde, la nature tout à l'espérance du siècle à venir.

Ah ! puissé-je conserver assez de vie, assez de force, pour célébrer les belles actions ! Non, je ne craindrais ni Orphée le Thrace, ni Linus, fussent-ils inspirés, Orphée par Calliope, sa mère, Linus par son père, le bel Apollon. Pan lui-même, s'il prenait l'Arcadie pour juge de nos combats, Pan, au jugement de l'Arcadie, s'avouerait vaincu.

Commence, jeune enfant, à connaître ta mère à son sourire : ta mère ! elle a, pendant dix mois, souffert bien des ennuis ! commence, jeune enfant ; celui à qui n'ont pas souri ses parents ne fut jamais admis à la table des dieux, jamais au lit d'une déesse."

C'est un thème si classique (voir le Dies Irae) que par exemple la cathédrale romane Notre-Dame de Sède de Saint-Lizier dans l'Ariège représente douze Sibylles (pour mémoire Varron en comptait dix de divers pays, celle de Cumes en Italie n'étant que la septième, la tradition en a retenu deux de plus). Notre Dame de Sède est un endroit, bizarre, à la fois charmant et terrifiant (comme Lourdes), un siège d'évêché abandonné. Quand j'y étais en 2018 avec un de mes proches qui a le don de voir par moments les démons sous forme de serpents il en décelait un peu partout sur les fresques murales jusqu'à en avoir la nausée, on verra un peu plus loin pourquoi.

Rappelons que la Sibylle qui oeuvrait dans la vieille cité italo-grecque de Cumes est une prêtresse d'Apollon (comme la Pythie de Delphes) qui est censée avoir vendu au roi étrusque Tarquin le Superbe les trois livres de divination dont elle disposait après en avoir brûlé six - Virgile dans l'Enéide dresse un portrait saisissant de ses possessions par le dieu dans ses moments prophétiques, à rapprocher de ce que Lucain dit de la Pythie dans sa Pharsale.

Les livres sybillins, qui jouèrent un rôle important dans la vie civique romaine, ont été progressivement enrichis de fausses prophéties que César Auguste fit expurger en stabilisant leur "canon".

J'ai déjà relevé à propos du Pasteur d'Hermas (ici et - quand on pense qu'un Irénée de Lyon pourtant estimé même par les protestants a pu y voir un livre canonique !) tout ce que cette connivence entre le christianisme et l'imaginaire sibyllin pouvait avoir de pervers (au passage je note à nouveau que le théologien Daniel Voelter y voit une sorte de "révélation privée" de la Sibylle comme la Vierge Marie peut en faire à diverses personnes en ce bas monde de nos jours..).

J'ai trouvé sur cette semaine sur Google-Books un livre peu connu du père jésuite François-Joseph Terrasse Des Billons (1711-1789) qui révèle encore à quelles erreurs conduit une trop forte valorisation de l'oracle sibyllin. Le livre s'intitule "Nouveaux éclaircissements sur la vie et les ouvrages de Guillaume Postel". Il évoque (en p. 61) les travaux de Postel (1510-1581), un kabbaliste chrétien normand, ami de Saint François Xavier et conseiller de François Ie (par l'entremise de la pieuse Marguerite de Valois, qui s'est beaucoup trompée - voyez son soutien aux libertins quintinistes). 

Desbillons (ou des Billons, les deux orthographes sont admises) y écrit qu'il a en sa possession un livret rare de six feuillets composé par Postel intitulé "Sybyllinorum Versuum A Virgilio inquarta Bucolicorum versuum Ecloga transcriptorum Ecsrasis, commentarii instar, Gulielm Postello Autore", daté de 1553,dédié à Guillaume De Prat, évêque de Clermont. Je vais recopier largement ce qu'il en dit pour les amateurs de recherche sur la "traçabilité des livres", puisqu'aucun autre site ou blog n'en parle.

"L'auteur dit que cette Eglogue contient une Prophétie, qui regarde le Sauveur du monde, et qu'elle a été indignement et très sacrilègement profanée par l'application que Virgile a osé faire à l'avorton romain. Il prétend que cette prophétie est un abrégé de l'ancienne théologie sur l'avènement du roi céleste, promis d'abord à Eve, ensuite à Noé ; annoncé enfin et publié dans le monde par les enfants de Japhet.

J'ai cru, dit [Postel] devoir éclairer ce précieux monument ; et si je vous le dédie, ce n'est pas tant à cause de l'amitié que vous avez pour moi, que parce que vous êtes le premier qui ayez protégé dans notre France une Compagnie [les Jésuites], née dans le sein de ce beau royaume""Notre interprète, poursuit des Billons, donne pour un fait certain que Noé, appelé Janus par les Latins, a régné en Italie et qu'il est le même que le Janus des Latins. Il prétend qu'il fut aussi nommé Saturne, et que l'Age d'Or se maintint dans cet heureux pays tant qu'il y régna. Il suppose que la religion pure et sainte, qui avait fait le bonheur des peuples de ce temps là, fut corrompue par les Saturniens, méchante postérité de Saturne fécond, qu'il dit avoir été un des fils de Cham ; que cependant la tradition des promesses divines qui avaient annoncé le Rédempteur du monde, se conserva parmi un petit nombre de personnes sages et fidèles aux lumières de la droite raison ; qu'elle se conserva de la même manière chez les Japhétiens, à qui appartenait de droit l'administration temporelle de l'univers ; que les Sémiens ou descendants de Sem, avaient les mêmes promesses, mais annoncées moins clairement que chez les autres nations.

Il n'est pas étonnant que Postel parle ainsi, puisqu'il veut qu'on regarde comme authentiques, et de l'antiquité la plus reculée, les Livres Sibyllins. Il a en vue les livres Sibyllins tels que nous les avons aujourd'hui. Tout le monde convient qu'ils ne sont pas moins qu'authentiques et qu'il y a des choses qui n'ont pu y être insérées qu'après la naissance du christianisme. Postel dit enfin que les prédictions de la Sibylle de Cumes, copiées par Virgile, annoncent la dernière restitution ou régénération des hommes, et le rétablissement de l'Age d'or dans le monde entier : ce qui est justement le grand ouvrage, pour lequel il croyait que le Ciel l'avait vu naître. 

Après cette interprétation générale vient le commentaire, qui commence en page septième". Des Billons résume ce commentaire ainsi : pour Postel, il y a deux Saturnes, celui qui est Janus et celui, corrupteur, qui est fils de Cham et dont le nom est Sabbathius Sanga (un emprunt au faux Bérose, de l'imposteur Annius de Viterbe). La Sibylle aurait annoncé le retour du premier Saturne. Quand Virgile écrit "Tuus jam regnat Apollo", déjà Apollon règne, il évoque l'agent universel dont les rayons divins donnent le mouvement à tout, c'est le Verbe incarné, le roi des rois, dont Cicéron parle dans le second Livre des dieux. Selon Des Billons, ce n'est pas dans le second Livre des dieux, mais dans le le livre second du "De la Divinisation", au chapitre 54, que Cicéron dit que "Certain bruit s'était répandu qu'un interprète des vers sibyllins (le quindecimvir Lucius Cotta) allait déclarer en plain Sénat, que si nous voulions échapper à notre perte, nous devions appeler roi celui (Jules César) qui l'était en effet. Quorum (Versuum Sibyllae) interpres nuper, salsa quaddam hominum fama, dicturus senatu putabatur, eum, quem revera regem habebamus, appellandum quoque esse regem, si salvi esse vellemus. Si cela est dans les Livres Sibyllins, ajoute-t-il, je demande quel homme et quel temps cela regarde. Hoc si est in libris, in quem hominem et in quod tempus est? Postel parlant du Messie, le signe plusieurs fois par ces seuls mots : Rex appellandus. Il fait sans doute allusion à ce passage qu'il se souvenait d'avoir lu dans Cicéron et il veut faire entendre que le temps est venu, où Jésus-Christ doit être appelé de toutes parts le Roi des Rois, Roi de l'Univers;. "

Puis, Postel s'attarde sur le mot colocasia au 20e vers : ""mixtaque ridenti colocasia fundet acantho"(et la colocase mariée à la gracieuse acanthe). La colocase est inconnue à Rome, et très connue en Syrie, ce qui prouve bien que l'enfant sera juif. La colocase ne fut en effet connue que sous Pline. Mais des Billons estime que Virgile a pu la connaître. Pour Postel seuls les onze derniers vers sont de Virgile. Postel en déduit que l'âge d'or et le retour à la raison viendront sous un monarque puissant.

L'admiration de Postel pour les textes sibyllins était solidaire de son culte d'Eve et de la puissance féminine, qu'il exprime notamment dans son traité "Les très Merveilleuses femmes du Nouveau Monde" dans lequel il n'hésite pas à affirmer qu'à travers la Sibylle la puissance féminine gouvernait Rome. Ce culte de la féminité allait jouer des tours au théologien puisqu'à Venise il allait, en 1555, voir dans une vieille femme la "nouvelle Eve", ce qui allait conduire l'Inquisition dans la ville à faire brûler ses livres, sans toutefois le tuer lui, le jugeant trop fou pour pouvoir être vraiment hérétique.

Postel est un kabbaliste, rappelons le ; la kabbale est très tournée vers la femme et d'ailleurs sa théologie plairait bien au féminisme actuel lequel est lui-même en est souvent inspiré (voir Me Too, "God is a woman" etc). Et le fait que le théologien évoque beaucoup Noé évoque la Sibylle hébraïque "bru de Noé" des gnostiques (je renvoie à Barbara Aho sur la présence kabbaliste dans la Gnose). Tout cela sent le culte de Lilith - la femme de Satan. 

Pourtant rappelons que le poème de Virgile, à supposer même qu'il se rapporte à un oracle sibyllin authentique, garde un rapport très éloigné au message évangélique. Récemment dans les milieux eux aussi sulfureux qui entourent les visions de Maria Valtorta, un certain Vittorio Messori en 1978 n'hésitait pas à faire une fausse citation (voir ici) de l'églogue de Virgile pour la rendre plus précisément conforme à la théologie chrétienne...

Messori en revanche à juste titre rapprochait la prophétie sibylline d'une autre prêtée aux druides à propos de l'enfantement du sauveur par une vierge, dont on a parlé sur ce blog en 2017 à propos de Chartres. Et c'est là, je crois, une collusion tout aussi périlleuse que la symbiose du christianisme avec les livres sibyllins.

Le député bourguignon Henri Le Mulier (1803-1872) dans sa "Vie de la Très Sainte Vierge" de 1854, raconte qu'en septembre 1833, dans une maison place du Grail à Chalons, à 8 pieds de profondeur furent trouvés 30 squelettes humains. A quelques pieds au nord de ces ossements, des fractions de chapiteaux à volutes.Non loin de cet endroit et du palais des gouverneurs de Chalons sous Claude et Néron, une chapelle souterraine consacrée par les druides à la Vierge des sectateurs d'Hésus. Là les prêtres de Jupiter de d'Apollon se rendaient en grande pompe le premier de chaque mois, pour faire des oblations et réciter des vers autours d'un autel, sur lequel était élevée la statue d'une jeune fille, tenant un enfant entre ses bras. Au bas était cette inscription en lettres d'or "Virgini pariturae Druides" (les Druides à la Vierge qui doit enfanter).

Adrien Péladan (le frère du célèbre Joséqhin le "Sar", occultiste de renom) dans La France littéraire, artistique, scientifique, allait reprendre cette nouvelle dans son n°49 du 5 septembre 1864 (p. 779) tout en remarquant avec malice qu'il y avait une pierre égyptienne dans la statue de Marie au Puy-en-Velay, et en ajoutant qu'Elias Schedius (1615-1641) a écrit qu'en Germanie et en Angleterre aussi "Les Druides avaient dans l'intérieur de leurs sanctuaires une statue consacrée à Isis ou à la vierge qui devait enfanter le libérateur du monde" (De Diis germanis, c. XIII p. 346). Isis ou la Vierge... Effectivement à ce niveau les deux cultes s'entremêlent. Saint Jérôme aussi avait en son temps recensé tous les cultes des vierges mères. Ils ont probablement pavé la voie au culte marial, mais ont-ils ouvert le chemin d'une compréhension profonde de la Bible ? ça c'est une autre histoire...

A propos de la naissance du fils de la Vierge, je vous signale aussi cet excellent article de l'universitaire Gérard Gertroux ici qui démontre qu'un recensement a bien été organisé par le gouverneur de Syrie en l'an 2 av JC date de la naissance de Jésus, comme le disent les Evangiles. Un point important dans le sens de leur vérité historique...

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Amour, paix et vérité

5 Octobre 2019 , Rédigé par CC Publié dans #Christianisme, #Philosophie, #Médiums

Je regardais ce soir une vidéo "New Age" qui faisait l'éloge de la pensée positive pour créer des synchronicités qui vous mettent sur le bon chemin existentiel. Cela me faisait penser à ce que disait Doreen Virtue, la médium repentie : que du temps où elle croyait à ces pensées "énergétiques", la "loi d'attraction" et autres fariboles, elle s'épuisait à essayer d'être heureuse mais n'en tirait au fond qu'une frustration permanente de ne pas être vraiment "remplie" de quoi que ce soit, tandis que sa vie était chargée de dix mille rituels inutiles pour s'attirer les faveurs des anges.

Beaucoup de chrétiens diront que c'est parce que cette forme de satisfaction que recherche le New Age est profondément égoïste et que dans l'Ego il ne peut y avoir que de la frustration. Je suppose que les "New Agers" et adeptes des thérapies du développement personnel diraient simplement que des gens comme Doreen Virtue sont inaptes à trouver un équilibre énergétique dans les voies de la pensée positive et que donc, ils ont raison d'aller chercher ailleurs, mais que cela n'invalide pas la théorie de la pensée positive pour autant.

Je ne sais trop qu'en penser. Il y a peu j'ai croisé une gardienne de musée qui faisait un éloge vibrant de la méditation et du yoga, de la paix que cela apportait, mais dont la façon tonitruante d'en parler, et surtout la manière dont elle se comportait ensuite avec les visiteurs du musée, montraient qu'en réalité elle n'avait atteint aucune paix intérieure. Difficile de faire la part de la vérité et du mensonge à soi même dans ce genre de profession de foi.

Il en va de même d'ailleurs de toutes ces vidéos de gens sur You Tube qui ont trouvé "le salut en Jésus-Christ" - par des voies bibliques -. On veut bien les croire quand ils affirment que cela les a sauvés de mille addictions néfastes (à la drogue, au sexe, au stress, à la méchanceté, etc) mais on se doute bien que ça ne résout pas tous les problèmes psychologiques, loin de là. D'ailleurs j'ai souvent entendu des chrétiens "bibliques", dénoncer le christianisme trop auto-suggestif d'une Joyce Meyer ou d'autres charismatiques et autres adeptes de l'Evangile de la Prospérité comme autant de formes d'hérésie. A entendre ces fondamentalistes, du reste, on a presque l'impression que les excès de sérénité ou de bonheur peuvent être des pièges sataniques. En retour, les charismatiques les accusent d'être des pisse-froid qui refusent les "dons de l'Esprit" promis par Jésus aux fidèles pour faire face à la fin des temps. Tout cela me fait penser aussi, dans l'univers catholique, à Sainte Thérèse de Lisieux qui disait qu'il était bien d'être triste... On reste très loin des éloges évangéliques de la "paix du Christ" et des injonctions de Saint Paul à être remplis d'amour... Ces injonctions sont des sources d'une telle amertume, qu'on finit par devenir quiétiste et se dire "allons, ne faisons rien, ne cherchons rien, et Dieu nous remplira d'amour seulement s'il le veut ou s'il en a besoin, ce serait blasphémer que de prendre les devants en la matière". N'était-ce pas la position des braves Moraves qui faisaient l'admiration de Wesley ? Mais bon, ensuite, entre le quiétisme et l'absence totale d'engagement religieux il n'y a qu'un pas...

J'ai connu un protestant qui voyait que sa conversion ne l'avait si évidemment pas guéri sur le plan psychologique qu'il s'était lancé dans la programmation neurolinguistique (PNL) et avait voulu devenir thérapeute dans ce domaine lui aussi, car il était convaincu que les chrétiens qu'il avait connus, faute d'assumer le fait que la conversion ne guérit pas, stagnaient dans la souffrance mentale et ainsi échouaient à aimer leur prochain, alors que la PNL les eût guéris. Sauf que plus il faisait de la PNL plus ce protestant me semblait s'enfermer dans l'orgueil. Je soupçonne qu'il réinvitait le diable en lui à mesure qu'il pensait guérir.

L'exorciste Allan Rich dans une vidéo disait que tout n'est pas spirituel, qu'il y a du psychologique qui peut être soigné par la psychologie. Mais dire cela n'est ce pas admettre déjà une limite au pouvoir de guérison divin ? N'est ce point prendre les devant à l'égard du projet de Dieu en choisissant des voies profanes, voies chargées de choses dangereuses comme j'ai pu le vérifier moi-même sur les chemins du "développement personnel" ou de la psychanalyse ?

Pour ma part, lorsque j'ai échappé aux médiums et me suis converti, en m'en remettant à Dieu j'ai surtout trouvé là une source de révélations cognitives considérables sur le monde qui m'entourait, son histoire, le fonctionnement des gens au quotidien, les fautes de ma vie, les mécanismes de la politique, toutes sortes de choses qui donnent vraiment un sens nouveau à tout. J'ai aussi découvert un mode de collaboration avec le monde invisible, avec le "royaume de Dieu", en acceptant ce qui arrive, en se mettant à l'écoute de ses rêves, de divers signes, en ne voulant rien pour soi même et tout pour Dieu. Les bienfaits de cette démarche ont été considérables. Pour autant je ne veux pas les surestimer ni jouer la méthode Coué. Je ne peux pas cacher qu'en cinq ans si mon regard sur les choses a changé, mes conditions de vie restent similaires. Beaucoup de problèmes restent absolument intacts. Je suis intérieurement plus "unifié", et plus soutenu par l'espérance, mais je ne suis pas rempli d'amour et de paix comme est censé l'être un bon chrétien. Je manque souvent de patience, et cela d'ailleurs nourrit en moi de fortes tentations de pécher à nouveau - s'offrir un de ces petits plaisirs malsains auxquels j'ai par principe renoncé, quitte d'ailleurs à parer ces plaisirs de vertus salvatrices, y compris salvatrices d'autrui, qu'ils n'ont pas (je pense par exemple à tout ce thème reichien du salut par la sexualité auquel je croyais à 20 ans). Cela s'appelle le combat spirituel - "spiritual warfare" disent les Anglo-saxons. Cela fait partie du jeu. Les démons sont là pour tester que vous vous êtes bien converti, que ce n'est pas pour rire. Sinon ce serait trop facile. Il n'y aurait pas d'engagement authentique pour Dieu...

Le plus surprenant à mes yeux d'ailleurs est la persistance du vide qui était déjà une caractéristique de mon existence avant ma conversion. Si certains jours des événements intéressants s'enchaînent qui viennent m'apprendre des choses - ou confirmer des choses déjà apprises - parfois de façon très spectaculaire (c'est ce qu'on appelait jadis le processus d' "édification"), par moment tout retombe dans l'insignifiance, et pour de nombreux jours. Les gens qui ont été mis sur votre chemin d'une manière intrigante, inattendue, disparaissent d'une façon tout aussi impromptue (d'autant qu'Internet a rendu les gens capricieux et zappeurs et tout devient facilement inconsistant) si bien qu'on finit par se demander quel sens ça a pu bien avoir de les avoir près de soi, si on leur a vraiment apporté quoi que ce soit. Le sentiment d'absurdité, comme l'incapacité à être rempli d'amour que j'évoquais plus haut, est en soi une source de retour des tentations hédonistes et égoïstes.

Souvent, en proie à ce genre de démon, je recherche le contact avec l'Esprit saint dans la solitude et l'inaction. Je reste des heures à ne rien faire et attendre que ça passe. Je me souviens que Flaubert disait que des trois grandes tentations qu'il connaissait (la luxure, la tentation de la connaissance, et la tentation du néant - à mon avis la deuxième n'est pas une tentation mais une vertu sauf si elle conduit à enfreindre un des Dix Commandements) la première était la plus facile à vaincre car il suffisait d'attendre que ça passe. A vrai dire j'ai l'impression que l'inaction, et notamment le sommeil (pensez à Epiménide, que Saint Paul qualifiait de prophète et qui dormit pendant des décennies) sont un remède à tout. Sauf que pendant que l'on fait ça, on n'aide personne, mais on ne peut pas à la fois vaincre ses démons et assister utilement son prochain. Après tout Sainte Geneviève ne passait elle pas des mois en prière dans sa cellule ? En faisant cela elle n'aidait personne, et pourtant c'est grâce à cela qu'elle put ensuite sauver Paris comme Epiménide sauva Athènes.

Personnellement je suis enclin à placer la vérité au dessus de tout, et surtout au dessus du confort psychologique. Vivre selon la vérité, dans la vérité, compte plus que de vivre en paix. Alors tant pis si souvent l'on vit sans paix et sans amour. La vérité, un jour, nous libèrera, c'est une promesse qui nous est faite par l'Evangile. Donc elle nous fera aimer aussi... Et puis qu'est-ce qu'aimer ? J'en entends certains qui trouvent dans la Bible la preuve de ce qu'aimer c'est d'abord aimer Dieu, et donc d'abord obéir aux commandements - dans un second temps seulement Dieu nous aidera à aimer autrui. D'autres disent qu'aimer en voulant le salut de l'autre c'est déjà beaucoup, pas besoin d'avoir beaucoup de sentiments en plus de cette seule bonne volonté. L'excès de sentiment viendra après, inspiré par le Saint Esprit.

Allez savoir...

Une kabbaliste comme Arouna Lipschitz se demande aussi dans ses vidéos comment on concilie la paix intérieure et l'amour d'autrui, surtout quand cet "autrui" est un type qui vient vous casser les pieds avec sa musique. L'amour au temps de l'Antéchrist quand tout le monde est devenu égoïste et malpoli. Vaste sujet. Chrétiens convertis, New Agers, kabbalistes, énergéticiens pataugent tous dans la même gadoue à ce sujet, la triste condition humaine. Et il faut reconnaître que souvent la plus-value du chrétien biblique tient seulement à la cohérence du message dont il est détenteur (cohérence malgré d'ailleurs quelques contradictions superficielles) et la force de la promesse dont il est dépositaire. Une petite différence, qui dans le rapport à la Vérité (à la défaut du rapport à soi ou à l'autre), change quand même tout.

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